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Lebensborn - la fabrique des enfants parfaits: Ces Français qui sont nés dans une maternité SS

Lebensborn - la fabrique des enfants parfaits: Ces Français qui sont nés dans une maternité SS

Titel: Lebensborn - la fabrique des enfants parfaits: Ces Français qui sont nés dans une maternité SS Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Boris Thiolay
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champêtre et bénéfique pour les petits « pensionnaires ». Le choix se porte ainsi sur le manoir de Bois-Larris.
    En octobre 1943, Fritze se rend en Bavière, pour s’inspirer de l’organisation de la maison-mère de Steinhöring. Le 20 novembre, de retour à Paris, il écrit à l’ Oberführer Gregor Ebner, médecin en chef du Lebensborn  : « J’ai non seulement besoin de vos conseils pour le foyer […] mais je veux également vous inviter à participer à une réunion avec la police et des médecins de la SS le 3 ou 4 décembre. […] La réunion se terminera par une soirée de détente entre camarades. » Le courrier se termine par l’inévitable « Heil Hitler ! » et est signé : « Votre très dévoué Dr Fritze ».
    Faute de temps, Ebner ne pourra honorer ce premier rendez-vous. Finalement, la maternité est inaugurée le 6 février 1944. Son nom a été modifié en Westwald  : « Forêt de l’Ouest » 2 . Vingt-trois enfants y sont nés. D’autres y ont peut-être transité. Je n’ai pu retrouver que neuf dates de naissance. La plus ancienne remonte au 11 avril 1944, mais il est évident que quelques autres accouchements ont dû s’y produire auparavant.
    1 - C’est peut-être l’importance de la vieille tradition locale d’élevage équin qui a contribué à véhiculer, pendant et après la guerre, la rumeur du « haras humain » de Bois-Larris.
     
    2 - En fait, la forêt de Chantilly, qui englobe Lamorlaye.
     

 
    II
    Erwin, en Avignon
    Le carillon de la pendule tinte dans le salon : 14 heures. Assis devant une tasse de café, cheveux blancs mi-longs, le regard bleu un peu perdu, Erwin hésite à se lancer. Il tire sur son cigarillo, le pose sur le cendrier de bronze en forme de crâne, puis le reprend. Encore une bouffée. Cette histoire, son histoire, Erwin Grinski, 67 ans, ne l’avait encore jamais racontée. À personne. Ni à son ex-femme, ni à sa fille, qui a aujourd’hui la quarantaine. Jusqu’à cet après-midi ensoleillé du mois d’avril 2009. « Le peu que je sais, je le tiens de ma mère, prévient-il, avec son accent chantant du Midi. Elle ne répondait jamais à mes questions, mais, deux ou trois fois, elle m’a lâché un détail. » Une autre volute de fumée. « Elle m’avait fait jurer de n’en parler sous aucun prétexte. D’ailleurs, quand j’étais petit, elle m’appelait “Hervé”. »
    Élisabeth Grinski est décédée en 2007. Depuis, Erwin, mécanicien diéséliste en retraite, vit seul avec son secret, dans cet appartement plutôt défraîchi de quatre pièces. Cela fait bientôt trente ans qu’il habite la cité de la Cabrière, en Avignon. Un ensemble de barres de béton sans âme, comme on en trouve dans chaque quartier dit « populaire » de France. Nous sommes à moins de deux kilomètres du centre-ville. À mille lieues du palais des Papes, de la place de l’Horloge et de ses terrasses de café. Ici, à la Cabrière, personne ne pourrait imaginer l’incroyable d’histoire d’Erwin Grinski, le monsieur du troisième étage, que l’on croise de temps à autre.
    Erwin a vu le jour le 21 mai 1944 à Lamorlaye, petite ville de 1 500 habitants dans l’Oise. Deux documents officiels seulement permettent d’en deviner les circonstances. Le premier, je l’avais consulté quinze jours avant notre rencontre. Je venais de quitter le manoir de Bois-Larris. À la mairie de Lamorlaye, la secrétaire avait tout d’abord rechigné à me laisser consulter le registre d’état civil de la commune. Devant mon insistance, elle avait fini par me confier un épais cahier relié. Pour les années 1944-1945, rien n’attirait l’attention dans la liste des naissances soigneusement consignées à l’encre bleue. Mais, quelques pages plus loin, à la date du 31 mars 1948, figurait un prénom à consonance allemande : Erwin. Suivait le nom Grinski. Dans la marge, un employé communal avait ajouté, au crayon à papier : « né en 1944 ». J’ai demandé à la secrétaire de mairie s’il était possible d’obtenir un extrait d’État-civil concernant ce petit garçon, reconnu par sa mère trois ans après la fin de la guerre. Ce n’était pas possible.
    De retour à mon bureau, je me suis mis à éplucher l’annuaire électronique, régions après régions, dans l’ordre où me venaient leurs noms. Île-de-France, Nord-Pas-de-Calais, Alsace, Basse-Normandie, Bretagne, Aquitaine, Midi-Pyrénées… Au bout d’une

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