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L'Enfant-Roi

L'Enfant-Roi

Titel: L'Enfant-Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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déjà trois bons jours que nous étions installés au château
de Nantes quand Louis, regardant par les fenêtres, aperçut des ouvriers
mécaniques dresser à côté de son logis un échafaud, lequel comportait sur son
plateau un grand trône doré. « Qu’est cela ? dit-il. – Sire, dit
Monsieur de Souvré, c’est pour célébrer votre entrée à Nantes. – Mais, dit
Louis avec un sourire, ne suis-je pas déjà là ? – Assurément, Sire,
mais il s’agit de votre entrée solennelle. » Et en effet, ce même jour, à
cinq heures de l’après-dînée, la chaleur étant déjà moins pesante, le roi,
étant sorti de Nantes, y rentra aussitôt sur son cheval blanc, et sous son dais
fleurdelisé, par la Porte Saint-Nicolas, accompagné de rue en rue par les acclamations
du populaire qui, pour être renouvelées, n’en furent pas moins inlassables.
     
    *
    * *
     
    Mais Nantes n’était que le but et l’ultime étape de ce grand
voyage. Et plaise à ma belle lectrice de retourner avec moi en amont sur la
rivière de Loire – à tout le moins pour l’instant jusqu’à Tours –
puisqu’il s’y passa deux événements que je ne saurais passer sous silence.
    Pour aller de Blois à Tours, la régente avait fait un grand
détour par Montrichard afin de ne point passer par Amboise que le traité de
Sainte-Menehould avait abandonnée aux mains de Condé, au moins jusqu’à la tenue
des états généraux. Or, ceux qui commandaient au nom de Monsieur le Prince à
Amboise, dès qu’ils surent que le roi était à Tours avec cinq mille
gentilshommes et six mille Suisses, coururent lui remettre les clefs de la
ville. Mais la régente, toujours pusillanime, les refusa, ne voulant pas rompre
le traité, comme si un traité signé avec un félon pouvait engager la parole
royale…
    L’évêque de Poitiers eut plus de succès avec elle quand,
accouru lui aussi à Tours, il supplia la reine de venir rétablir l’ordre dans
sa ville, lequel était menacé, comme on sait, par les partisans de Condé. Sur
les instances de Monsieur de Villeroy, elle s’y décida enfin. Les Poitevins, à
son entrée, acclamèrent le roi. Et le Poitou, sans coup férir, retourna,
pacifié, dans le giron de la royauté. Ce fut là un des premiers bienfaits de ce
voyage.
    Sur le chemin de Tours à Poitiers, Louis logea à
Châtellerault où, arrivé à six heures, il n’eut de cesse qu’il n’allât voir sur
la rivière de Vienne le pont construit par son père. Il l’admira longuement et
sans mot dire, une ombre de tristesse passant sur son visage. Je ne sais si
d’avoir pensé à son père lui remit en tête « ses enfants », mais malgré
le tardif de l’heure, il décida incontinent de chercher pour eux de
« petites besognes ». Ayant appris que Châtellerault était ville
fameuse pour ses coutelleries, il se fit rouvrir l’une d’elles et acquit un
couteau pour Monsieur qui en faisait collection. Et ayant alors demandé
au coutelier ce qu’il y avait de joli en la ville qu’il pût offrir à des
filles, le coutelier le conduisit chez un compère qui taillait des petits
diamants du pays. Louis en acheta trois de même grosseur pour ses trois sœurs.
Le prix fut tel qu’il y vida sa bourse, ce que d’ordinaire il évitait de faire,
étant épargnant de ses deniers pour la raison que la reine, si donnante avec
les Conchine, se montrait avec lui si chiche-face.
    Puisque ma belle lectrice a bien voulu consentir à remonter
à la fois le temps et la rivière de Loire pour retourner de Nantes à Tours, je
lui demanderai d’être assez bonne pour rebrousser chemin encore plus en amont
et revenir en ma compagnie de Tours à Blois, la suppliant de ne voir dans ce
retour en arrière ni un caprice ni une affectation, mais un procédé nécessaire
à l’économie de mon récit, pour la raison que la scène que je lui veux
maintenant relater est de grande conséquence pour la suite de mon histoire.
    Louis, on s’en souvient, nous avait commandé de l’attendre
au château de Blois, y ayant lui-même des questions à poser à mon père. Il y
arriva le quinze juillet à six heures et comme il avait le matin même visité le
château de Chambord qu’il avait beaucoup admiré, il fut de prime quelque peu
déçu par celui de Blois, n’y trouvant à louer que l’escalier ajouré de
François I er . Toutefois, il fut fort frappé par les belles
dimensions de la salle des états généraux. Bellegarde, qui était avec nous,

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