Le Troisième Reich, T2
contre nous. Aujourd’hui, la
Russie lutte avec un courage et un esprit de sacrifice exceptionnels pour, en
fait, la simple reconnaissance de sa dignité humaine. »
Et, terminant ce mémorandum de treize pages par une note
positive, le docteur Bräutigam réclamait un retournement
complet de la politique. « On doit donner au peuple russe des assurances concretes pour l’avenir (6). »
Mais ce n’était qu’une voix dans le désert nazi. Ainsi que nous
l’avons vu, Hitler avait déjà donné ses directives sur le sort à réserver aux
Russes et à la Russie, et il n’était pas homme à se laisser persuader par aucun
Allemand d’y changer un iota.
Le 16 juillet 1941, moins d’un mois après le début de la
campagne de Russie, quand il était déjà évident, devant les premiers succès
allemands, qu’une large portion de l’Union Soviétique allait tomber aux mains
de l’armée allemande, Hitler convoqua Gœring, Keitel, Rosenberg, Bormann et Lammers (chef de la Chancellerie du Reich) à son quartier général de Prusse-Orientale, pour leur rappeler
les objectifs qu’il poursuivait dans le territoire nouvellement conquis. Enfin,
le but qu’il avait si clairement indiqué dans Mein Kampf , – s’assurer d’un vaste Lebensraum allemand en Russie – était en vue, et il ressort clairement du
rapport confidentiel de la réunion, tel qu’il a été établi par Bormann (il
devait être produit à Nuremberg (7), qu’il voulait que ses principaux
lieutenants comprennent bien ce qu’il entendait en faire. Toutefois, il prit
soin de les informer que ses intentions ne devaient pas être « rendues
publiques ».
« Il est inutile de le faire (dit Hitler), mais l’important
est que nous sachions, nous, ce que nous voulons… Il ne faut pas que l’on
puisse deviner que c’est le début d’une organisation définitive. Ce qui ne doit
pas nous empêcher de prendre toutes les mesures nécessaires : fusillades, déplacements
de populations, etc…, et nous les prendrons. »
En principe, poursuivit Hitler :
« nous avons devant nous la tâche de découper le
gâteau selon nos besoins, ceci afin d’être en mesure de :
premièrement : le dominer
deuxièmement : l’administrer
troisièmement : l’exploiter. »
Peu lui importait, disait-il, que les Russes aient déclenché la
guérilla derrière les lignes allemandes, « cela nous permettra de
supprimer tous ceux qui s’opposent à nous ». En gros, expliquait Hitler, l’Allemagne
établira sa domination sur le territoire russe jusqu’à l’Oural. Sur ce vaste
espace, seuls les Allemands seront autorisés à porter des armes. Ensuite, Hitler
expliqua ce que deviendraient les différents morceaux du gâteau russe.
« Tout le territoire de la Baltique sera incorporé à l’Allemagne..
On évacuera de la Crimée tous les étrangers pour y installer uniquement des
Allemands (elle deviendra) un territoire du Reich… L’Allemagne s’emparera de la
péninsule de Kola, à cause de ses importantes mines de nickel. Il conviendra de
préparer avec toute la prudence nécessaire l’annexion de la Finlande, sous
forme d’État fédéré… Le Führer rasera complètement Leningrad et ensuite la
donnera aux Finlandais. »
Les champs pétroliers de Bakou, ordonna Hitler, deviendront une « Concession
allemande », et les colonies allemandes de la Volga seront aussitôt
annexées. Quand on en vint au point de savoir quels seraient les chefs nazis
chargés d’administrer le nouveau territoire, une violente querelle éclata :
« Rosenberg déclara qu’il entendait désigner le
capitaine von Petersdorff en raison de ses mérites ; consternation
générale ; protestations générales. Le Führer et le maréchal du Reich (Gœring)
affirmèrent tous deux que von Petersdorff était fou, sans l’ombre d’un doute. »
Une discussion s’éleva également au sujet des meilleurs moyens d’assurer
l’ordre dans les régions conquises. Hitler suggéra d’équiper la police
allemande de voitures blindées. Gœring doutait que cela fût nécessaire. « En
cas de révoltes », disait-il, ses avions pourraient « lancer des
bombes ».
« Bien entendu, ajoutait Gœring, il convient de
pacifier aussi vite que possible cet immense territoire. La meilleure solution
consisterait à tuer quiconque ne serait pas dans la ligne [179] . »
Gœring, en sa qualité de Chef du Plan Quadriennal, fut également
chargé de l’exploitation
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