Le Troisième Reich, T2
gouvernements
conjugueront donc leurs efforts… en vue d’atteindre ce but aussitôt que
possible.
Si cependant les efforts des deux gouvernements restaient
infructueux, la preuve serait faite que l’Angleterre et la France sont
responsables de la prolongation de la guerre…
Hitler voulait-il la paix, ou voulait-il continuer la guerre et,
avec l’aide des Soviets, rejeter la responsabilité de sa prolongation sur les
Alliés occidentaux ? Peut-être ne le savait-il pas très bien lui-même, quoiqu’il
fût assez sûr de lui.
Le 26 septembre, il eut une longue conversation avec
Dahlerus qui n’avait en aucune façon abandonné la recherche de la paix. Deux
jours avant, l’infatigable Suédois avait vu son vieil ami Ogilvie Forbes à Oslo,
où l’ancien conseiller d’ambassade à Berlin servait au même titre à la légation
britannique de la capitale norvégienne. Dahlerus rapporta à Hitler, d’après un
mémorandum confidentiel du docteur Schmidt (14), que, selon Forbes, le
gouvernement britannique recherchait la paix. La seule question était : comment
les Anglais sauveraient-ils la face ?
« Si les Britanniques veulent actuellement la paix, répondit
Hitler, ils peuvent l’avoir dans deux semaines – sans perdre la face. »
Ils devraient évidemment se résigner, dit le Führer, au fait « que
la Pologne ne peut se relever ». Bien plus, il se déclarait prêt à
garantir le statu quo « du reste de l’Europe », y compris les
garanties de « sécurité » de l’Angleterre, de la France et des
Pays-Bas. Suivit une discussion sur la manière de lancer les pourparlers de
paix. Hitler suggérait que Mussolini s’en chargeât. Dahlerus pensait que la
reine de Hollande serait plus « neutre ».
Gœring, qui était également présent, proposa que les
représentants de l’Angleterre et de l’Allemagne se rencontrent d’abord
secrètement en Hollande ; si les conversations avançaient, la reine
inviterait alors les deux pays à des pourparlers d’armistice. Hitler, qui à
plusieurs reprises se montra sceptique quant « à la volonté de paix de l’Angleterre »,
se rallia finalement à la proposition du Suédois « d’aller en Angleterre
le lendemain même pour tâter le terrain dans le sens indiqué ».
« Les Britanniques peuvent avoir la paix s’ils la veulent, dit
Hitler à Dahlerus en s’en allant, mais ils devront se hâter. »
Ceci était l’une des dispositions d’esprit du Führer. Il en révéla une autre à ses généraux. La veille, 25 septembre, le
journal d ’Halder mentionne la réception d’une « note
sur le plan du Führer d’attaquer à l’Ouest ». Le 27 septembre,
le lendemain du jour où il avait affirmé à Dahlerus qu’il était prêt à faire la
paix avec la Grande-Bretagne, Hitler convoqua à la Chancellerie les commandants
en chef de la Wehrmacht et les informa de sa décision « d’attaquer
à l’Ouest aussitôt que possible, puisque l’armée franco-britannique n’est pas
encore prête ».
Selon Brauchitsch, il fixa même la date de l’offensive : le
12 novembre (15). Sans nul doute, Hitler s’était enflammé ce jour à la
nouvelle que Varsovie avait finalement capitulé. Il pensait probablement que la
France, au moins, pouvait être mise à genoux aussi facilement que la Pologne, bien
que, deux jours plus tard, Halder notât dans son journal :
« Expliquer au Führer que technique de la campagne
polonaise pas bonne recette pour l’Ouest. Ne vaut rien contre une armée
solidement charpentée. »
Peut-être Ciano pénétra-t-il le mieux la pensée d’Hitler, lors d’une
longue conversation avec le chancelier à Berlin, le 1er octobre. Le jeune
ministre italien des Affaires étrangères, qui jusqu’alors détestait
foncièrement les Allemands mais devait sauver les apparences, trouva le Führer en veine de confidences. Tandis qu’il esquissait ses
plans, ses yeux « étincelaient de sinistre façon chaque fois qu’il parlait
de ses méthodes et moyens de combat », remarqua Ciano. Résumant ses
impressions, le visiteur italien écrivit :
Offrir aujourd’hui à son peuple une paix solide après une
grande victoire est peut-être un but qui tente encore Hitler. Mais si pour l’atteindre
il devait sacrifier, même à un infime degré, ce qui lui parait être les fruits
légitimes de sa victoire, il préférerait alors mille fois la bataille [26] (16).
Pour moi, alors que j’étais assis au Reichstag
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