Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
L'ennemi de Dieu

L'ennemi de Dieu

Titel: L'ennemi de Dieu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
Vom Netzwerk:
de mon cœur faisait plus de bruit que
mes grosses bottes sur la terre. Toujours personne en vue. L’espace d’un instant,
je me demandai si Merlin ne m’avait pas joué un mauvais tour, mais c’est alors
qu’au centre du cercle, où se dresse la pierre de la royauté du Powys, je vis
un rayon de lumière plus vif que le reflet de la lune embrumée sur les rochers
lustrés par la pluie.
    Je me
rapprochai, mon cœur battant la chamade. Je me glissai entre les pierres et
découvris que la lune se reflétait dans une coupe. Une coupe en argent. Une
petite coupe d’argent dont je vis, en m’approchant de la Pierre royale, qu’elle
était pleine d’un liquide foncé.
    « Bois,
Derfel. » Je reconnus la voix de Nimue, à peine audible avec le bruit du
vent dans les chênes. « Bois. »
    Je me
retournai, tâchant de l’apercevoir, mais en vain. Le vent souleva mon manteau
et fit claquer quelques brins de paille sur le toit de chaume de la salle. « Bois,
Derfel, bois », répéta la voix de Nimue.
    Je levai les
yeux au ciel et priai Lleullaw de me protéger. Ma main gauche, dont la
palpitation était maintenant douloureuse, tenait ferme la garde d’Hywelbane. La
prudence, je le savais, me dictait de m’en aller retrouver la chaleur de l’amitié
d’Arthur, mais la misère de mon âme m’avait conduit au sommet de cette colline
froide et désolée, et la seule pensée que la main de Lancelot reposait sur le
poignet délicat de Ceinwyn me fit baisser les yeux vers la coupe.
    Je la
soulevai, hésitai, puis la vidai.
    Le breuvage
avait un goût si amer que je frissonnai quand je l’eus fini. Le goût acre
persista dans ma bouche et dans ma gorge tandis que je reposais la coupe sur la
pierre du roi.
    « Nimue ? »
appelai-je presque suppliant. Mais il n’y eut d’autre réponse que le vent dans
les arbres.
    « Nimue ! »
appelai-je à nouveau, maintenant pris de vertiges. Les nuages bouillonnaient,
noirs et gris, et la lune se brisait en éclats de lumière argentée et
tranchante depuis la rivière lointaine pour venir cingler la ronde des arbres
obscurs. « Nimue ! » Mes genoux fléchirent, et ma tête se mit à
grouiller de rêves sinistres. Je m’affalai à côté de la Pierre royale, qui me parut
soudain aussi grosse qu’une montagne, puis je m’effondrai si lourdement que mon
bras tendu renversa la coupe vide. J’avais la nausée, mais j’étais bien
incapable de vomir. Il n’y avait que des rêves, de terribles rêves, et les cris
perçants de ces goules de cauchemar qui hurlaient dans ma tête. Je pleurais, je
suais à grosses gouttes et mes muscles se crispaient en spasmes incontrôlables.
    Des mains se
saisirent alors de ma tête et m’arrachèrent mon casque, puis un front se pressa
contre le mien. C’était un front blanc et froid, et les cauchemars se
dissipèrent pour laisser place à la vision d’un long corps blanc et nu, avec
des cuisses élancées et des petits seins. « Rêve, Derfel, me susurra Nimue
tout en me passant la main dans les cheveux, rêve, mon amour, rêve. »
    Je sanglotais
désespérément. J’étais un guerrier, un seigneur de Dumnonie. Le grand ami d’Arthur,
qui était mon débiteur depuis la bataille et qui voulait me combler de terre et
de richesse par-delà toutes mes espérances. Et je pleurais comme un petit
orphelin. Le désir de mon âme était Ceinwyn, mais Ceinwyn était éblouie par
Lancelot. Jamais plus je ne connaîtrais le bonheur, j’en étais persuadé.
    « Rêve,
mon amour, rêve », fredonna Nimue. Elle avait dû jeter un manteau noir
par-dessus nos têtes car soudain la nuit noire disparut. Je me retrouvai dans
le silence et la ténèbre, ses bras passés autour de mon cou, son visage tout
près du mien. A genoux, joue contre joue, mes mains se crispant spasmodiquement
et désespérément sur la peau fraîche de ses cuisses nues. J’abandonnai le poids
de mon corps secoué de spasmes sur ses frêles épaules, et là, entre ses bras,
les larmes cessèrent, les crispations s’atténuèrent. Soudain, je fus calme.
Finie l’envie de vomir, envolée la douleur de mes jambes. J’avais chaud. Si
chaud que je continuai à suer à grosses gouttes. Je ne bougeai pas, je n’avais
aucune envie de bouger, juste de laisser venir le rêve.
    Au départ ce
fut un rêve prodigieux, car il semblait que j’eusse reçu les ailes d’un grand
aigle et je survolais un pays que je ne connaissais pas. Je vis alors un pays
terrible brisé par de

Weitere Kostenlose Bücher