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Le vétéran

Le vétéran

Titel: Le vétéran Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frederick Forsyth
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blessés étaient si nombreux que la cour du couvent o˘ nous nous trouvons à été
    temporairement réquisitionnée, comme asile et comme hôpital militaire, pour accueillir une centaine de nouveaux Allemands et la totalité des Alliés. Le jeune chirurgien qui venait d'arriver avait seul la charge de s'en occuper.
    On était alors le 30 juin 1944.

    - Ici ? demanda l'Américain. Il y avait un hôpital de campagne à cet endroit ?
    - Oui.
    - Mais il n'y a pas d'infrastructures. Pas d'eau, pas d'électricité. C'a d˚
    être rude.
    - En effet.
    - Moi, j'étais sur un porte-avions. On avait une unité de soins très moderne pour les blessés.
    - Vous aviez beaucoup de chance. Ici, les hommes gisaient là o˘ les brancardiers les avaient déposés. Des Américains, des Algériens, des Marocains, des Anglais, des Français, et les cent soldats allemands les plus touchés. On les avait mis là en attendant qu'ils meurent. ¿ la fin, ils étaient deux cent vingt.
    - Et le jeune chirurgien ?
    L'homme au visage flétri haussa les épaules.
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    - H s'est attelé à la t‚che, et il a fait tout ce qu'il pouvait. Le médecin général lui avait envoyé trois auxiliaires, qui ont récupéré les matelas et les paillasses des maisons environnantes, tout ce qui pouvait servir de literie. Us ont volé des draps et des couvertures dans tout le secteur. Les draps servaient à fabriquer des bandages. Aucune rivière n'arrose Sienne, mais voilà plusieurs siècles, les Siennois ont construit un réseau complexe d'aqueducs souterrains pour faire venir l'eau potable des torrents de montagne sous les rues de la ville. Un système de puits permet de tirer de l'eau. A partir du puits le moins éloigné, les auxiliaires faisaient la chaîne pour apporter des seaux jusque dans la cour.
    Úne grande table de cuisine réquisitionnée dans une maison voisine a été
    installée là-bas au milieu de la cour, entre les rosiers, en vue des opérations. Les médicaments étaient rares, les conditions d'hygiène épouvantables. Il opérait de son mieux toute la journée, jusqu'à la tombée de la nuit. quand il faisait trop sombre, il courait à l'hôpital militaire le plus proche pour réclamer des lampes à pétrole. A la lumière de ces lampes, il continuait à opérer. Mais la situation était désespérée : il savait que ces hommes allaient mourir.
    ´Beaucoup avaient reçu de terribles blessures. Les hommes étaient tous en état de choc, et il était à court de calmants. Certains soldats avaient été
    déchiquetés par l'explosion d'une mine à quelques mètres d'eux, sous les pieds d'un camarade. D'autres avaient des éclats d'obus ou de grenade enfoncés dans les chairs. D'autres encore avaient eu un membre broyé par une balle. La nuit venait de tomber quand la fille est arrivée.
    - quelle fille ?
    - Oh, juste une fille. Une Italienne du coin, je suppose. Une jeune femme d'une vingtaine d'années. …trange. Il l'a vue le dévisager. Il l'a saluée de la tête, elle lui a souri, et il a continué à opérer.
    - Pourquoi étrange ?
    - Elle était p‚le, avec un visage ovale, très serein. Et elle portait les cheveux courts, mais pas coupés à la garçonne, comme c'était la mode.
    Plutôt une coupe à la Jeanne d'Arc. Des cheveux taillés avec soin, sans rien d'aguicheur. Elle était vêtue d'une espèce de robe en coton gris p‚le.
    - Elle l'a aidé ?

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    - Non, elle s'est éloignée et elle s'est mise à marcher lentement au milieu des hommes. H l'a vue prendre un linge et le tremper dans un des seaux pour en tamponner leur front. Il continuait à opérer les blessés qu'on déposait sans interruption sur la table. Il poursuivait sa t‚che tout en sachant qu'elle ne menait à rien. Il n'avait que vingt-quatre ans ; tout juste adulte, il s'efforçait de faire un travail d'homme. ¿ bout de forces, essayant de ne pas faire d'erreur, il amputait des membres avec une scie chirurgicale stérilisée dans l'eau-de-vie, suturait les plaies avec du fil à coudre enduit de cire. Il manquait de morphine, il fallait l'économiser.
    Et ces hurlements qu'ils poussaient, ces hurlements sans fin...
    L'Américain le dévisageait avec insistance.
    - Mon Dieu, murmura-t-il. C'était vous le chirurgien. Vous n'êtes pas italien. Ce médecin allemand, c'était vous. L'homme hocha lentement la tête.
    - Oui, c'était bien moi.
    - Chéri, j'ai l'impression que ma cheville va un peu mieux. On a peut-être une chance de voir la fin du spectacle.
    -

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