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Le temps des poisons

Le temps des poisons

Titel: Le temps des poisons Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: C.L. Grace
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s'immobilisa, stupéfaite.
    Tout le monde semblait s'y être retrouvé. Lord Henry présentait avec fierté un faucon de haut lignage qu'il venait d'acheter. Bel oiseau bleu-gris à la tête pointue et noire masquée par un petit capuchon, il se dressait sur son perchoir, jets tintinnabulant tel un elfe. Lord Henry montrait le rapace à Sanglier, Cavignac et Delacroix. Colum participait à l'exhibition en comparant les qualités de l'oiseau à celles des autres. Palefreniers et valets d'écurie se pressaient autour d'eux.
    Dans le coin, Kathryn fut surprise d'apercevoir le prêcheur assis sur un socle de pierre, une coupe de clairet dans une main, un quignon de pain dans l'autre. Il mangeait avec voracité, buvait à grand bruit et jetait des regards à la scène comme s'il assistait à une pantomime.
    Kathryn tendit les rênes de sa monture à un valet. Lord Henry l'accueillit avec chaleur. Elle nota ses yeux brillants et sa bouche souriante ; c'était la première fois qu'elle le voyait si heureux depuis son arrivée à Walmer.
    —
    Je leur montre cet oiseau, Maîtresse Swinbrooke. C'est un noble faucon. Colum estime que l'émerillon peut être plus rapide, plus dangereux. Est-il vrai, Messire, questionna-t-il en se tournant vers Sanglier, que les volières de votre maître à Paris sont peuplées de toutes les espèces de faucons existant sous le soleil ?
    —
    Notre souverain est habile fauconnier, répondit le vicomte, et aime à chasser, surtout près des marais.
    —
    Nous aimons tous la chasse, acquiesça Lord Henry en caressant du doigt le bréchet de l'oiseau. Là, là, mon tout beau, dit-il pour le calmer.
    —
    Que fait-il ici ? demanda Kathryn en désignant le prêcheur.
    —
    Je me suis posé la même question, remarqua Sanglier. Je l'ai vu déambuler avec assurance comme un juge venu rendre la justice.
    — Rien ne vous échappe, Messire le vicomte.
    Lord Henry tendit le pèlerin à l'un de ses serviteurs, frappa dans ses mains et appela le prêcheur. Celui-ci se leva et avala sa dernière bouchée de pain, qu'il fit descendre avec une ultime rasade de vin. Il donna sa coupe à un valet, s'approcha et serra la main du seigneur. Ce dernier l'attira vers lui et lui posa le bras sur les épaules. Ce geste amical étonna même Colum. Les trois Français contemplaient la scène en plissant les yeux.
    —
    Voici un homme de Dieu, commença Lord Henry, sarcastique. On l'appelle le prêcheur. Il voyage de-ci de-là et a même traversé la Manche pour se rendre en France.
    — Alors, l'interrompit Sanglier d'un ton tranchant, la prochaine fois qu'il visitera Paris je me chargerai de le divertir. Messire, cet homme est un espion !
    —
    Disons qu'il collecte des informations, suggéra Lord Henry sans cacher son amusement. Il rentre tout juste de Paris. Son vrai nom est Richard Blandford, clerc de la Cire verte. Jadis, tout comme vous, Messire - il fit un geste vers Delacroix -, il a étudié pour être prêtre avant de comprendre que Dieu lui ouvrait une autre voie. Il connaît les Évangiles et les écrits des Pères de l'Église sur le bout des doigts.
    Il était évident que la gêne des Français réjouissait Blandford.
    —
    Maître Blandford est donc encore tout imprégné de Paris où il a vécu avec les vagabonds. Je crois qu'il existe ce que vous nommez la guilde des pécheurs, la fraternité des peccants, si on peut le traduire ainsi, continua Lord Henry, mais ce peut aussi être la guilde des pêcheurs ; elle sonde la Seine en quête d'objets de valeur et ramasse les cadavres emportés par le courant dans les roseaux ou le long des berges boueuses.
    — Et ? s'enquit Sanglier.
    —
    On a retrouvé le corps de Marshall. Il a été identifié grâce à l'anneau frappé de mon emblème qu'il portait au doigt.
    Sanglier recula, ses amis serrés derrière lui.
    — Qu'est-ce... ? demanda le vicomte.
    —
    Nous avons appris, répéta Lord Henry, que la dépouille de Marshall a été retrouvée. On l'a confiée aux Filles de Dieu, les nonnes du couvent de la Merci, près de la porte Saint-Denis, pour qu'elles l'enterrent.
    — Eh bien ?
    —
    William Marshall ne s'est point noyé, reprit Lord Henry d'un ton égal, tout enjouement disparu. Il a été occis. Sa gorge n'était plus qu'une plaie mâchée, ouverte d'une oreille à l'autre, béante comme une autre bouche. On l'a assassiné.
    —
    Vous n'avez pas l'intention de mettre son trépas sur le compte de mon maître, je pense ? protesta Sanglier. Et vous

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