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Le trésor

Le trésor

Titel: Le trésor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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protesta l’abbé. Retenez donc un peu votre langue et faites attention à ce que vous dites. Et puis cessez d’appeler le chevalier « mon garçon »…
    — Ah ! certainement pas ! s’écria Gilles. Le jour où Katell m’appellera monsieur le chevalier, je ne lui parle plus ! Allons, c’est dit : demain je vais au Leslé voir Rozenn.
    — Et vous ferez bien ! Sainte Vierge bénie ! Va-t-elle être heureuse de retrouver son nourrisson vivant et de s’en aller courir les mers avec lui…
    Et Katell s’en retourna dans son coin de cheminée où, pour marquer sa satisfaction, elle tira un ouvrage d’un panier et se mit à tricoter avec ardeur.
    Cependant, l’abbé gardait à présent le silence. Songeur, il regardait son filleul qui, après lui en avoir demandé permission, avait tiré de sa poche sa pipe en terre et la bourrait paisiblement de tabac.
    — Dis-moi, Gilles, fit-il au bout d’un moment. Tu vas emmener en Amérique Rozenn, Anna Gauthier et sa fille ?
    — Bien sûr !
    — Elles seulement ? Dois-je te rappeler que tu as une épouse et que tu dois, elle aussi, l’emmener.
    À son tour, Tournemine garda le silence. À l’évocation de Judith, son regard s’était assombri et son visage se crispait.
    — Je vous ai dit ce qu’il en est de mon mariage, monsieur. Judith prétend qu’il n’est pas valable et que, seul, ce Kernoa a droit au titre d’époux.
    — Mais tu n’en crois rien, si j’ai bien compris. Et si tu veux savoir, moi non plus je n’en crois rien. Cet homme que tu as vu avec elle n’est pas, ne peut pas être un honnête médecin vannetais.
    — Pourquoi donc ? fit Gilles avec un sourire amer, à cause de ses mœurs… bizarres ? Il a peut-être navigué et ce sont de ces habitudes que l’on prend, dit-on, sur les vaisseaux du roi aussi bien que sur les navires marchands quand on vit entassés les uns sur les autres pendant des mois de navigation.
    — C’est en effet possible mais, encore une fois, je n’en crois rien. Tout à l’heure, quand tu m’as raconté ta dernière entrevue avec Judith n’as-tu pas dit que tu avais songé à faire des recherches à Vannes pour tenter de savoir la vérité ?
    — En effet. J’y avais songé mais à présent, cela me paraît bien difficile sinon impossible. Et puis, encore une fois, pourquoi donc cet homme ne serait-il pas le vrai Kernoa ? J’ai sans doute bâti un roman parce que j’étais blessé dans mon amour-propre, déçu de voir m’échapper un cœur que je croyais toujours mien…
    M. de Talhouet se leva si brusquement que la lourde table devant laquelle il était assis en trembla et qu’une écuelle roula à terre où elle se brisa. Son visage toujours si amène était devenu tout à coup incroyablement sévère.
    — Je t’ai connu bien des défauts, Gilles Goëlo, mais tu n’as jamais été un menteur. As-tu donc, en prenant le nom des Tournemine, hérité de leurs travers, souvent monstrueux d’ailleurs ? Ou bien est-ce au service secret du roi que tu t’es transformé à ce point ?
    À son tour Gilles s’était levé, stupéfait par l’agressivité du ton.
    — Un menteur, moi ? Mais pourquoi ? Et en quoi vous ai-je menti ?
    — À moi, non ! C’est à toi que tu mens, mon garçon !
    — À moi ? Mais…
    — À toi ! Tu te racontes une histoire, une histoire commode parce qu’elle te permet de te croire libre d’une union qui peut-être te plaît moins qu’autrefois. Tu souhaites, à présent, n’est-ce pas, que ce Kernoa-là soit le bon, que ton mariage soit entaché de nullité, que…
    — Pourquoi souhaiterais-je tellement être libre ? fit le jeune homme haussant le ton à son tour.
    — Je vais te répondre par une question : comment est cette jeune Madalen dont tu m’as parlé tout à l’heure avec une émotion suspecte ? Une pauvre fille ? Un laideron ?… Allons, réponds ! Vas-tu me mentir, à moi aussi ?
    — Non… non je ne vous mentirai pas. Elle est… merveilleusement belle !
    — Nous y voilà ! Et tu penses qu’une fois au bout du monde tu pourrais peut-être en faire un jour ta femme ? Ce serait si naturel, si simple : là-bas on n’a pas de préjugés de caste, j’imagine. Et puis, du moment que Judith est mariée à un autre…
    — Vous avez trop d’imagination… Je n’ai jamais rien pensé de semblable et…
    — Consciemment, je veux bien le croire. Mais inconsciemment ?
    Cette fois, Gilles ne répondit pas et

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