Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
L'ennemi de Dieu

L'ennemi de Dieu

Titel: L'ennemi de Dieu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
Vom Netzwerk:
de
Bretagne. Pour autant que je pouvais en juger, cette conviction reposait
uniquement sur sa haine de Morgane, en qui elle voyait la plus grande
traîtresse de la Bretagne. Après tout, elle était cette prêtresse païenne qui
avait abandonné les Dieux pour se faire chrétienne, et, chaque fois qu’elle
apercevait Morgane, Nimue crachait et lançait des malédictions que Morgane lui
renvoyait avec autant de flamme : les menaces païennes contre la damnation
chrétienne. Jamais elles ne seraient aimables l’une envers l’autre.
    Un jour,
cédant aux instances pressantes de Nimue, il me fallut affronter Morgane au
sujet du Chaudron perdu. Ils étaient mariés depuis un an et j’avais beau être seigneur,
désormais, en même temps que l’un des hommes les plus riches de Dumnonie,
Morgane continuait à m’intimider. Enfant, elle avait été pour moi une figure d’autorité
à l’apparence terrifiante qui régnait sur le Tor d’une main de fer, cédant à de
brusques accès de colère et n’hésitant jamais à nous faire rentrer dans le rang
à coups de bâton. De longues années plus tard, je la trouvais tout aussi
redoutable.
    Je la
rencontrai à Ynys Wydryn, dans l’une des nouvelles bâtisses de Sansum. La plus
grande avait la dimension d’une salle de banquet royale : c’était l’école
où il formait des missionnaires par douzaines. Ces prêtres commençaient leurs
leçons à six ans ; à seize, ils étaient proclamés saints puis envoyés sur
les routes de Bretagne pour gagner des convertis. Je rencontrais souvent ces
prosélytes lors de mes déplacements. Ils allaient par deux, avec pour tout
bagage une besace et un bâton, même s’ils étaient parfois accompagnés par des
groupes de femmes qui semblaient être étrangement attirées par les
missionnaires. Ils n’avaient peur de rien. Chaque fois que je croisais leur
chemin, ils me provoquaient et me mettaient au défi de nier leur Dieu. Et à
chaque fois j’en admettais courtoisement l’existence et répondais que mes dieux
vivaient, eux aussi, sur quoi ils m’accablaient de malédictions tandis que
leurs femmes se lamentaient et me couvraient d’insultes. Un jour que deux de
ces fanatiques effrayèrent mes filles, j’usai avec eux du talon de ma lance et
je dois avouer que j’y allai un peu fort, car la dispute se conclut sur un
crâne brisé et un poignet cassé. Mais pas les miens. Arthur insista pour que je
fusse jugé pour bien montrer que même les Dumnoniens les plus puissants n’étaient
pas au-dessus de la loi. Et je comparus donc devant la cour de Lindinis, où le
magistrat chrétien me fit payer l’os brisé de la moitié de mon poids en argent.
    « On
aurait dû te fouetter ! » me lança Morgane lorsque je fus admis en sa
présence. De toute évidence, elle n’avait pas oublié l’incident. « Te
fouetter jusqu’au sang et en public !
    — Je
crois que même vous auriez du mal aujourd’hui, Dame, répondis-je d’une voix
douce.
    — Dieu me
donnerait la force nécessaire », grogna-t-elle de derrière son nouveau
masque d’or avec sa croix chrétienne. Elle s’assit à une table couverte de
parchemins et de copeaux de bois car, non contente de diriger l’école de
Sansum, c’est elle qui comptait les trésors de toutes les églises et des
monastères du nord de la Dumnonie. Sa principale fierté, c’était cependant sa
communauté de saintes femmes, qui chantaient et priaient dans leur salle où les
hommes n’avaient pas le droit de mettre les pieds. Tandis que Morgane me
toisait, je les entendais chanter de leurs douces voix. De toute évidence, ce
qu’elle vit ne lui plut guère. « Si tu es venu pour de l’argent, tu n’en
auras pas, aboya-t-elle. Pas un sou tant que vous n’aurez pas remboursé vos emprunts.
    — Il n’est
pas d’emprunts, que je sache, fis-je avec douceur.
    — Billevesées. »
Elle se saisit d’un copeau de bois et lut une liste de prêts imaginaires.
    Je la laissai
dire, puis lui répondis posément que le Conseil n’avait aucunement l’intention
d’emprunter de l’argent à l’Église. « Et s’il le faisait, ajoutai-je, je
suis sûr que votre mari vous l’aurait dit.
    — Et moi
je suis certaine que vous, les païens du Conseil, vous complotez dans le dos du
saint. » Elle renifla. « Comment va mon frère ?
    — Occupé,
Dame.
    — Trop
occupé pour venir me voir, manifestement.
    — Et
vous, trop occupée pour lui rendre visite, répondis-je

Weitere Kostenlose Bücher