Le vétéran

brèche de la palissade pour couper à travers le terrain vague. Parti de son côté, Mitch était revenu en rapportant quelque chose dans sa gueule. C'était un portefeuille. Se souvenant de l'appel à témoins lancé par le journal du vendredi, il l'avait déposé au commissariat de Dover Street.
    quand il eut terminé, l'autre se leva, le type qui s'habillait comme les gens du West End. Mr Whittaker savait qu'il représentait les deux ordures qui occupaient le banc des accusés. Dans sa jeunesse à lui on les aurait pendus tous les deux, et bon débarras. Alors c'était lui, l'ennemi. Il souriait cependant d'une manière affable.
    - Pendant l'été, c'est le meilleur moment de la journée, non ? Du calme, de la fraîcheur, personne dans les rues.
    - Oui, c'est ce qui me plaît.
    - ¿ moi aussi. A cette-heure-là, j'emmène souvent mon Jack Russell en promenade.
    H fit encore un sourire, aimable comme tout. Au fond, ce n'était pas un mauvais bougre. Même si Mitch était un lurcher, Mr Whittaker avait eu un Jack Russell à l'époque o˘ il conduisait des bus. Ce type blond ne pouvait pas être foncièrement mauvais.
    - Vous êtes donc en train de traverser le terrain vague, et Mitch s'éloigne en gambadant.
    - C'est ça.
    - Et tout d'un coup il revient vers vous, avec quelque chose dans la gueule.
    - Oui.
    - Avez-vous repéré l'endroit exact o˘ il l'a trouvé ?
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    - Non, pas précisément.
    _ ¿ dix mètres de la palissade, ça vous paraît plausible ? _ J'avais parcouru une vingtaine de mètres dans le terrain vague, et Mitch est arrivé
    par-derrière.
    - Dans ce cas, il aurait pu trouver le portefeuille à une dizaine de mètres de la clôture.
    - Oui, ça me semble possible.
    - Je vous remercie, Mr Whittaker.
    Le vieil homme était déboussolé. Un huissier lui fit signe de quitter la barre. C'était déjà fini ? On le conduisit au fond du prétoire pour le faire asseoir.
    L'analyse des empreintes fait également partie des spécialités que la police confie à des experts civils. Mr Clive Adams était l'un d'eux. Il fit un descriptif du portefeuille qu'on lui avait remis, et des trois séries d'empreintes qu'il y avait découvertes. H expliqua comment il avait éliminé
    celles de Mr Whittaker, ainsi que celles du propriétaire aujourd'hui décédé, et établi que la troisième série appartenait bel et bien à Harry Cornish. Mr Van-sittart se leva.
    - Pas de bavures ?
    - quelques-unes.
    - Comment expliquer ça, Mr Adams ?
    - Le chevauchement de plusieurs empreintes occasionne des bavures qui nous empêchent de les utiliser comme preuves. Le frottement contre une autre surface peut avoir les mêmes conséquences.
    - Contre l'intérieur d'une poche, par exemple ?
    - Oui.

    - quelles empreintes étaient le plus nettes ?
    - Celles de Mr Whittaker et de Mr Cornish.
    - Elles se trouvaient à l'extérieur du portefeuille ?
    - Oui, mais il y avait aussi deux empreintes de Mr Cornish à l'intérieur, sur les rabats.
    - Dans ce cas, celles de Mr Whittaker se sont imprimées sur le plastique quand il a pris le portefeuille entre ses doigts et sont restées intactes parce qu'il n'a pas fourré l'objet dans sa poche ?
    - C'est ce qu'il semblerait.
    - Et les empreintes de Mr Cornish se sont déposées de la 70
    même manière et sont demeurées distinctes parce que le portefeuille n'a pas frotté contre le tissu d'une poche intérieure ?
    - Apparemment.
    - Mais si un homme, en s'enfuyant des lieux d'une agression, ouvrait un portefeuille et le vidait de son contenu avant de le mettre dans la poche arrière de son jean, ses empreintes resteraient-elles nettes sur l'extérieur du portefeuille ?
    - Oui, absolument.
    - Entre la texture du jean, l'étroitesse de la poche et le mouvement de la course, est-ce que les empreintes ne seraient pas brouillées au bout de huit cents mètres environ ?
    - En effet, ça pourrait se produire.
    - Donc, si notre fuyard sortait le portefeuille de sa poche pour le jeter, en le tenant entre le pouce et l'index, il ne laisserait comme traces exploitables que celles de ces deux doigts ?
    - Oui.
    - Et si une autre personne tombait sur le portefeuille et couvrait le plastique de ses propres empreintes, n'effaceraient-elles pas les précédentes ?
    - Je suppose que si.
    - Voyez-vous, votre rapport signale la présence de quelques bavures, recouvertes par des empreintes plus récentes qu'une autre main aurait pu laisser.
    - Ce ne sont que des bavures. Les empreintes qui se trouvent au-dessous