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L'envol du faucon

L'envol du faucon

Titel: L'envol du faucon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Axel Aylwen
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exemplaire du Coran des plus exquis, tout rehaussé d'or. » Les yeux de Phaulkon brillèrent de malice. « Je viens d'apprendre qu'un troisième émissaire s'est noyé dans les rapides du Tenasserim alors qu'il tenait les
    Saintes Ecritures au-dessus de l'eau pour qu'elles ne soient pas mouillées. Ainsi en a décidé Allah. »
    Phaulkon vit la consternation envahir le visage du prêtre. « Ne craignez rien, mon Père. Je ne fais que remplir mes devoirs diplomatiques. Sa Majesté n'est pas susceptible de se tourner vers la religion maho-métane alors que ses sentiments à l'égard du christianisme sont si chaleureux et qu'une délégation si éminente du Défenseur de la Foi catholique est ici pour prêcher l'exemple ! Vous ne voulez pas vous asseoir ?
    — Votre Excellence, dit Tachard en s'asseyant sur une pile de coussins, je n'ignore pas que dans sa générosité Sa Majesté a fait don de terres et d'argent à la cause mahométane. Mais j'espère que c'est davantage dans un esprit de tolérance religieuse que par un quelconque désir d'embrasser cette foi.
    — C'est bien cela, mon Père. Et je suis sûr que la délégation française ne fera rien qui donne motif à Sa Majesté de revoir ses propres inclinations. Mais, dites-moi, comment votre ambassadeur a-t-il accueilli mes propositions ? »
    Tachard toussa nerveusement. « Eh bien, mon Seigneur, elles ont... été pour la plupart acceptées. Il n'y a qu'une seule petite question...
    — Laquelle ?
    — Le problème de l'allégeance, Votre Excellence. L'ambassadeur La Loubère pense que son mandat se limite à ce que l'armée prête allégeance au roi et à lui seul. »
    Une ombre traversa le visage de Phaulkon. « Mais, mon cher Tachard, je suis le représentant le plus important du Seigneur de la Vie. Sa Majesté ne viendra pas personnellement à Bangkok recevoir le serment d'allégeance des troupes. Ce n'est pas l'usage. Il me déléguera pour agir à sa place.
    — C'est ce que j'ai dit à M. de La Loubère, Votre Excellence. Mais il pense néanmoins qu'il outrepasserait ses pouvoirs. »
    Phaulkon observa Tachard en silence. Il vit le prêtre baisser les yeux. Il était certain que Tachard avait sincèrement défendu sa cause. S'il n'y avait vraiment pas d'autre obstacle, il ne s'en était pas mal tiré. Ses soupçons étaient sans doute justifiés : les troupes françaises n'étaient pas en état de combattre. Sinon, La Loubère n'aurait jamais reculé si facilement. Mais les choses pouvaient changer une fois que l'armée aurait récupéré ses forces. Il devait être prêt à la manipuler, à l'utiliser à son avantage, à s'assurer qu'elle servît à la fois de dissuasion contre les ambitions hollandaises et d'instrument pour ses propres desseins. En effet, avec de telles forces armées asservies à sa volonté, il n'y avait pas de limite à ce qu'il pourrait accomplir dans le golfe du Siam et au-delà. Dans le golfe du Bengale, Samuel White s'occupait de ses intérêts, et voici qu'il avait à portée de main les moyens d'être à la tête d'un empire grandissant, de devenir une éminence grise entre l'Orient et l'Occident, un puissant personnage à cheval sur deux continents, révéré par deux monarques. La clé d'un équilibre de forces.
    L'asthme du roi était une autre des raisons pour lesquelles il lui fallait les forces françaises derrière lui. Sa Majesté approchait de son cinquième cycle — elle aurait soixante ans l'année prochaine — et si elle devait être bientôt mise dans l'incapacité d'exercer ses fonctions à cause de son asthme, ou incapable de gouverner pour toute autre raison, les ennemis de Phaulkon seraient à ses trousses comme une meute de loups affamés. Il était essentiel que l'on vît l'armée française lui promettre allégeance sans réserve ainsi qu'à son monarque. Si elle se refusait ou même hésitait à lui faire ce serment, il deviendrait clair pour les factions mécontentes au sein de l'appareil d'Etat, notamment pour le général Petraja et son fils Sorasak, que l'année française tergiversait dans ses engagements. Les héritiers du roi, ses frères plus jeunes, étaient faibles et querelleurs, tout juste bons à faire des leaders fantoches. Phaulkon aurait besoin de tous les appuis possibles pour faire face à la crise qui s'ensuivrait : il ne serait pas facile de gouverner le pays sous le règne d'un successeur faible.
    Mais pourquoi les Français hésitaient-ils à lui prêter allégeance ? Etait-ce

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