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Le Troisième Reich, T1

Le Troisième Reich, T1

Titel: Le Troisième Reich, T1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: William Shirer
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conservateur et démocrate serait formé.
    Le succès de ce coup de force dépendait de deux facteurs qui
concernaient les deux principaux conspirateurs, le général Halder et le général
Beck. Le premier de ces facteurs était le choix du moment. Halder avait convenu
avec l'O.K.W. qu'il serait personnellement avisé, quarante-huit heures à
l'avance, de l'ordre d'attaque contre la Tchécoslovaquie, ce qui lui donnerait
le temps de mettre le complot à exécution avant que les troupes n'aient pu
franchir la frontière tchèque. Il serait ainsi capable non seulement d'arrêter
Hitler, mais d'empêcher la démarche fatale qui conduirait inévitablement à la
guerre.
    D'autre part, il importait que Beck parvînt à convaincre les
généraux à l'avance, et le peuple allemand par la suite (pendant l'éventuel
procès d'Hitler), qu'une attaque contre la Tchécoslovaquie provoquerait
l'intervention de la Grande-Bretagne et de la France et déclencherait ainsi une
guerre européenne pour laquelle l'Allemagne n'était pas prête et qu'elle
perdrait certainement. Cette démonstration avait fait le sujet de ses
mémorandums pendant tout l'été et sur elle reposait tout ce qu'il était
maintenant prêt à faire : renverser Hitler pour épargner à l'Allemagne un
conflit européen qui, il en était persuadé, provoquerait sa perte.
    Malheureusement pour Beck et pour l'avenir de la plus grande
partie de l'univers, ce fut Hitler et non pas le chef d'état-major récemment
démissionnaire qui se montra le plus perspicace quant à la possibilité d'une
guerre mondiale. Beck, Européen cultivé et doué du sens de l'histoire, ne
pouvait concevoir que la Grande-Bretagne et la France sacrifieraient
volontairement leur intérêt personnel en n'intervenant pas le jour où
l'Allemagne attaquerait la Tchécoslovaquie. Il avait le sens de l'histoire,
mais non celui de la politique contemporaine. Hitler, lui, le possédait. Depuis
quelque temps, il était de plus en plus convaincu que M. Chamberlain
sacrifierait les Tchèques plutôt que d'entrer en guerre et que, dans ce cas, la
France ne remplirait pas ses obligations envers Prague.
    La Wilhelmstrasse n'avait pas manqué de remarquer des dépêches
publiées dans les journaux new-yorkais où, le 14 mai, leurs correspondants à
Londres faisaient état d'un entretien « confidentiel » de M. Chamberlain, lors
d'un déjeuner chez Lady Astor. Le Premier ministre britannique, rapportaient
les journalistes, avait dit que ni la Grande-Bretagne, ni la France, ni sans
doute la Russie ne viendraient au secours de la Tchécoslovaquie en cas
d'attaque allemande, que l'État tchèque ne pouvait subsister sous sa forme
actuelle et que la Grande-Bretagne, dans l'intérêt même de la paix, approuvait
le retour à l'Allemagne du territoire des Sudètes. Interpellé sur ce sujet à la
Chambre des Communes par certains députés furieux, Chamberlain, observèrent les
Allemands, n'avait pas démenti les dépêches américaines.
    Le 1er juin, le Premier Ministre avait tenu devant les journalistes
britanniques des propos plus ou moins confidentiels et, deux jours plus tard,
le Times publiait le premier de ses articles de tête qui allaient
contribuer par la suite à saper la position tchèque; il conseillait vivement au
gouvernement tchèque d'accorder « l'auto-détermination » aux minorités du pays
« même si une telle manœuvre entraînait la sécession d'avec la Tchécoslovaquie
» et, pour la première fois, il proposait d'avoir recours à des plébiscites
pour connaître la volonté des Sudètes et des autres peuples. Quelques jours
plus tard, l'ambassade d'Allemagne à Londres informait Berlin que l'éditorial
du Times était fondé sur des propos confidentiels de Chamberlain et
qu'il reflétait ses opinions. Le 8 juin, l'ambassadeur von Dirksen apprenait à
la Wilhelmstrasse que le gouvernement Chamberlain consentirait à ce que la
région des Sudètes fût séparée de la Tchécoslovaquie, pourvu que l'opération
eût lieu à la suite d'un plébiscite et « ne fût pas troublée par des mesures de
violence de la part de l'Allemagne (24) ».
    Tout cela, Hitler dut être bien aise de l'apprendre. Les
nouvelles de Moscou n'étaient pas mauvaises non plus. A la fin de juin, le
comte Friedrich Werner von der Schulenburg, ambassadeur d'Allemagne en Russie,
avisait Berlin que l'Union Soviétique « ne marcherait vraisemblablement pas
pour défendre un État bourgeois », c'est-à-dire la

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