Le Tombeau De Jésus
C’était un autre Jésus. C’était une autre Marie.
« Ces noms ne sont pas du tout improbables d’un point de vue statistique, conclut Kloner. Un quart des femmes de Jérusalem s’appelaient Marie. Il n’y a aucun mystère. »
Shimon n’était pas loin de partager l’opinion de Gat et de Kloner. Pourtant, il aurait aimé sortir de ce tombeau et révéler au monde que c’était celui de la famille de Jésus. Cela aurait été l’aventure la plus enthousiasmante de sa jeune carrière, et peut-être de toute sa vie. Mais la règle numéro un du milieu universitaire a toujours été la prudence.
Au soir du Vendredi saint, tout était fini. À travers le tunnel de l’antichambre, les archéologues avaient systématiquement enlevé chaque ossuaire, chaque fragment d’os et chaque mètre cube de terra rossa.
Quatre jours plus tôt, le mardi 1 er avril, des rumeurs à propos d’un tombeau à ossuaires et d’une série inhabituelle de noms bibliques – notamment ceux de Jésus et de Marie – avaient commencé à circuler. Heureusement, c’était le 1 er avril et les chrétiens de Jérusalem crurent à un canular ! Plus au sud, sur la colline centrale de Talpiot, les autorités religieuses juives ne trouvaient pas la plaisanterie à leur goût. À leurs yeux, les archéologues qui fouillaient des tombeaux juifs n’étaient rien d’autre que des pilleurs de tombes qui ne manifestaient aucun respect pour le repos de leurs ancêtres.
Comme il en fit le récit des années plus tard, Amos Kloner a été témoin de la véhémence des milieux orthodoxes à l’encontre du travail des archéologues alors qu’il découvrait, plus haut sur la colline, un deuxième tombeau, également mis au jour lors de travaux de construction.
Kloner était descendu dans ce tombeau par une petite ouverture et avait pénétré dans une vaste salle centrale, remplie de niches d’ossuaires. Cette salle différait de celle du Tombeau aux dix ossuaires en ce que ses pierres de scellement étaient toutes intactes et qu’elle n’avait jamais été envahie par des coulées de terra rossa . Derrière les pierres de scellement, il avait trouvé d’autres ossuaires – au moins sept. L’un d’eux était orné de rosettes finement sculptées, et deux autres portaient des inscriptions en caractères grecs. Mais il n’avait pas eu le temps de copier les inscriptions, ni même de prendre des photos.
« Je ne pouvais rien faire de plus, se souviendra-t-il. Je ne me rappelle plus exactement pour quelle raison, mais j’ai estimé qu’il fallait emporter l’un des petits ossuaires, celui qui était tout près de l’entrée. »
Kloner regrettera amèrement que ce petit ossuaire, contenant les os d’un enfant, ait été le seul sauvegardé. En effet, des juifs orthodoxes étaient arrivés entretemps et avaient commencé à le maudire et à lui cracher dessus. Les explications que Kloner avançait pour se justifier n’avaient fait qu’exacerber leur colère, et ils s’étaient mis à lui lancer des pierres et à le menacer de mort.
Plus de vingt ans plus tard, une autre version circulait dans le quartier de Talpiot. Les autorités religieuses, ayant appris qu’un autre tombeau avait été éventré par des bulldozers et que des archéologues se rassemblaient sur le site, avaient découvert Amos Kloner en train de disposer sur le sol du tombeau les os d’un enfant, manifestement pour pouvoir emporter plus facilement l’ossuaire. C’est cela, arguaient les dignitaires, qui avait provoqué leur colère. Paradoxalement, il est possible que cet incident du second tombeau, en détournant l’attention des autorités religieuses, ait permis aux archéologues de poursuivre leur tâche dans le Tombeau aux dix ossuaires.
C’est ainsi que le dimanche 6 avril 1980, IAA 80/500-509, le Tombeau aux dix ossuaires, ou tombeau de Talpiot, se retrouva complètement vide. Peu après, il fut scellé dans un cocon protecteur d’acier, lui-même revêtu d’une chape de béton.
Des années plus tard, Shimon Gibson dira en plaisantant que les esprits avaient dû en vouloir aux archéologues, ou tout au moins à leurs appareils photo. En effet, à part la seule photo prise par Kloner du symbole au-dessus de la porte de l’antichambre, toutes leurs épreuves étaient surexposées, au point d’être impubliables.
Les seuls clichés nets de l’intérieur du tombeau furent pris par Rivka Maoz, entre le Vendredi saint et le scellement final
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