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Le vétéran

Le vétéran

Titel: Le vétéran Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frederick Forsyth
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de médicaments était épuisé, mes assistants endormis contre ce mur, ma blouse, mes mains et mes joues barbouillées du sang de ces hommes, je me suis assis devant la table d'opération. Et sur cette table o˘ une famille siennoise prenait autrefois ses repas, j'ai fini par m'endormir, la tête dans les mains. Au lever du soleil, un des auxiliaires est venu me secouer.
    En fouillant dans les alentours, il était tombé sur une pleine gamelle de vrai café italien, cachée depuis le début de la guerre. C'est la meilleure tasse de café que j'aie bue de ma vie.
    - Et la fille, la jeune religieuse ?
    - Elle avait disparu.
    - Et les hommes ?
    - J'ai fait un tour rapide de la cour, en me penchant sur chacun d'eux. Ds étaient toujours en vie.
    - «a a d˚ vous faire plaisir.
    - Plus que ça. J'étais stupéfait. Mon matériel était insuffisant, les conditions trop rudimentaires, les blessures trop graves, et mes compétences bien légères.
    - «a se passait le 2 juillet, le jour de la Libération ?
    - C'est exact.
    - Le jour de la dernière offensive des Alliés ?
    - Non. Finalement, Sienne n'a pas été attaquée. Avez-vous entendu parler du maréchal Kesserling ?
    - Jamais.
    - ¿ mon avis il fait partie des chefs de guerre les plus méconnus de la Seconde Guerre mondiale. H a reçu son b‚ton de maré-166
    chai en 1940, mais à ce moment-là, n'importe quel général allemand pouvait remporter une victoire sur le front de l'Ouest. Après la défaite, la retraite devant une armée plus forte a constitué une opération autrement délicate.
    Ćertains généraux sont doués pour faire avancer une armée victorieuse, d'autres ont plus de talent pour les stratégies de retraite. Rommel appartenait à la première catégorie, Kesserling à la seconde. Il a d˚
    replier ses troupes de la Sicile vers l'Autriche. En 1944, avec le contrôle absolu des voies aériennes, des blindés plus efficaces, du carburant et des munitions en abondance et la complicité de la population, les Alliés auraient d˚ les chasser d'Italie dès le début de l'été. Mais Kesserling les a obligés à se battre pour chaque centimètre carré.
    Ćontrairement à d'autres, ce n'était pas un barbare. Très cultivé, il aimait passionnément l'Italie. ¿ Rome, Hitler lui a intimé l'ordre de faire sauter les ponts du Tibre, qui étaient, et qui sont toujours, des joyaux de l'architecture mondiale. Kesserling a refusé, favorisant ainsi la progression des Alliés.
    Će matin-là, alors que j'étais assis avec mon café, Kesserling a ordonné
    au général Schlemm de faire sortir de Sienne le 1er corps de parachutistes sans qu'un seul coup de feu soit tiré. H ne fallait causer aucun dég‚t, éviter les destructions. J'ignorais alors que le pape Pie XII avait intercédé auprès de Charles de Gaulle, dont les Forces françaises libres avaient pour mission de prendre la ville, pour que Sienne ne soit pas dévastée. Nous ne saurons jamais si un pacte secret a été scellé entre Lemelsen et Juin. Aucun ne l'a avoué, et aujourd'hui ils sont morts tous les deux. En tout cas, ils avaient reçu des consignes similaires : épargner Sienne.
    - Et il n'y a pas eu un seul coup de feu ? Pas un obus, pas une bombe ?
    - Rien du tout. Nos paras ont commencé à se retirer en fin de matinée. «a a duré toute la journée. En milieu d'après-midi, la ruelle que vous voyez là
    résonnait à n'en plus finir de bruits de bottes, et le médecin-général du 14e régiment a fait son apparition. Avant la guerre, le général de division Von Steglitz était un chirurgien orthopédiste renommé. Lui aussi opérait depuis plusieurs jours à l'hôpital principal. Il n'en pouvait plus.
    ´ H se tenait sous l'arcade et regardait autour de lui d'un air 167
    éberlué. J'avais avec moi six assistants, dont deux chargés du ravitaillement en eau. Il a regardé ma blouse tachée de sang et la table de cuisine que j'avais remise ici parce qu'on y voyait mieux. H a regardé
    aussi les membres nauséabonds qui s'entassaient dans un coin après les amputations : des mains, des bras, des jambes, dont certaines portaient encore leur botte. "quel charnier ! m'a-t-il dit. Vous êtes seul ici, capitaine ? - Oui mon général. - Combien de blessés ? - Dans les deux cent vingt, mon général. - De quelle nationalité ? - Cent vingt de nos hommes, et une centaine d'Alliés de tous les pays, mon général. - Et combien de morts ? - Aucun jusqu'ici, mon général. - Unmô-glich", a-t-il

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