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Lebensborn - la fabrique des enfants parfaits: Ces Français qui sont nés dans une maternité SS

Lebensborn - la fabrique des enfants parfaits: Ces Français qui sont nés dans une maternité SS

Titel: Lebensborn - la fabrique des enfants parfaits: Ces Français qui sont nés dans une maternité SS Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Boris Thiolay
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toujours.
    Je me demande pourquoi Marguerite a d’emblée cherché Werner à Munich. Avait-elle eu des informations par notre famille, à Fulda ?
    Christiane demande à un collègue de travail de lui donner un coup de main. Il se procure les annuaires téléphoniques de Munich. Christiane trouve plusieurs adresses et numéros de téléphone au nom de « Reimer ». Elle m’a montré le petit carnet d’adresses où elle avait tout noté. Il y avait même un « Werner Reimer », mais cela ne correspondait pas à notre adresse. Elle a dû être très proche du but. Il a fallu attendre presque quinze années de plus avant que nous réussissions à établir le contact. Notre père est décédé en 1994. Cela me donne la chair de poule.
    Christiane avait demandé à sa mère : « Qu’est-ce que je fais si je tombe sur lui au téléphone ?
    — Tu lui dis : je suis ta fille. »
    Christiane ne trouvait toujours pas, sa mère a fini par lui dire : « Laisse tomber. » Ce qui est sûr, c’est que Marguerite n’a jamais oublié Werner. Elle l’a espéré toute sa vie. Christiane, elle, n’a toujours pas affronté cette histoire. Elle n’arrive pas à parler de ses origines, elle ne veut pas qu’on « la prenne pour une folle ». Son compagnon, qu’elle connaît depuis les années 1980, n’a absolument aucune idée de ce qui se passe. Jusqu’à présent, Christiane a peur de lui dire la vérité.
    Elle se cache, elle a honte. Elle n’a pas de vie sociale, pas d’amies. Elle est complètement isolée. Elle est prisonnière de ces deux lettres – SS – et de l’image de l’uniforme, sur la photo.
    Un jour je lui demande : « Dis-moi, Christiane, tu es heureuse ? » Elle me répond : « Je suis contente. »
    Quand je suis venue la voir, à Strasbourg, elle m’a dit à plusieurs reprises : « Si je t’avais rencontrée plus tôt, ma vie aurait été différente. » Je lui ai répété des mots de Werner Reimer, notre père. Il me les avait martelés et il les avait même écrits. En français. En lettres capitales : «  IL N’EST JAMAIS TROP TARD POUR BIEN FAIRE . »
    Je suis sûre que cette histoire, avec toutes ces vérités qui ressurgissent, est l’occasion pour Christiane de guérir. C’est pour nous l’occasion d’intégrer enfin ces traces, si longtemps invisibles. J’ai aimé Christiane dès le premier instant. Je serai à ses côtés, je la soutiendrai quand il le faudra. Elle a une place ineffaçable dans mon cœur.
     
    J’espère que, lorsque tous les témoins de cette histoire auront disparu, quelqu’un racontera encore La ballade d’Iris et Christiane , entre Steinhöring, Düsseldorf et Strasbourg. Ce long cheminement de deux sœurs qui s’ignoraient, jusqu’à leur rencontre au jardin des Deux Rives, fait résonner, en un écho assourdi, l’autre histoire : celle de Marguerite S. et de Werner Reimer. Celle d’une jeune alsacienne de 21 ans, installée à Paris pour une raison que j’ignore, et d’un lieutenant SS de 26 ans, arrivé en conquérant dans la Ville Lumière, pour des raisons sinistres. Leur histoire, c’est celle d’une jeune femme modeste, un peu innocente, et d’un coureur de jupons, fils d’officier et membre de l’Ordre noir de Heinrich Himmler. C’est aussi celle d’une mère égarée, réfugiée en Allemagne après avoir placé sa fille dans un foyer pour enfants « parfaits » en Belgique et d’un Sturmbannführer en déroute, à la tête d’un commando de volontaires lettons, qui se rend sans gloire, un jour de mai, à des bolcheviques triomphants. C’est encore l’histoire de deux prisonniers, elle détenue durant deux mois par les Britanniques, lui pendant plus de dix ans par les Soviétiques. C’est celle de deux survivants qui se sont cherchés, mais n’ont pas su se retrouver.
    Je ne retiens qu’une seule chose de cette histoire brisée : ces deux-là se sont aimés. Christiane en est le fruit, vivant.

 
    XVII
    L’enfant et l’homme sur les photos
    Périodiquement, je prenais des nouvelles d’Erwin. Il lui arrivait également de me téléphoner : quand un souvenir lui revenait, il m’appelait. Nos conversations étaient rapidement devenues amicales. C’est un homme chaleureux, intelligent. J’apprécie la sincérité d’Erwin et son côté « prolo cultivé » : dans son appartement HLM, le mécanicien diéséliste à la retraite, qui fut aussi routier, est incollable sur l’histoire des papes en

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