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Le temps des poisons

Le temps des poisons

Titel: Le temps des poisons Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: C.L. Grace
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toujours aimé s'installer ici avec son gobelet, sentir le contact du cuir et être sûr de ce qu'il contenait. Il avait toujours adoré boire dans ce gobelet. Il le porta à ses lèvres et avala une lampée. La bière était bonne ; il venait de la tirer au tonnelet de la cuisine.
    Une douleur à l'estomac l'assaillit et il revit le cadavre d'Elias étendu dans la cour de la forge. Un autre élancement, comme une langue de feu dans son ventre.

    Il se leva d'un bond, la douleur irradiant dans son dos et montant dans sa poitrine, le poignardant. Adam s'écroula et la chope lui échappa. Il avait du mal à respirer. Il avait envie de vomir et ses yeux le piquaient.
    Que se passait-il ? De quel poison s'agissait- il ? Était-il victime de ces mêmes poudres qu'il avait vendues ? Terrorisé, il fixa la porte. Il voulait se déplacer, ramper, tirer le verrou, tourner la clé, appeler à l'aide, mais il n'en avait plus la force. C'était si difficile de respirer ! Il avait le visage en feu et, en même temps, il ruisselait d'une sueur froide ; son estomac se soulevait. Il glissait dans un cauchemar. Il se souvint d'Isabella, de sa dépouille sur les planches, jambes étendues, tête inclinée de côté, une expression hideuse sur le visage. Et ces trois hommes, sur les marches de l'église Saint-Swithun, les lancastriens qui, dépouillés de leurs épées et de leurs dagues, imploraient merci. Elias fondant sur eux en brandissant la grande hache qu'il avait prise dans l'appentis du jardin. Adam souffrait tant ! Il essaya de vomir. En vain. Il tenta de ramper mais ne réussit qu'à rouler sur le flanc. Il se demanda pourquoi sa mère gardait le silence.
    Y avait-il quelqu'un là- haut ? Était-il arrivé quelque chose ? Il sombra dans sa propre douleur, les jambes agitées de spasmes, toussant et hoquetant en expirant sur le sol de sa chambre secrète.
    Bien que de dimensions modestes, la bibliothèque du manoir de Walmer était fort belle. Les poutres du plafond étaient étroites. Une petite cheminée en brique rouge et au manteau de chêne ciré avait été construite dans le mur qui donnait sur l'extérieur. Comme on était en septembre, l'âtre vide était dissimulé derrière un écran de couleur aux armes des Beauchamp. Pour laisser entrer le plus de lumière possible, deux oriels encadraient le foyer. Dessous se trouvaient deux alcôves aux sculptures élégantes où Sir Henry ou tout érudit pouvait s'installer pour profiter de la clarté du jour. À droite de Kathryn, sur le mur, des étagères supportaient livres et manuscrits ; elle en avait déjà descendu quelques- uns, des copies de Froissart et Joinville, deux ouvrages d'Aristote et La Cité de Dieu de saint Augustin. C'était une belle collection de livres, certains reliés en cuir brun foncé, d'autres d'un bordeaux profond. Au fond, le mur était lambrissé et, au-dessus, un beau triptyque montrait, au centre, la Sainte Famille, avec un ange de chaque côté. Le plancher poli sentait la cire d'abeille. Kathryn était assise à une table du plus pur noyer. À
    sa gauche, au haut bout, Lord Henry étudiait une pile de documents qu'il avait extraits d'un sac, et, à sa droite, se tenait Colum Murtagh, à présent lavé, rasé et changé, afin de rencontrer les envoyés français, qui étaient installés en face.
    Kathryn leur sourit. Le vicomte de Sanglier, au milieu, s'inclina. « Il ressemble à un goupil », pensa-t-elle en regardant l'homme aux cheveux rejetés en arrière, à la moustache et à la barbe taillées avec soin. Sanglier n'était pas, comme à l'ordinaire, habillé de rouge mais arborait les couleurs royales de France : une cotte- hardie bleu et blanc bordée de fourrure, aux manches à plis serrés. Dessous, il portait un pourpoint crème molletonné au col fermé par une fleur de lys en or. Il était coiffé d'un élégant chaperon dont la longue pointe passait sous son menton et retombait sur son épaule droite. Delacroix et Cavignac étaient vêtus de même et, comme Sanglier, exhibaient deux anneaux : le premier frappé de la fleur de lys royale, l'autre de l'oriflamme, la bannière gardée au fond de la chapelle Saint-Denis à Paris, celle que les Français déployaient pendant la bataille quand ils avaient l'intention de ne pas faire de prisonniers.
    Sanglier voulait s'assurer que Colum et Lord Henry avaient bien compris qu'ils étaient des émissaires français venus négocier, dicter les termes d'un contrat et pas seulement

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