L'énigme de l'exode

l’hébreu carré, une forme archaïque de l’hébreu remontant au minimum à 200 avant Jésus-Christ. Trouvez-vous logique que le trésor du second Temple ait été protégé des Romains des centaines d’années avant que ceux-ci ne viennent tout piller ?
    — C’est surprenant, en effet.
    — Donc, si le trésor du rouleau de cuivre ne provenait pas du second Temple, il provenait forcément du premier. CQFD.
    Ils arrivaient sur la route du Nil, et continuèrent à rouler vers le sud. L’éclairage d’un minaret au néon jaune, rose et turquoise rompait l’obscurité comme un manège de fête foraine. Gaëlle tourna à gauche, puis à droite, sillonna les rues d’un petit village, puis déboucha entre des champs luxuriants de céréales vertes, avant de descendre une petite pente menant jusqu’au Nil, qui coulait paresseusement à proximité. L’aube colorait l’horizon de bleu, mais le soleil était encore loin de se lever au-dessus des falaises d’Amarna.
    — Ça vous va ? demanda Gaëlle.
    — Parfait ! s’écria Lily, le visage illuminé d’un sourire.
    Ils sortirent de voiture et s’étirèrent. Lily installa la caméra et régla la prise de son pendant que Stafford se pomponnait devant le miroir de son vanity-case. Gaëlle, l’esprit en ébullition, s’assit sur le capot pour profiter de la chaleur du moteur. Quelque part au loin, un muezzin entonna son appel à la prière.
    Le rouleau de cuivre. Un ancien trésor perdu. Gaëlle ne put retenir un éclat de rire. Knox allait l’adorer !

    II
    — Ça ira comme ça, déclara Griffin, après qu’ils eurent piétiné le mélange de sable, de cailloux et de terre dont ils avaient rempli le puits.
    Malgré l’aide de tous les étudiants, la nuit avait été longue et il était épuisé. Ils n’avaient plus que deux ou trois heures de sommeil devant eux, mais c’était mieux que rien.
    — Et le pasteur ? demanda Mickey. On ne l’attend pas ?
    — Il est peu probable qu’il arrive maintenant, vous ne croyez pas ? répliqua Griffin, irrité.
    Peterson ne s’expliquait jamais. Il se contentait d’aboyer des ordres à ces satanés gamins, qui s’empressaient d’obéir.
    — On reviendra plus tard, ajouta Griffin.
    — Je crois qu’on devrait tout de même...
    — Contentez-vous de faire ce que je vous dis.
    Griffin s’essuya les mains sur les fesses et marcha à grandes enjambées vers le pick-up avec toute l’autorité dont il était capable, espérant que ses étudiants allaient le suivre. Mais lorsqu’il se retourna, il les vit agenouillés en cercle, qui se tenaient par les épaules pour rendre grâce au Seigneur.
    Il éprouva une pointe d’envie qu’il connaissait bien, aussi troublante que le désir. Qu’il devait être bon de s’abandonner au groupe, de se défaire du cynisme et du doute. Mais il n’était pas de ces hommes-là. La soumission, ce n’était pas pour lui. Et la foi non plus.
    — Allez ! lança-t-il d’une voix dont il détesta la douceur. On doit y aller.
    Mais les étudiants ne lui prêtèrent pas la moindre attention. Ils prirent leur temps. L’impatience de Griffin se transforma en une émotion proche de la peur, une sensation de danger imminent. Comment en étaient-ils arrivés là ? Nathan n’avait pas dit un mot sur ce qu’étaient devenus Tawfiq et Knox, mais l’état de choc dans lequel il était arrivé ne laissait rien augurer de bon. Griffin lui avait dit de rentrer avant que les autres ne le voient, mais maintenant, il craignait qu’il ne soit tombé sur Claire à l’hôtel. Claire n’était pas comme les autres. Elle avait gardé son libre arbitre. Et si elle découvrait qu’ils avaient fait quelque chose de mal, tout risquait de s’effondrer comme un château de cartes.
    Les étudiants avaient enfin terminé. Encore galvanisés par la prière, ils se dirigèrent vers le pick-up et grimpèrent sur le plateau. Aucun d’eux ne monta avec Griffin dans la cabine. Par moments, il les haïssait. Il était tombé bien bas. Un moment de faiblesse. Ça avait suffi pour que tout bascule. Cette fille s’était assise au premier rang dans l’amphithéâtre. Elle l’avait fixé sans relâche de ses grands yeux candides. Jusqu’à ce jour, il n’avait jamais suscité d’admiration chez une jeune femme aussi séduisante. Cours après cours, il avait regardé furtivement dans sa direction et constaté qu’elle ne le quittait jamais des yeux. Et puis un jour, elle était venue dans son bureau à