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Le temps des poisons

Le temps des poisons

Titel: Le temps des poisons Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: C.L. Grace
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N'ai-je point le droit de me délasser ?
    —
    A propos de ces deux meurtres, croyez-vous qu'il ne s'agit que d'une querelle de villageois ? demanda Colum, faisant fi de sa bonne humeur.
    —
    Je ne sais, mais, là encore, le mystère nous environne et, avant que nous quittions Walmer, il faudra bien que la vérité surgisse.

    Colum la saisit par les épaules et l'embrassa sur le front.
    —
    Je vais revenir, murmura-t-il.
    « Mon fanfaron d'Irlandais ! » pensa Kathryn en le regardant s'éloigner. Pourtant, de bien des façons, Colum était resté enfant : quelque chose en lui n'avait pas grandi. Il aimait les chevaux et les soignait avec passion. Il parlait d'eux ou de son pays natal jusqu'à ce qu'on le supplie d'arrêter. Kathryn rit in petto. Colum était un soldat et pouvait se montrer violent. S'il avait une âme de combattant et était adroit à l'épée, il était aussi gentil, ardent et amoureux. En repensant à la nuit passée, Kathryn rougit.
    Elle se leva, retourna vers le carré de simples et examina les diverses plantes, si belles sous le soleil. Elle se demanda quels autres mystères se cachaient sous la sérénité de ce manoir luxueux et du village prospère qui ne s'étendait qu'à un mille des grilles. Elle ne comprenait rien à ces empoisonnements. Quelqu'un avait-il un compte à régler avec le forgeron et son épouse ? Si c'était le cas, alors l'assassin, tôt ou tard, commettrait peut-être une erreur. Elle regarda avec attention l'un des pommiers. Ou n'était-ce que le début d'une série d'empoisonnements ? Et Lord Henry ? Elle se mordilla les lèvres. Comment diable une lettre, l'accusant de meurtre avec moult détails, pouvait-elle venir de sa femme supposée trépassée ? Le vélin de la missive était de bonne qualité et l'écriture, en anglo- normand précis et correct, était celle d'un érudit. L'auteur n'en était donc pas un des villageois mais un lettré. Kathryn s'accroupit et effleura les plantes du doigt, perdue dans le labyrinthe d'énigmes qui s'épaississait autour d'elle.
    Adam l'apothicaire était un homme fort troublé. Il n'avait été que trop heureux de s'échapper du manoir de Walmer et de retourner chez lui à Winingate Lane, la ruelle qui menait à l'église Saint-Swithun. La maison à colombages à un étage reposait sur une base de pierre et un jardin s'étendait devant et derrière. On pouvait accéder au premier soit par un escalier extérieur, soit par un escalier intérieur. Les affreux événements de la veille préoccupaient Adam. Elias et Isabella éteints, comme deux chandelles soufflées, ne laissant rien si ce n'est un peu de fumée dans l'air... leurs corps gisant sur ces grabats ! Et cette fouineuse de médecin de Cantorbéry ! Adam ne l'aimait pas. En fait, il la craignait. Elle était intelligente, celle-là, avec son regard perçant et son esprit vif ! Son visage serein, ses cheveux noirs et son regard assuré lui donnaient un air avenant, mais Adam savait reconnaître un véritable médecin quand il en rencontrait un. Swinbrooke était une
    peritus, tout à fait savante. Elle n'ignorait rien des herbes et des potions. Alors combien de temps lui faudrait-il pour venir à Walmer et commencer à espionner ?
    Adam s'assit sur son trépied et embrassa son apothicairerie du regard. C'est là, sur le comptoir, qu'il distillait potions et philtres. Il avait à dessein peint les murs et le plafond en noir et veillait à ce que l'unique fenêtre soit toujours fermée. Il préférait qu'il en soit ainsi : quand il introduisait ses clients dans la pièce, il tenait à ce qu'ils aient l'impression d'être ailleurs, dans une chambre où régnait le pouvoir, une chambre de troubles secrets. Sous la fenêtre se trouvait sa table, un mortier, un pilon, des mesures, des pelotes de ficelle et des morceaux de cuir. Pots et cruchons, jarres et sacs, chacun contenant une herbe déterminée, étaient rangés, étiquetés avec soin, sur des étagères autour de la pièce. Adam était un homme méticuleux qui aimait que tout soit en ordre. A gauche, il y avait les plantes destinées à faciliter l'accouchement et à traiter les maladies infantiles. Du marrube blanc qui, bouilli dans l'eau, aidait les femmes en travail. De l'herbe aux écus, très efficace contre la toux des enfants. De l'ail, de l'origan et de la camomille contre les fièvres. Des collerettes de la Vierge... à quoi donc servaient-elles, déjà? Adam s'enorgueillissait de son savoir mais il était pour

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