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Le trésor

Le trésor

Titel: Le trésor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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président d’Aligre se rangeait du côté du procureur, quoiqu’en demandant qu’il voulût bien atténuer la sévérité de son réquisitoire. D’autres conseillers emboîtaient le pas à l’avocat général. La salle, de son côté, s’en mêlait et des disputes privées ajoutaient encore au tumulte. Finalement, craignant que cela ne se terminât en bataille rangée, le président jugea plus prudent de décréter une suspension d’audience. Au surplus, il était déjà deux heures de l’après-midi et les juges éprouvaient visiblement le désir de se restaurer. Les grandes robes rouges et noires se retirèrent majestueusement dans la salle Saint-Louis où un repas froid leur était servi.
    — Que faisons-nous ? dit Pierre-Augustin qui transpirait comme une gargoulette. Allons-nous rester dans cette étuve ? J’avoue que j’ai grande envie, moi aussi, de me mettre quelque chose sous la dent…
    — Moi aussi, mais si nous partons, retrouverons-nous nos places ?
    — Cela n’a peut-être pas tant d’importance… Le jugement est pratiquement prononcé. Il ne reste plus que le cas du cardinal.
    Son hésitation fut de courte durée. Les huissiers commençaient à faire évacuer la salle, la suite des délibérations devant se faire à huis clos. Le prétoire ne serait rouvert au public que pour le prononcé de la sentence.
    — Voilà qui classe tout, fit Beaumarchais avec un soupir de satisfaction. Ces messieurs préfèrent laver leur linge sale en famille. On ne peut guère le leur reprocher. Venez, je vous emmène vous refaire une énergie.
    — Où cela ?
    — Au nouveau « restaurant » qui vient de s’ouvrir au Palais-Royal. Cela s’appelle « Les Frères provençaux » et l’on en dit merveilles…
    Mais Gilles n’écoutait qu’à moitié. Tout en se dirigeant vers la sortie, il examinait les visages qui se pressaient autour de lui, cherchant à reconnaître Barras. Son manège n’échappa pas longtemps à Pierre-Augustin qui demanda :
    — Vous cherchez quelqu’un ?
    — Oui, un homme à qui j’ai des obligations… qui a fait beaucoup pour moi et que j’ai aperçu dans la salle. Il a l’air plutôt mal en point et je voudrais…
    — … lui venir en aide, je n’en doute pas. Qui est-ce ?
    — Un cousin de l’amiral de Barras, le vicomte…
    — Paul de Barras ? Le joueur ?
    — Vous le connaissez ?
    — Tous les tripots le connaissent et je connais tous les tripots. Attendez ! Je crois que je l’aperçois.
    Fonçant à son tour tête en avant, Beaumarchais réussit à faire sauter le bouchon de corps qui encombrait la porte et arrivé dans la grand-salle désigna Barras qui, tête basse, se dirigeait vers la sortie à pas lents. Il semblait accablé.
    — Il vaudrait mieux, dit l’écrivain, que vous ne l’abordiez pas vous-même. S’il allait vous reconnaître…
    — Cela n’a plus d’importance, mon ami. Quoi qu’il arrive au cardinal, ce qu’il m’avait remis n’a plus de prix pour Monsieur. Et puis, Barras n’est pas de ses amis.
    En trois sauts, il eut rejoint son ancien ami.
    — Monsieur ! dit-il en prenant tout de même soin de prendre l’accent américain. Puis-je vous parler un instant ?
    Le joueur tressaillit et regarda le nouveau venu avec une sorte de crainte. Il était très pâle et son visage aux traits tirés faisait pitié. Gilles comprit qu’il avait en face de lui un homme tenaillé par la peur.
    — Que voulez-vous ? dit Barras.
    — Vous remettre ceci… de la part d’un ami d’autrefois. Il a cru s’apercevoir que vous pouviez en avoir besoin.
    Et, tirant sa bourse de sa poche, il la mit dans la main du jeune homme qui la regarda un instant avec stupeur.
    — Un ami ? J’en aurais encore un ?
    — Pourquoi n’en auriez-vous plus ? En cherchant bien, on a toujours un ami quelque part… Votre présence ici n’en est-elle pas la preuve ?
    Les yeux las de Barras s’efforçèrent de scruter le visage brun cerné d’une courte barbe, cherchant les yeux dans l’ombre des épais sourcils. Dans son regard à lui, la curiosité remplaçait la crainte. Et puis il y avait la bourse, tellement rassurante, sur laquelle ses doigts maigres s’étaient refermés avec avidité.
    — Vous savez cela ? fit-il lentement. Alors vous savez aussi qu’il faut que je me cache. Toutes les portes se ferment devant les amis des condamnés… et j’ai fait, jadis, un mauvais choix.
    — Ou oubliera vite. Savez-vous où

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