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Le trésor

Le trésor

Titel: Le trésor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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les efforts financiers faits par leurs amis français. La maison Rodrigue Hortalez avait dû fermer boutique laissant son chef sur la corde raide.
    Bien installé sur sa chaise, les coudes sur la table, Beaumarchais tirait rêveusement sur son cigare, cherchant peut-être à retrouver ses rêves dorés dans le parfum des volutes bleues qui s’en échappaient. Voyant qu’il ne disait rien, Thérèse se leva.
    — Ne croyez-vous pas que vous pourriez conduire vos hôtes à leurs chambres ? Après ce qu’ils viennent de vivre ils doivent être exténués et ils ont certainement besoin d’un bon repos.
    — L’atmosphère de votre maison est telle, madame, que je ne sens plus aucune fatigue. Pongo non plus, je crois bien, ajouta-t-il en jetant un coup d’œil à l’Indien qui, droit comme un I sur sa chaise, fumait son cigare avec la même majesté réservée autrefois au calumet tribal.
    — Alors, je vais vous laisser, chevalier, dit Thérèse en offrant sa main au jeune homme. Moi, je me sens un peu lasse. Nous nous reverrons demain…
    — Oui, mais demain il ne faudra plus l’appeler « chevalier », dit Beaumarchais brusquement revenu à la réalité. Il faut, dès à présent, nous bien pénétrer de l’idée que vous êtes mort, mon pauvre ami, et qu’il faut songer à vous trouver une nouvelle personnalité. Y avez-vous déjà pensé ?
    — Un peu, oui… Le mieux ne serait-il pas que je reprenne mon ancien nom, celui que je portais avant que mon père ne me reconnaisse. Pourquoi ne pas redevenir Gilles Goëlo, le plébéien ?…
    — Ne soyez pas naïf. C’est parfaitement impossible. Outre que Monsieur, toujours si parfaitement renseigné par ses espions, n’ignore certainement rien de vos antécédents, ce n’est pas seulement de nom qu’il faut changer, c’est de peau, de qualité, de manière de vivre. Il faut que vous soyez un autre et croyez-moi, ce n’est pas si facile. Le bon théâtre est un grand art qui s’apprend. Il y faut du temps…
    — Mais je n’ai pas de temps. Outre que je ne souhaite pas vous encombrer longtemps, comprenez donc que la vie de ma femme est peut-être encore en danger, qu’il faut que je puisse…
    — … Vous lancer dès demain sur la trace de cette sale bête qu’on appelle le comte de Provence ? Je regrette, mon ami, mais c’est impossible. J’ai pour vous un billet de la main du roi qui vous enjoint de demeurer caché ici tant que je ne jugerai pas prudent de vous rendre votre liberté.
    — Pierre-Augustin a raison, plaida Thérèse. Vous ne pouvez passer pour mort tel que vous voilà. On ne peut que vous remarquer facilement. D’abord, vous êtes très beau, ajouta-t-elle avec une naïve franchise qui fit sourire les deux hommes et détendit l’atmosphère.
    — Vous êtes blond, dit Beaumarchais, mais votre peau est brune. Pourquoi ne deviendriez-vous pas espagnol ? Par exemple…
    — Encore l’Espagne ! soupira Thérèse les yeux au plafond. Nous n’en sortirons jamais… Pourquoi pas la Suisse, pour une fois ? Cela lui irait mieux.
    — Mais, bon sang, pourquoi ne veux-tu pas…
    — Nuit porter conseil, coupa soudain Pongo qui, de tout le repas, n’avait pas ouvert la bouche pour autre chose qu’engouffrer une impressionnante quantité de nourriture et surtout de café. Nuit presque finie mais si nous aller dormir nous peut-être trouver demain bonne idée !
    — Voilà qui est parler ! s’exclama Beaumarchais en s’étirant comme un gros chat. Vive l’antique sagesse indienne ! D’autant, ajouta-t-il à l’usage de Thérèse, que je vois mal l’un de vos frères suisses, qui sont grands navigateurs comme chacun sait, déambuler par les rues flanqué d’un chef iroquois. L’un ne va pas avec l’autre… Il faudra donc trouver quelque chose de plus adéquat mais, pour le moment, allons dormir.
    Il prit lui-même le flambeau pour escorter ses hôtes, après qu’ils eurent gravement salué Thérèse, jusqu’à leurs chambres situées à l’étage au-dessus.
    Arrivé devant une jolie porte peinte de sujets champêtres, il dit encore :
    — J’ai confiance dans mes serviteurs mais, pour plus de sécurité, c’est tout de même Jean-Baptiste, le Noir qui nous a aidés ce soir et qui m’est très attaché, qui assurera votre service jusqu’à ce que nous trouvions une solution. Durant quelques jours, d’ailleurs, il vaudra mieux pour vous ne quitter cet appartement que pour prendre l’air, de nuit,

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