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Le temps des illusions

Le temps des illusions

Titel: Le temps des illusions Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Evelyne Lever
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deFeuquières, fille du peintreMignard ; le chancelier d’Aguesseau, le duc deCharost, le comte d’Évreux, la duchesse deRohan-Montbazon, le duc deDuras y demeurent encore. Les Fontanieu, de riche robins, investissent dans le quartier de la Madeleine, rue d’Anjou et rue de la Ville-l’Évêque.
    Le faubourg Saint-Germain reste le quartier le plus élégant, celui de l’aristocratie dont les hôtels surgissent au milieu de jardins admirablement entretenus. En 1723, le duc de Valentinois, Jacques deGoyon-Matignon, a acheté l’hôtel de Tingry qui était encore en cours de construction. La rue de Varenne est bordée de magnifiques hôtels. Sur la rive gauche de la Seine, les architectes se livrent à une spéculation effrénée.Lassurance,Albert etGabriel ont achevé en 1729 le Palais-Bourbon et l’hôtel de Lassay. Un banquier, PierreSalles, a l’intention de construire une dizaine de maisons rue de Bourbon et rue de l’Université.
    Les curés veulent moderniser leurs églises, mais ils manquent d’argent. C’est ainsi qu’à Saint-Sulpice, M. Languet deGergy, celui-là même qui avait refusé d’enterrer religieusement AdrienneLecouvreur, se livre à de lucratives affaires afin d’achever la façade de son église : il s’est lancé dans la production de mousseline et depuis 1732 il vend du beurre. Il s’est fait céder l’île aux Cygnes où il élève des vaches. Leur lait sert à la fabrication de petits pains de beurre marqués de la croix de Saint-Sulpice qu’il vend un écu. On prétend que les fileuses de ses ateliers jouent la comédie et quêtent à la fin du spectacle. Le clergé régulier, qui a lui aussi besoin d’argent, s’intéresse aux revenus locatifs. Les abbés de Saint-Germain-des-Prés ont aliéné les maisons à loyer et les boutiques à l’intérieur de l’enclos de l’abbaye.
    Les embarras de Paris dont parlait déjàBoileau au siècle précédent sont toujours aussi impressionnants. Il y a longtemps qu’on ne circule plus en chaise à porteurs. Les pauvres vont à pied et les riches en carrosse dont les cochers sont d’une imprudence et d’une insolence insupportables. Ils causent souvent des accidents. Les jours de pluie, on est sali par la boue des ruisseaux quiécoulent les eaux sales au milieu de la rue. On comprend pourquoi il faut essayer de tenir le haut du pavé. Malgré ces inconvénients, les Parisiens sont généralement de bonne humeur. Ils parlent volontiers quelques instants à des inconnus, mais restent sur la réserve avec leurs voisins. Chaque individu se trouve confondu comme les grains de sable au bord de la mer. Beaucoup de gens s’habillent chez le fripier et ce n’est pas forcément l’habit qui fait le moine. On croise des laïques qui portent le petit collet pour se faire ouvrir beaucoup de portes tandis que des abbés frisés et poudrés se pavanent comme des petits maîtres… mais on reconnaît d’emblée les jansénistes à leurs vêtements austères.

    À l’enseigne de Gersaint 3
    Tous les Parisiens vont et viennent à leurs affaires dans un mouvement perpétuel. Marchands et artisans travaillent sans relâche. Ateliers et commerces se diversifient. On sait que les boutiques de luxe se sont installées rue Saint-Honoré ; il y en a aussi rue du Roule et rue de la Monnaie. Les objets les plus rares voisinent avec « ces riens brillants, ces nobles bagatelles, qu’Hébert vend à crédit pour tromper tant de belles », dit Voltaire. Hébert, marchand mercier à l’enseigne du Roi de Siam, propose à sa clientèle des nécessaires combinant écritoire et boîte à ouvrage, des panneaux de laque de Chine et quantité d’objets dont raffolent les élégantes. Les marchands merciers, qui avaient autrefois pour vocation le commerce international des tissus précieux, achètent et vendent maintenant des meubles et des objets d’art. Ils ont habitué les artisans à adapter leur production aux exigences de la clientèle. On s’étonnera sans doute de voir figurer dans cette corporationEdme François Gersaint pour lequelWatteau peignit sa célèbre enseigne. Ce chef-d’œuvre donnait l’image d’un magasin rempli de tableaux mais, en réalité, les meubles représentent près de la moitié du fonds, les tableaux et les cadres un peu plus dutiers, le reste étant constitué par des objets décoratifs et des gravures.
    Entrons dans cette boutique de la rue du Petit-Pont qui comprend plusieurs pièces sur deux étages.

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