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L'enquête russe

L'enquête russe

Titel: L'enquête russe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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grande-duchesse.
    — Il n’a pas été question de la broche dérobée ?
    — Au début, non. J’ai prévenu le prince que je me retirais en lui expliquant succinctement l’événement et qu’il voulût bien m’excuser auprès du duc de Chartres qu’il devait aller saluer à l’issue de la représentation. Puis j’ai sauté dans ma voiture. C’est sur place que j’ai constaté les faits. D’abord, j’ai cru que nos gens s’étaient entretués, puis j’ai constaté le secrétaire forcé et la disparition du joyau.
    — Je vous remercie, c’est parfaitement clair.
    — Je crois que Son Altesse souhaite vous voir. Si vous voulez me suivre…
    Il fut conduit dans le salon où s’était déroulé leur premier entretien. Devant la croisée ouverte, Paul, en robe d’intérieur de coutil blanc, observait les vols rapides des hirondelles qui frôlaient la façade de l’Hôtel de Lévi.
    — Ah ! Monsieur le marquis. Connaissez-vous M. Necker ?
    — En effet. Il m’a reçu plusieurs fois dans le cadre de mon office.
    — Je déplore qu’il ne soit plus aux affaires. Ce ministre, selon moi, possédait un génie et une vertu qui semblaient devoir assurer à jamais le bonheur et la prospérité de la France. Ne le pensez-vous pas ?
    — Je n’ai point d’avis sur la question, le roi, mon maître, ayant jugé bon de lui permettre de se retirer.
    — Euh ! Voilà une curieuse façon de voir les choses. Brisons là sur ce sujet. Quoi de nouveau dans notre affaire ?
    — J’ai interrogé les principaux témoins…
    — Et ?
    — Je reste sur ma faim sur plusieurs points.
    — Puis-je vous aider, monsieur le marquis ?
    — Je n’ose en prier Votre Altesse.
    — Faites. Cela m’amuse.
    Nicolas se félicita que Bourdeau ne soit pas présent. Il aurait glosé à l’infini sur ces grands dont le mépris était tel que la mort de leurs serviteurs participait de leurs menus plaisirs. Nicolas Le Floch croyait à l’égalité des hommes. Au jour dernier, il les savait réduits à leur simple humanité. Un roi pourrissant sur son petit lit de fer ou un vieux soldat étranglé dans sa cellule du Grand Châtelet relevaientd’une seule qualité, celle d’enfants de Dieu, et nul n’était selon lui en droit de se croire d’une autre espèce que le reste du genre humain.
    — La chose est-elle si difficile à dire, demanda le grand-duc, interloqué du silence rêveur de Nicolas.
    — Votre Altesse pourrait-elle me dire si son secrétaire Dimitri jouit de toute sa confiance ?
    Le propos était si direct que le prince eut une sorte de haut-le-cœur. Sa joue gauche fut agitée de tremblements.
    — Bien audacieux, en vérité… Comment pouvez-vous même imaginer que… Enfin, croyez-vous que je puisse accorder à celui à qui je confie mes affaires une créance aveugle, je veux dire, sans d’excellentes raisons ?
    — Ce n’est point ce que je prétends. Votre Altesse m’a bien félicité de lui parler net. Souffre-t-elle encore que j’abuse de cette permission ? Que savait-elle de ce serviteur avant qu’il parût à Paris ?
    — Rien, je ne le connaissais point. Mon ignorance à son sujet est totale.
    — Pardonnez-moi, mais l’ignorance est la fondation de la crédulité et elle ouvre les portes à toutes les inconséquences.
    — Monsieur le marquis ! Si je l’ai accueilli, c’est que de bonnes raisons m’y incitaient. La parole de mes amis, et j’en ai peu sur lesquels m’appuyer, d’où la créance absolue que j’attache à leur garantie.
    — Monseigneur, pardonnez-moi d’insister. Il y a une chose que je ne comprends pas.
    — Laquelle, laquelle, laquelle ? dit Paul, ponctuant ce crescendo hurlé de coups de poing sur la vitre de la croisée au point que Nicolas craignit qu’il ne la brisât.
    — Je suis au désespoir de vous irriter. Je souhaiterais simplement comprendre pourquoi, n’ayant pas de secrétaire auparavant, il vous a plu de pourvoir à cet emploi brusquement, étant à Paris, alors que vous veniez de passer de longs mois en Europe.
    Pourpre, et de plus en plus agité, le tsarévitch parut un temps vouloir interrompre Nicolas. Celui-ci, qui en avait vu d’autres et éprouvé d’autres tempêtes, poursuivit vaillamment son propos. Il y eut un grand silence, une série de soupirs saccadés et le calme revint, sans doute résultat de l’imperturbable immobilité de son interlocuteur français. Nicolas eût été russe que sans doute la colère

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