L'énigme de l'exode

blanche éclairée par la lune risquait de trahir sa présence. Farfouillant à l’arrière, il prit un polo noir et prêta une veste à Omar. Puis il s’assura que son téléphone portable, avec lequel il avait l’intention de prendre des photos, était bien dans sa poche. Un oiseau de nuit hulula et s’envola paresseusement. Les deux hommes escaladèrent la grille, remontèrent une allée et retombèrent sur le canal d’irrigation. Knox sentit l’excitation monter en lui et fit un sourire à Omar, mais celui-ci, mal à l’aise, lui répondit par une grimace. Knox descendit sur la rive en emportant une cascade de terre et de cailloux. Il traversa le canal, qui était peu profond, et remonta sur l’autre rive à genoux, prudemment, en scrutant les lieux. Devant lui, tout était plat et monotone, ce qui ne l’aidait pas à se repérer. Lorsque Omar l’eut rejoint, il fonça tête baissée. Il avait à peine parcouru cinquante mètres qu’il trébucha sur une grosse pierre, se tordant la cheville au passage, et s’étala de tout son long. Le sol était jonché de pierres gris pâle aux contours arrondis. Certaines semblaient même faire partie de cairns, tous alignés dans la même direction. Knox aperçut une bâche en plastique translucide, qu’il tira vers lui. Au-dessous, se trouvait une fosse, au fond de laquelle étaient éparpillés les vestiges d’un ancien mur de pierre. Le clair de lune éclaira un crâne bombé, des côtes fines et recourbées, et des ossements de membres humains.
    — Des rangées de pierres blanches, murmura Knox.
    Il prit une photo mais, en l’absence du flash, il se demanda si elle serait de qualité suffisante.
    — Exactement comme au cimetière de Qumrân. Des squelettes orientés vers le sud, le visage tourné vers le soleil levant. De plus, les os sont légèrement teintés de pourpre.
    — Et alors, demanda Omar, tout essoufflé.
    — Les Esséniens buvaient du jus de garance. À partir d’une certaine dose, ce breuvage colore les os en rouge. Or, Griffin a bien parlé de la culture de la garance, non ?
    — Vous pensez que votre couvercle provient de l’une de ces tombes ?
    — C’est possible.
    — Alors on peut y aller, maintenant ?
    — Pas encore, je veux voir...
    Knox fut interrompu par un grognement féroce. Il se retourna et discerna un chien galeux, efflanqué, dont les yeux noirs et la bave abondante reflétaient la lumière argentée de la lune. Les cimetières des anciens Égyptiens se trouvaient toujours à la lisière du désert, car les terres arables étaient trop rares pour être gaspillées. Ils étaient donc hantés par les charognards. Et c’était sans doute pour cette raison qu’Anubis, le dieu chacal, avait été étroitement associé à la mort. Knox tenta d’éloigner le chien, qui gronda encore plus fort en montrant les crocs pour défendre son territoire.
    — Chassez-le d’ici ! supplia Omar.
    — J’essaie.
    Le faisceau d’une lampe torche transperça la nuit, disparut puis réapparut, plus intense et plus proche. Un garde faisait une ronde en balançant sa torche d’un côté et de l’autre. Les ellipses jaunes qui se dessinaient sur le sol se rapprochaient dangereusement de Knox et Omar. Baissant la tête, ils se tinrent derrière la bâche en plastique, et le chien s’approcha pour renifler tout en continuant à grogner. Omar montra du doigt la sortie, mais il était trop tard. Le garde était presque à leur hauteur. Knox fit signe à Omar de se baisser le plus possible et de garder son sang froid.
    Le garde entendit le chien, l’éclaira de sa torche et ramassa une pierre, qu’il lança de toutes ses forces dans sa direction. Il manqua sa cible et déclencha de furieux aboiements. Il s’approcha si près que Knox pouvait voir les taches de lumière que la lune projetait sur ses bottes noires. À sa deuxième tentative, il atteignit une patte arrière du chien, qui poussa un glapissement et s’enfuit aussitôt. Il éclata de rire, fit demi-tour et continua sa ronde.
    — Allons-nous-en ! implora Omar, lorsque le garde fut hors de vue.
    — Encore une minute, commanda Knox en s’époussetant.
    Il détestait se montrer autoritaire, mais il fallait qu’il en sache davantage. Ils arrivèrent derrière un talus et aperçurent une lumière jaune de l’autre côté. Knox le gravit en rampant et, une fois au sommet, jeta un coup d’œil discret. Griffin et un jeune homme aux cheveux blonds tondus se tenaient à côté