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Le Troisième Reich, T1

Le Troisième Reich, T1

Titel: Le Troisième Reich, T1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: William Shirer
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su de tous. Le soir, à
dix-neuf heures trente, je fis une émission à la radio, une demi-heure après la
clôture du scrutin, alors qu'on avait encore très peu de résultats. Un
fonctionnaire nazi m'assura cependant, avant que je prisse la parole devant le
micro, que les Autrichiens avaient voté Ja à 99 pour 100. Ce fut
d'ailleurs le chiffre officiellement donné plus tard : 99,08 pour 100 dans la
Grande Allemagne et 99,75 pour 100 en Autriche.
    Ainsi l'Autriche, en tant que nation indépendante, quitta
momentanément la scène de l'histoire; son nom même était supprimé par le
vindicatif Autrichien qui l'avait maintenant réunie à l'Allemagne. Le mot
Oesterreich, qui servait à la désigner, disparut. L'Autriche devint Ostmark et
bientôt ce nom même fut abandonné, Berlin administrant le pays découpé en gaue (districts), qui correspondaient approximativement aux Laender historiques, tels que le Tyrol, Salzbourg, la Styrie et la Carinthie. Vienne
devint une simple cité du Reich, le centre administratif d'un district
provincial sur son déclin. L'ancien vagabond autrichien devenu dictateur avait
effacé sa terre natale de la carte et privé sa capitale, autrefois si
brillante, de sa dernière parcelle de gloire et d'importance. Il était
inévitable que la désillusion vînt pour les Autrichiens.
    Pendant les premières semaines, la conduite des nazis viennois
fut pire que tout ce que j'avais vu en Allemagne. On assista à une véritable
orgie de sadisme. Chaque jour on pouvait voir d'importants groupes de Juifs,
hommes et femmes, gratter le nom de Schuschnigg inscrit sur les trottoirs et
nettoyer les ruisseaux. Tandis qu'ils travaillaient à genoux par terre,
surveillés de près par des S.S. ricanants, la foule s'assemblait pour se moquer
d'eux. Des centaines de Juifs, hommes et femmes, étaient ramassés au hasard
dans les rues et envoyés nettoyer lés latrines publiques et les toilettes des
casernes où étaient cantonnés les S.S. et les S.A.
    On en emprisonna 10 000 autres. Leurs biens furent confisqués ou
volés. Par les fenêtres de notre appartement de la Plosslgasse, je voyais des
escouades de S.S. emportant dans des camions : argenterie, tapisseries, peintures,
tout un butin pillé dans le palais Rothschild, à côté de chez nous. Le baron
Louis de Rothschild parvint par la suite à quitter Vienne en livrant ses
aciéries aux Usines Hermann Gœring. Quand la guerre éclata, la moitié peut-être
des 180 000 Juifs de la ville étaient parvenus à acheter le droit d'émigrer, en
abandonnant aux nazis tout ce qu'ils possédaient.
    Ce commerce lucratif de la liberté humaine était géré par une
organisation spéciale, le Bureau de l'Émigration juive, placé par Heydrich
entre les mains des S.S. et seul autorisé à délivrer aux Juifs des permis pour
quitter le pays. Administré du début à la fin par un nazi autrichien du nom de
Karl Adolf Eichmann, originaire de Linz, la ville natale d'Hitler, il devait
par la suite devenir une agence, non plus d'émigration mais d'extermination, et
organiser le massacre de plus de 4 millions de personnes, juives pour la
plupart. Himmler et Heydrich profitèrent également de leur séjour en Autriche
pendant les premières semaines de l'Anschluss pour installer un immense camp de
concentration à Mauthausen, sur la rive nord du Danube, près d'Enns.
    Cela devenait trop compliqué de transporter des milliers
d'Autrichiens dans les camps de concentration d'Allemagne. Himmler décida qu'il
en fallait un, réservé à l'Autriche. Avant que le Troisième Reich ne vînt à
s'effondrer, les prisonniers non autrichiens devaient l'emporter en nombre sur
les occupants autochtones et Mauthausen battrait un triste record : ce fut le
camp de concentration allemand (les camps d'extermination de l'Est
étaient autre chose) où l'on enregistra officiellement le plus grand nombre
d'exécutions (35 318 au cours des six ans et demi de son existence).
    Malgré le régime de terreur que la Gestapo, sur l'ordre
d'Himmler et de Heydrich, fit régner après l'Anschluss, les Allemands
affluaient par centaines de mille en Autriche, où ils pouvaient s'offrir, avec
leurs marks, des repas somptueux qu'il était devenu impossible de se procurer
en Allemagne depuis des années et venaient passer des vacances à bas prix dans
les incomparables montagnes de l'Autriche, au bord de ses lacs magnifiques. Les
hommes d'affaires et les banquiers allemands arrivaient en foule et

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