Le Testament Des Templiers
l’embrasser à son tour. Il tira le tissu grossier qui la recouvrait jusqu’aux chevilles et découvrit ses cuisses.
« Nous ne pouvons pas, gémit-elle.
– Nous sommes mari et femme, dit-il en haletant.
– Plus maintenant.
– Toujours.
– Vous ne pouvez pas », murmura-t-elle.
Puis elle sentit son membre raide contre sa jambe. « Comment est-ce possible ? suffoqua-t-elle. Et votre mésaventure ?
– Je vous ai dit qu’il y avait un moyen pour que nous soyons à nouveau mari et femme », dit-il, et il souleva l’habit d’Héloïse bien au-dessus de sa taille.
L’hypocrisie ambiante leur pesait.
Elle était l’épouse du Christ. Il avait fait ses vœux de moine, et ces vœux impliquaient la chasteté. Tous deux avaient une intelligence supérieure et une parfaite compréhension des conséquences religieuses, éthiques et morales de leurs actes. Pourtant, ils ne pouvaient pas revenir en arrière.
Après matines, plusieurs fois par semaine, Abélard se retirait dans son logis d’abbé, buvait une dose de son thé rouge et venait la retrouver au milieu de la nuit. Certaines fois, elle commençait par refuser. Certaines fois, elle ne disait pas un mot. Mais toutes les fois qu’il venait, elle finissait par accepter, et ils se couchaient ensemble comme mari et femme. Et chaque fois, quand ils en avaient terminé, Abélard quittait Héloïse pleine de remords et en pleurs. Et lui, de son côté, quand il était seul, il priait avec ferveur pour l’absolution de ses péchés.
Leur liaison aurait pu continuer sans la moindre ingérence. C’était un eunuque. Tout le monde le savait. Par cet effet du sort, leur relation échappait à tout soupçon ou reproche.
Pourtant, cela ne put pas durer, le Christ fut plus fort que leur désir. La culpabilité les tourmentait et menaçait leur santé mentale. Cette relation furtive les minait. Héloïse se sentait pareille à un voleur dans la nuit, et Abélard ne pouvait pas lui donner tort. Il insistait toujours pour s’en aller après l’amour, l’ayant avertie de l’humeur sombre qui s’emparait de lui et qu’il ne voulait pas lui laisser voir. Il s’enfuyait ensuite dans les bois avant d’être dominé par la fureur. Là, en attendant que le nuage se soit dissipé, il fouettait les arbres avec des branches et martelait la terre avec ses poings jusqu’à ce que la douleur le force à s’arrêter.
Perpétuellement entre péché et repentance, on aurait dit des bœufs attelés à un moulin, en train de tourner sans fin. N’aurions-nous pas de projet plus grandiose ? se demandaient-ils, une fois épuisés d’avoir fait l’amour.
Au bout d’un moment, et malgré son désir infini d’amour et d’affection, il lui ordonna de retourner à Argenteuil, ce qu’elle accepta.
Ils continuèrent à s’écrire, des dizaines de lettres, mettant leurs âmes à nu sur le parchemin. Rien n’affecta plus Abélard que cette lettre qu’il relut chaque jour de sa vie.
Vous désirez que je me consacre entièrement à mon devoir et que je sois tout à Dieu, à qui je suis dévouée. Comment puis-je faire cela, quand vous me communiquez des peurs qui m’obsèdent nuit et jour ? Quand un démon nous menace, et qu’il est impossible de l’écarter, pourquoi nous abandonner à la peur nocive qu’il nous cause, qui est encore une plus grande source de tourments que le démon lui-même ? Que puis-je espérer après vous avoir perdu ? Comment rester sur terre quand la mort m’aura pris tout ce qui m’était cher ? J’ai renoncé sans difficulté à tous les charmes de la vie, ne préservant plus que mon amour ainsi que le plaisir secret de penser constamment à vous et de savoir que vous êtes en vie. Et pourtant, hélas ! vous ne vivez pas pour moi, et je ne voudrais pas me bercer de l’espoir de vous revoir un jour. C’est le pire de mes malheurs. Le ciel exige que je renonce à ma fatale passion pour vous, mais, oh ! mon cœur ne pourra jamais y consentir. Adieu.
En son absence, Abélard se replongea dans un monde d’écriture, d’enseignement et de prières ferventes. Il attirait toujours les étudiants doués des plus belles intelligences qui venaient le voir au Paraclet.
Mais Bernard, toujours aussi vindicatif, finit également par le retrouver, ou du moins prendre connaissance de ses nouveaux écrits. Pendant plusieurs années, il avait enseigné et écrit, mais cette fois encore la théorie d’Abélard sur la Trinité le
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