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Le Voleur de vent

Le Voleur de vent

Titel: Le Voleur de vent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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le ministre soulagé de voir sa mission se
trouver en bonne réussite mais un peu déçu que Nissac ne fût point homme à tout
refuser. À cela s’ajoutait, chez le ministre, curiosité, ne sachant ce qui
faisait ainsi faiblir le vice-amiral français : diamants ?… Terres ?…
Châteaux ?…
    Nissac ne différa point davantage sa réponse, mais
comme de petites fossettes se dessinaient sur les joues creuses du Français, le
ministre, un homme très fin, envisagea qu’on allait le jouer. Ce qui se vérifia
sur l’instant en la bouche du vice-amiral :
    — Pour mon seul usage, j’aimerais
quelques-unes de vos oranges, deux ou trois de vos citrons et une mesure de
votre délicieuse huile d’olives pressées.
    L’Espagnol, pourtant tout de raideur car élevé
à la Cour de Philippe II, ne put s’empêcher de sourire, satisfait, au fond, que
Nissac fût ainsi en situation de grande élévation d’âme : pareillement, il
appréciait sa plaisante manière de céder en apparence pour ne finalement point
consentir :
    — C’est là bien peu, monsieur !… Ne
pouvons-nous davantage ?
    — Permettez à mon équipage de descendre à
terre.
    — La chose est prévue. Dans trois jours, fête
sera donnée en votre honneur qui se clôturera par course de chevaux sautant
obstacles mais étant assez médiocre cavalier, je ne sais si cet usage nouveau
vient d’Angleterre ou de terres de Barbarie. Tout votre équipage et vous-même y
êtes conviés. Néanmoins, vos hommes pourront descendre à terre dès votre retour,
car c’est là autre chose.
    Nissac remercia.
    Le ministre le mena alors en les différentes
salles du palais et le comte de Nissac, indifférent aux ors, meubles et tapis
les plus précieux, s’arrêta longuement, sans pouvoir cacher son plaisir, devant
certains tableaux si bien qu’il sembla au ministre que cet homme des flots et
des combats se trouvait être grand amateur du travail des peintres.
    Il voulut vérifier qu’il ne se trompait point :
    — Quel intérêt trouvez-vous à cela, vraiment,
monsieur l’amiral ?… Le modèle n’est point beau, la tenue des plus
austères et le décors de grande rigidité.
    Nissac lui jeta un regard désolé puis répondit :
    — La chose se discute, monsieur, mais
voyez-vous, je suis en grande fascination de la lumière. Ce peintre l’a choisie
rasante et dorée. Nous sommes en mai, le soleil se couche sur belle journée de
printemps. La lumière, monsieur !…
    Le ministre fut surpris mais n’insista pas. Poursuivant
autre manœuvre, et prétextant qu’il fallait tout voir, il mena le Français en
les souterrains. Là, une noire engeance d’inquisiteurs et de bourreaux
donnaient liberté à leur amour de la persécution des autres.
    Sans cacher son plaisir, car il cherchait à
voir Nissac faiblir, le ministre désigna pauvre homme livré à « la flûte d’infamie ».
Accusé d’être mauvais musicien, le malheureux tenait flûte de bois en ses mains
mais, les doigts se trouvant passés en des anneaux, on procédait à serrage de
ceux-ci, qui peu à peu broyaient les os.
    — Que dites-vous de cela, monsieur l’amiral ?
    — C’est fort ingénieux, monsieur : vous
avez musique par la flûte, et chanson par la voix de l’homme qui hurle de
douleur. Votre roi est économe.
    Le ministre fut dépité.
    Il montra alors « la fourche aux
hérétiques ». Petites fourches d’acier aux deux extrémités se trouvaient
insérées en collier de cuir. Lorsqu’on serrait celui-ci, fourches pénétraient
en la chair sous le menton et en la poitrine.
    — N’est-ce point étonnant, monsieur l’amiral ?
    — Et le nez ?… Et les yeux ?… Il
faut prévoir plus nombreuses fourches sur votre collier de cuir, monsieur, ou
bien se moque-t-on du monde, à la fin ?…
    Mais, démentant ces paroles, Nissac adressa
regard triste au malheureux soumis à pareil traitement.
    On lui montra alors, en les hurlements des
tourmentés, le chevalet, l’échelle, les pinces de flétrissure, la chaise d’inquisiteur
munies de pointes d’acier, l’affreux pendule, la « fille du boueur »
puis la roue.
    — N’est-elle point belle, monsieur ?
    — Quant à moi, je la trouverais plus
utile sur charrette. Et si vous y tenez, laissez-y le gueux : il distraira
les passants à chaque tour de roue !
    Déçu, le ministre lui fit voir le gril sur
lequel se trouvait jeune femme évanouie par la douleur :
    — N’est-ce point ingénieux,

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