Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
L'Église de Satan

L'Église de Satan

Titel: L'Église de Satan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arnaud Delalande
Vom Netzwerk:
pays ! Si les croisés attaquent Carcassonne de front, ils
savent tout de même que la place est sans doute la seule qui puisse leur tenir
tête… Attendons qu’ils nous encerclent et travaillons à les prendre à revers, au
moment où ils ne s’y attendront pas !
    Trencavel se prit la tête entre les mains.
    — Si je comprends bien, Antoine, vous
voulez encercler cinquante mille croisés, avec une poignée de paysans et de
soldats que la seule vue de l’ennemi suffira à effrayer…
    Les barons se regardèrent en silence.
    Trencavel écarta les bras.
    — C’est donc tout ce que nous avons
trouvé ?…
    Nouveau silence.
    Trencavel se dirigea furieux vers la sortie de
la salle, sans tenir compte de l’éclaireur encore agenouillé. Au dernier moment,
il s’arrêta et se tourna vers Escartille.
    — Quant à toi, Escartille de Puivert…
    Durant tout ce temps, le troubadour n’avait
plus rien écouté.
    À présent, il sentait ses jambes le quitter.
    — Messire, plaida-t-il faiblement, je… je
n’ai plus de raison d’être ici… Je dois les retrouver… Je dois… fuir…
    Il porta la main à son front.
    Dans un cliquetis de métal, Trencavel posa de
nouveau sa main gantée sur l’épaule du troubadour. Il n’eut pas le temps d’aller
plus loin. Escartille vacilla de plus belle ; il tremblait maintenant de
tous ses membres. Ses yeux chavirèrent.
    Il tomba en avant.
    — Quelqu’un pour aider cet homme ! cria
le vicomte. Allez !
    Il y eut un long trou noir.
    Lorsque, enfin, Escartille se réveilla, il
ne distingua d’abord que les murs d’une chambre blanchie à la chaux, striée de
quelques fissures qui dessinaient comme des serpents tout autour de lui. Puis
il sentit le contact de draps humides contre son corps. Son front était couvert
de sueur. Longtemps, il alterna entre des périodes de sommeil profond et de
semi-conscience. Il s’éveillait, subitement, s’entendait prononcer quelques
mots dans son délire, avant d’être de nouveau happé par l’épuisement. Une main
fraîche venait de temps en temps lui caresser le visage, lui donner à boire ou
à manger.
    Puis il se réveilla pour de bon.
    Il était effectivement dans une chambre, à l’abri
du soleil qui, au-dehors, était plus brûlant que jamais. Une jeune femme était
là, vêtue d’une robe noire. C’était la servante qu’il avait aperçue lors de la
réunion du conseil de Trencavel. Peu à peu, tout lui revint en mémoire : Louve,
le sac de Béziers, le saut de la cathédrale, la fuite éperdue dans la campagne
en direction de Carcassonne.
    Il se dressa sur son séant. On lui avait ôté
ses vêtements avant de nettoyer ses plaies.
    — Aimery ! dit-il. Où est-il ? Comment
va-t-il ?
    La jeune femme s’approcha de lui. Sa chevelure
d’or encadrait des yeux d’un bleu profond. Elle lui sourit et dit d’une voix
apaisante :
    — Ne craignez rien, messire, l’enfant va
bien. Il avait besoin de repos et d’une nourriture saine. Il a eu un peu de
fièvre, mais moins que vous. Vous avez de la chance. Mes sœurs et moi nous
occupons de lui.
    Un peu calmé, Escartille retomba contre son
oreiller. Il avait encore mal au crâne.
    Il lui fallut quelques secondes pour
rassembler ses pensées.
    — Qui êtes-vous ?
    — Je m’appelle Léonie, dit la jeune femme.
Je suis l’une des servantes du vicomte. C’est moi qui ai veillé sur vous, messire.
Pardonnez-moi de…
    Elle baissa les yeux avec une délicieuse
discrétion et rougit légèrement :
    — D’avoir dû ôter vos vêtements pour m’occuper
de vos blessures.
    Escartille se racla la gorge.
    — Ne m’appelez pas messire, je vous en
prie. Je n’ai de noble que mes chansons, et je ne chante guère ces temps-ci. Dites-moi
plutôt… combien de temps suis-je resté dans cet état ?
    — C’est que… vous avez frôlé la mort, semble-t-il.
À la vérité, vous êtes resté longtemps sans connaissance.
    — Longtemps ? C’est-à-dire ?
    Léonie hésita et détourna les yeux vers la
fenêtre, dont les vantaux étaient ouverts. Un rayon de lumière venait s’échouer
sur le lit.
    Tout à coup, Escartille eut un choc. Son
visage s’assombrit.
    Non ! Non, ne me dites pas que…
    —  Ne vous
levez pas, messire !
    Le jeune homme venait de sortir de son
lit, emportant avec lui le drap de lin. Il marcha lentement vers la fenêtre. À
mesure qu’il avançait, les rumeurs, les bruits de la ville se faisaient plus
forts, plus insistants.

Weitere Kostenlose Bücher