Le Voleur de vent
ce qu’il voyait était chose épouvantable mais
ne pouvait se défendre d’y trouver une certaine beauté.
Le sommet de la colline était vide et l’instant
d’après… Il avait vu apparaître capuchon de moine et trois têtes de loup, puis
leurs épaules, leurs corps, les chevaux qu’ils montaient et celui du moine
était pâle. Quatre, tels les cavaliers de l’Apocalypse !… Ils se tenaient
en selle, immobiles, pareils à des statues et cette absence totale du moindre
mouvement participait à la frayeur que ressentait le curé.
Bientôt, des villageois les virent eux aussi
et l’on cessa de constituer bûcher pour le petit enfant, on cessa d’ailleurs
tout mouvement, se trouvant en semblable immobilité que les effrayants
cavaliers.
Puis, tous quatre ensemble, les cavaliers
enfoncèrent leurs éperons en les flancs de leurs montures, lesquelles avaient
le pas pesant en ce début de course car ceux qui les montaient se trouvaient
lourdement chargés d’armes.
Le curé vomit son repas du matin, le bouillon,
les œufs coque et la pomme cuite. Bien que ce ne fût pas l’instant, il sentit
sous sa langue qu’avec le repas était parti le liège bouchant une dent creuse
car si en tel cas, pour le roi et les hauts seigneurs, on utilisait l’or, les
autres avaient droit au liège et au plomb. Penser à migraine de dents lui
permettait de tenir à distance la peur que lui inspiraient ces cavaliers
descendant de la colline et arrivant droit vers le village. Et vers lui !…
À mal de dents, vaut pour remède de se tondre les cheveux et de porter au cou
dent de taupe qui endort la douleur mais le prêtre savait, quelque part en
lui-même, que ces pensées qui le devaient distraire de sa peur étaient
illusoires et n’empêcheraient point les hommes-loups et le moine fou qui les
menait de venir jusqu’à lui qui avait ordonné de brûler loup-garou.
Les cavaliers avaient atteint barricade de
tonneaux mais les chevaux sautèrent ce barrage et déjà, villageois qui tenaient
fourches les lâchaient afin de s’enfuir plus vite et se trouvaient de ce fait
percés en le dos par les courtes lances des loups-garous.
Ceux-ci tenaient en l’autre main hache à deux
lames qu’on dit « hache française », si bien qu’ils pouvaient tuer
deux hommes en même temps car le bras droit, par effet diabolique, ignorait
chez eux le bras gauche et tous deux fonctionnaient comme en l’usage de mettre
toute son attention en un seul.
La rue se peuplait de corps et sur chacun, le
moine se penchait, dague à la main, pour finir la besogne en enfonçant lame de
sa dague dans un des yeux : vengeance de borgne.
Comme toujours en leur art de la guerre, les
loups-garous ne s’affairaient que sur les hommes, dont ils vinrent bientôt à
bout, le dernier se trouvant être le forgeron auquel s’ajoutait le curé qui
avait disparu en l’intérieur de son église mais pour celui-ci, rien ne pressait
les hommes-loups car on le tenait en exception.
Le forgeron, qui avait brisé les quatre
membres de « Jaune » en la bonne humeur, eut les quatre membres non
pas rompus mais sectionnés à la hache.
— Qu’on grille cette charogne !… lança
le moine en jetant regard méprisant au tronc sanglant du forgeron et à son gros
visage bêlant de douleur.
Ainsi fut-il fait, et le tronc du forgeron
jeté vif sur les braises rouges du bûcher de « Jaune ».
Fidèles à leurs habitudes, les loups-garous
tuèrent alors les enfants, se régalant de sang chaud et chairs tendres, puis
vint le tour des femmes à l’exception des trois plus belles qui furent violées.
Le moine ne prit point part au viol mais s’amusa
fort du spectacle que donnait brunette de vingt ans, bien charpentée et d’une
stupéfiante beauté. La jeune fille – l’insensée ! – ne se faisait point
violer comme les deux autres femmes qui hurlaient car celle-ci, plus malicieuse,
donnait apparence de bon plaisir si bien que la chose ne semblait point un viol.
Le moine n’était pas dupe. Il regardait avec
mépris jeune fille révulsant ses yeux de plaisir feint tandis que le loup-garou
couché sur elle tenait en ses mains avides globes bellement arrondis des seins.
L’ambrosien remarqua la main de la jeune fille caressant tête de loup, comme si
le pelage était de soie, mais le moine voyait nettement que la main tremblait. Avait-elle
espéré sauver sa pauvre vie en faisant manière de plaisir ?… Sans doute, mais
la peine fut perdue car, une
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