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L'enquête russe

L'enquête russe

Titel: L'enquête russe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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épaulements de ses arcs-boutants, le contrefort de ses cintres et le soutien de ses colonnes, Nicolas Le Floch, sans pourtant le rechercher, avait bénéficié de cet appui-là.
     
    À son arrivée à l’hôtel de police, il fut désolé de constater que le vieux valet, connu de lui de toute éternité, l’avait attendu, sommeillant sur une banquette de l’antichambre. Il le remplit de confusion en lui présentant ses regrets. Puis il rejoignit sa chambre et sombra aussitôt dans un lourd endormissement agité de rêves.
    Nicolas partagea le chocolat de M. Le Noir. Ils évoquèrent l’évolution de la guerre. Les avis parvenus de Londres ne laissaient pas de représenter la nation britannique comme hors d’état de continuer la lutte et d’achever la campagne de l’année en cours. Or les choses paraissaient changer de face. La révolution opérée au sein du cabinet anglais avait pour ainsi dire régénéré les énergies. Point de paix avec la France ! Guerre à outrance aux Bourbons , tel était désormais le cri général. D’autre part, ajoutait Le Noir, notre ministre aux États-Unis, M. de La Luzerne, mettait en garde au sujet des tractations d’accommodements contraires à nos intérêts que semblait caresser le Congrès américain. Cela soulignait l’importance des informations que nous attendions de Saint-Pétersbourg sur les tentatives de médiation de la Russie.
    Nicolas informa le lieutenant général de police qu’il passerait la journée à l’Hôtel de Lévi afin de poursuivre son enquête, mais aussi pour favoriser l’apparente propension que le prince russe nourrissait à son égard. Le Noir, comme il se devaitinformé de tout, lui indiqua que la grande-duchesse devait courir les boutiques en compagnie de Mme de Benckendorff et de Mme d’Oberkirch, son amie d’enfance. Elle se rendrait à la descente du Pont-Neuf au Petit Dunkerque , où abondaient bijoux et colifichets. Elle souhaitait y acquérir ces petits moulins en or, qui étaient à la mode, comme breloques aux chaînes de montre. M. Le Noir avait ordonné qu’une garde fût disposée à la porte de la boutique pour en écarter le trop de chalands et de curieux.
    Bourdeau ne se présentant pas, le commissaire gagna la résidence russe où il fut accueilli par le prince Bariatinski dont l’humeur paraissait rassérénée.
    — Le prince m’a parlé de vous. Sachez, monsieur le marquis, que je ferai tout pour vous apporter mon aide. Il faut vous dire, Son Altesse impériale vous le confirmera, que je suis un fidèle de longue date du tsarévitch auprès duquel j’eus précédemment l’honneur de servir.
    Cette affirmation fut ponctuée d’un geste énergique.
    — Je vous le confie avec la franchise d’un soldat. Je le fus en effet au début de ma carrière.
    — Je vous sais gré, Excellence, de votre ouverture. Permettez-moi d’en profiter. Quel est votre sentiment sur Dimitri, le secrétaire de Son Altesse ?
    La main du prince tortura la fine dentelle de sa cravate. Il soupira.
    — À vrai dire, je n’en pense rien, ne disposant pas des éléments utiles pour en juger. Cependant…
    — Cependant ?
    — Son Altesse peut être si secrète que le sentiment me prend parfois qu’elle se dissimule des choses à elle-même ! L’homme est mystérieux, jeveux parler du secrétaire. Étrange même, pieux à l’excès. Comme tous les orthodoxes, il voue une dévotion aux images, aux icônes de nos saints. La chose est fréquente chez nous. Tenez, l’impératrice Élisabeth un jour se vit dérober le portrait de la Vierge entourée de diamants. Toute la police de l’empire fut mise en branle pour découvrir l’auteur de ce vol. Ah ! disait-elle, ce ne sont pas les pierres que je regrette mais la Sainte Image qu’elles entouraient et je donnerais le double de leur valeur pour la retrouver . Mais, chez lui, cette piété est dévorante et déréglée… Outre cela, Dimitri a surgi de nulle part, n’ayant jamais été annoncé. Il a présenté un pli au prince qui a valu tous les «  sésames  ». Les naturelles objections qui auraient pu s’élever se dissipèrent comme par miracle. Il devait y avoir une raison bien forte pour convaincre ainsi Son Altesse, elle d’ordinaire si méfiante…
    — Et votre majordome ?
    — La loyauté même. Il me suit depuis longtemps.
    — Quel message avez-vous reçu au Théâtre français ?
    — Qu’un crime avait été commis dans les appartements de la

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