Le temps des illusions
pourJean-François de Troy, Noël-NicolasCoypel etCazes. Quoi qu’il en soit, cette apothéose d’Hercule, qui s’élève dans un ciel riche en figures inspiré par une tradition italienne très différente de celle deLe Brun pour la galerie des Glaces, est unanimement saluée par les connaisseurs.
Le goût ne suit plus la hiérarchie des genres prônée par l’Académie. En 1725, les visiteurs de la place Dauphine portèrent aux nues les scènes animalières d’Oudry. Entré dans l’atelier de Lemoyne, très doué pour la décoration, il avait peint des dessus-de-porte pour le château de Fontainebleau. À vingt ans, lauréatdu grand prix de peinture organisé par l’Académie, il partit pour Rome où il fit un séjour très profitable. À son retour à Paris, il se présenta à l’Académie comme peintre d’histoire afin de jouir de la considération de ses collègues, mais il se spécialisa bientôt dans ce qui lui plaisait le plus, la peinture animalière, considérée comme un genre mineur.Louis XV, très sensible aux sujets qu’il traitait, a nommé Oudry son peintre animalier et l’historiographe de son chenil. Il est devenu le « La Fontaine de la peinture ».
À partir de 1732,Chardin a supplanté Oudry dans le cœur des foules. Parisien, il a fait ses débuts dans l’atelier de Noël Nicolas Coypel. En 1728, à vingt-neuf ans, il a exposé La Raie place Dauphine. Rien de moins estimé par l’Académie que les thèmes qu’il affectionne, le gibier, les fruits, les ustensiles de cuisine. Il a été reçu dans ce cénacle comme « peintre des animaux et des fruits ». Il n’imite pas ses contemporains, ne s’intéresse pas aux sujets mythologiques ou historiques, mais à la vie quotidienne des gens du peuple et de la bourgeoisie, préférant représenter les femmes plutôt que les hommes. Il ne montre jamais la misère et la souffrance. Il donne de la noblesse aux occupations banales, saisit le sérieux d’un enfant qui joue, faisant toujours passer dans sa peinture les sentiments d’un monde attaché aux valeurs traditionnelles. Dans ses natures mortes, il mêle le gibier sur le point d’être plumé à des légumes et à des fruits, choisissant et mettant en scène les objets pour leurs formes et leurs couleurs.
FrançoisBoucher, un jeune peintre plein d’avenir, ancien élève de Lemoyne, a beaucoup travaillé pour le marché de l’estampe en exécutant des dessins d’après les maîtres anciens, en particulier en Italie où il fit un long séjour de 1728 à 1731 pour se familiariser avec les techniques picturales des artistes de la péninsule. À son retour à Paris, il a décoré l’hôtel de Soubise. L’année suivante, il est entré à l’Académie et la manufacture de Beauvais lui a commandé des cartons pour sa première série de tapisseries. Le roi lui a ensuite demandé de peindre le plafond de la chambre de la reine et deux scènes de chasse pour ses petits appartements.
Le mécène libertin pris au piège de Mme deTencin
Les fermiers généraux, ces riches financiers qui collectent les impôts indirects affermés par le roi, sont devenus les protecteurs des arts et des lettres. Ils s’entourent d’écrivains et d’artistes ; les œuvres qu’ils accumulent prouvent leur culture et leur intelligence. Ce mécénat purifie leur argent de nouveaux riches méprisés par la noblesse, qui en a cependant bien besoin. N’ayant pas d’ancêtres dont ils puissent exposer les portraits sur leurs murs, ils font faire le leur, celui de leur femme et de leurs enfants par les mêmes peintres que les grands. Leur mobilier vient des meilleurs ébénistes, leur argenterie, leurs bijoux, leurs parures sont d’un luxe qu’on ne rencontre que dans l’entourage royal. Ils habitent de splendides hôtels à Paris ; beaucoup d’entre eux ont choisi le quartier Montmartre ; ils vivent rue Gaillon, rue Vivienne ou rue Neuve-des-Petits-Champs dans la paroisse Saint-Roch.
Antoine Le Riche deLa Popelinière, le plus fastueux de ces financiers, est un esthète. En 1731, il a été bouleversé par la peinture flamande au cours d’un voyage aux Pays-Bas dont il a rapporté quantité d’objets de curiosité. À Paris, il protège et reçoit le pastellisteLa Tour, le dessinateur et peintre CarleVan Loo, le mécanicienVaucanson. Musicien averti, La Popelinière voue une amitié sincère et profonde à Jean-PhilippeRameau. C’estPiron qui le lui a présenté vers 1731. Peu
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