Le Tombeau De Jésus

d’IAA 80/500-509 par Efraym Shochat. L’album de famille de Rivka montre que tous les ossuaires et toute la terra rossa ont été enlevés. La différence de teinte sur une hauteur d’un mètre indique le niveau qu’avait atteint la terra rossa le jour où Shimon était entré pour la première fois dans la salle centrale.
    Quand Rivka Maoz pénétra dans cette salle, l’ossuaire numéro IAA 80/509 avait disparu et les neuf autres étaient d’ores et déjà rangés dans l’un des dépôts que le Département des antiquités possédait en banlieue. Les trois crânes de la salle principale, les os de l’antichambre et tous ceux présents dans les ossuaires avaient été retirés et mis de côté pour qu’on puisse les étudier, avant leur éventuelle « réinhumation respectueuse » dans l’une des fosses communes réservées à cet effet.
    Un an plus tard, un vaste projet immobilier comprenant des centres commerciaux engloutit le Tombeau aux dix ossuaires. La même année, Yoseph Gat mourut brusquement. Entre-temps, Amos Kloner, Eliot Braun et Shimon Gibson s’étaient lancés dans d’autres recherches, persuadés qu’après leur départ l’entreprise de bâtiment de Shochat avait noyé le tombeau sous des tonnes de gravier, puis nivelé le terrain pour construire un immeuble.
    Seize ans plus tard, en 1996, des documentalistes de la BBC découvrirent plusieurs des ossuaires du site IAA 80/500-509 sur les étagères d’une salle du dépôt du Département des antiquités, où un étudiant ou un employé les avait conduits. L’équipe anglaise tournait un documentaire sur les coutumes funéraires juives à l’époque de Jésus.
    La fièvre qui gagna les membres de la BBC devant les inscriptions des ossuaires du tombeau de Talpiot retomba aussi vite que l’enthousiasme des archéologues seize ans plus tôt. Amos Kloner et plusieurs autres spécialistes se portèrent volontaires pour s’exprimer devant les caméras et calmer les esprits.
    — Comment se fait-il que personne n’ait entendu parler de cette histoire ? demanda le journaliste de la BBC.
    — Parce que, justement, il n’y avait vraiment rien à en dire, expliqua Kloner. Ces noms étaient très communs au I er siècle.
    Un ou deux jours plus tard, tant d’années après la découverte du tombeau, Amos Kloner rassembla finalement ses notes et celles de Yoseph Gat, et rédigea un rapport comprenant les plans de Shimon Gibson, qu’il publia dans la revue Atiqot 3 . Shimon se demande encore par quel miracle deux des trois crânes que Gat avait estimés suffisamment importants pour être relevés au centimètre carré près avaient disparu de ses croquis.
    — D’ailleurs cette femme, Mariamne, ne fait pas partie de la famille de Jésus, ajouta Kloner. Tout cela est absurde, vraiment absurde, dit-il en guise de conclusion.
    Pour l’équipe de la BBC, il était impossible de mettre en doute les conclusions d’un savant aussi renommé. Ainsi, après le reportage intitulé The Body in Question, qui consacrait seulement cinq minutes aux ossuaires du site IAA 80/500-509 sur deux heures d’émission, tout le monde oublia le Tombeau aux dix ossuaires.
    Pas tout le monde, à vrai dire.
    1 Amos Kloner et Zissu Boaz, The Necropolis of Jerusalem in the Second Temple Period, Yad Izhak Ben-Zvi, The Israël Exploration Society, 2003.
    2 À ce jour, sur les milliers d’ossuaires découverts, seuls huit autres portaient le nom latin de « Maria » en lettres hébraïques.
    3 Vol. 29,1996.

Ne trouvez-vous pas fascinant que la tradition juive des grottes funéraires, interrompue en 70 par la destruction de Jérusalem, soit devenue, pour les archéologues du futur, un système de datation plus précis que le carbone 14   ?
    De même, n’est-il pas incroyable qu’à un moment donné au début de notre ère, quatre mille ans d’histoire humaine aient déjà pu reposer sous les pieds des hommes qui entretenaient les vignobles et creusaient des tombeaux dans les collines de Jérusalem   ? Toutes ces civilisations oubliées se sont superposées sur les tertres artificiels qui parsèment le paysage de Jérusalem, chacun d’eux dissimulant des strates successives de destructions et de renaissances.
    À un moment donné, entre la mort de Jacques le Juste (vers 63-66) et la destruction de Jérusalem en 70, un tombeau fut scellé, pas très loin du mont du Temple. Les niches profondément enfouies abritaient des ossuaires, certains contenant des