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Le temps des illusions

Le temps des illusions

Titel: Le temps des illusions Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Evelyne Lever
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sentiment tendre ! Je l’ai fixé longtemps et voyez ce que c’est que l’imagination, j’ai cru qu’il cherchait à me reconnaître. Sa voiture allait si lentement que j’eus le temps de l’examiner longtemps. Je ne puis vous exprimer ce qui se passa en moi… » Mme de Châteauroux fut cependant reconnue et elle s’enfuit aux cris de « Voilà sa putain ».
    Rien n’est plus fragile que la popularité. Aujourd’hui Louis XV est le héros que le royaume a failli perdre. On l’aime parce qu’il incarne jeunesse, beauté et majesté et qu’il s’est montré à la tête de ses armées comme un général victorieux après trop de défaites. On a voulu croire qu’il était tombé malade pour défendre les Français et le royaume. Les victoires de Flandre et le drame de Metz rendent au souverain l’amour du peuple qu’il était près de perdre quelques mois plus tôt tant on parlait de son indifférence au bien public et de sa vie libertine.

    Un événement singulier
    Dès son retour à Versailles, le roi a manifesté son mécontentement aux dévots qui avaient organisé les scènes de Metz. Il exile dans leurs terres leduc et laduchesse de Châtillon pour avoir conduit le dauphin jusqu’à lui et surtout pour avoir tenu des propos désobligeants à l’égard deMme de Châteauroux ; leduc de La Rochefoucauld, âme de la cabale, est tenu de rester chez lui à La Roche-Guyon etMgr de Fitz-James renvoyé dans son diocèse de Soissons.Louis XV réserve un autre traitement àMaurepas, qui n’a guère ménagé la duchesse de sa langue vipérine.
    Le souverain prépare le retour en grâce de sa maîtresse qu’il n’a jamais cessé d’aimer. Seule sa peur de l’enfer l’a fait céder aux foudres de l’Église incarnée par Mgr de Fitz-James. Mme de Châteauroux, après son départ de Metz sous les injures de la foule, s’était tout d’abord réfugiée à Plaisance dans le château dePâris-Duverney. Elle y rencontra lecardinal de Tencin partant rejoindre le roi et le chargea d’un message pour son amant. Elle recommandait à Louis de « ne rien dire ni de ne faire choses dont il eût pu se repentir quand il serait en bonne santé ». Lorsque Tencin arriva auprès du monarque, celui-ci était sauvé et reçut ainsi des nouvelles de son amante.
    La jeune femme toujours accompagnée de sa sœur s’installa avec elle rue du Bac dans un hôtel dépendant des Jacobins où elle reçut souventMme de Tencin, qui la prit en grande affection. La favorite n’osait plus écrire au roi.Richelieu lui prêchait la patience. Lorsque le souverain lui exprima enfin son désir de la revoir à Versailles, elle négocia âprement son retour. Satisfaite d’apprendre que les dévots étaient exilés, elle exigea le renvoi de Maurepas, qui avait, lui aussi, trempé dans la cabale. Elle céda cependant aux instances du monarque qui promit d’humilier son ministre devant elle : il lui ordonna de remettre en main propre à sa maîtresse le billet qui la rappelait auprès de lui ainsi queMme de Lauraguais. Lorsque Maurepas se présenta chez la duchesse, le 26 novembre, la porte lui fut deux fois refusée, mais après qu’il eut dit qu’il venait de la part du roi, la duchesse le fit entrer. Elle reçut au lit celui qu’elle appelait M. Faquinet. Assez embarrassé, il lui annonça la raison de sa visite et lui remit la lettre. Elle le toisa et il s’inclina pour lui baiser la main. « Cela est sans conséquence », dit-elle avant qu’il partît.
    Mme deChâteauroux triomphait mais elle n’allait pas bien. Une forte fièvre et de violents élancements dans la tête l’obligèrent à garder le lit. Le lendemain,Vernage, son médecin, la saigna sans succès. On apprit en même temps le retour en grâce et la maladie de la favorite. L’événement frappa la Courcomme la Ville. Mais à Versailles les plus sages gardèrent le silence.
    Le 1 er  décembre, les nouvelles de la malade étaient inquiétantes. À son lever, le roi, d’une humeur sombre, ne dit pas un mot. Le 4, Mme de Châteauroux fut saignée pour la septième fois. Elle souffrait le martyre, se tordait de douleur et délirait. On cachait l’état de sa sœur àMme de Lauraguais qui venait d’accoucher. Aussi faisait-on le plus de bruit possible dans sa chambre pour couvrir les hurlements de la malheureuse que les médecins n’avaient plus l’espoir de sauver. Lors d’un moment de répit, elle reçut sa sœur,Mme de Flavacourt, et parvint

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