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Les 186 marches

Titel: Les 186 marches Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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fut ouverte : les réserves de charbon et de savon du kapo feraient parfaitement l’affaire et pourraient équiper une cinquantaine d’hommes ; un autre groupe, aussi important, serait doté de pavés de granit arrachés à la cour. Pour dissimuler le « larcin », il suffit de déchausser les pierres pendant la corvée de déneigeage, sous le tas de neige… Personne n  ? ira voir dessous… d’ailleurs des boules de neige, bien serrées, si elles sont lancées par deux cents hommes à la fois, constituent un parfait tir de barrage contre les miradors. Savon, pavés, boules de neige doteront les trois vagues d’assaut qui suivront le groupe d’attaque formé des combattants les plus solides, équipés des « armes nobles » fournies par l’intendance de Mauthausen : deux extincteurs et huit pelles à neige. Le jet de mousse neutralisera en les aveuglant les sentinelles des deux miradors. Quant aux pelles, lancées contre les isolateurs, c’est bien le diable si elles ne provoquent pas un court-circuit dans les barbelés. Le stock de couvertures du kapo, la literie et l’ameublement de la chambrée de ses protégés seront lancés sur les barbelés. Une dizaine d’hommes, chargés de couvertures, devront franchir en premier la muraille pour préparer le passage des autres défenses.
    – Le kapo lui-même devait être supprimé. On décida de ne pas tuer les Hollandais, ses gardes du corps, mais de les ligoter et de les bâillonner. Les prisonniers yougoslaves et polonais, en apprenant ces préparatifs, furent unanimes : « Nous sommes avec vous, frères russes ! » Il fallait décider du sort des « Stubendiensts » : il y avait de tout parmi eux et on pouvait tout craindre de leur part car les préparatifs devaient être faits au vu et au su de tout le monde. Mais les « Stubendiensts » étaient des condamnés à mort comme les autres et ils savaient que les hitlériens les supprimeraient avec les autres. La révolte pouvait leur donner une chance, minime il est vrai, de sauver leur vie. On décida de les mettre au courant et de leur proposer de prendre part à l’action. Le major aviateur devait leur faire cette proposition. Michou-le-Tartare, Adam et les autres acceptèrent de se joindre au groupe. Ils se chargèrent même de liquider le « Gorille ».
    – L’action était fixée à la nuit du 28 janvier.
    – On avait pu établir que les sentinelles des miradors étaient relevées à minuit. La sortie fut alors décidée pour une heure : la garde descendante avait le temps de s’endormir et les sentinelles de garde, déjà fatiguées, seraient moins vigilantes.
    – Les préparatifs de la révolte comportaient un côté « moral ». Parmi les prisonniers, se trouvait un journaliste russe, connu sous le nom de Volodja.
    C’était un homme cultivé et fin. Il était de Leningrad où il venait de terminer les études universitaires à la faculté des lettres ; il travaillait comme journaliste dans une publication destinée à la marine marchande. Avant les hostilités, il s’était embarqué sur un bâtiment qui se retrouva dans un port allemand. Il fut alors interné dans un camp d’où il s’évada, mais il fut repris, condamné à mort et envoyé au block 20. C’est lui qui devint le « commissaire » de la révolte. Peu avant la fin de l’année, Volodja, le « commissaire », demanda au kapo l’autorisation de distraire ses compagnons en leur racontant le résumé des livres qu’il connaissait par cœur. L’autorisation obtenue, les soirées littéraires eurent lieu devant un auditoire nombreux. II choisissait toujours des thèmes héroïques, des récits d’exploits où les hommes étaient vainqueurs de toutes les difficultés. Il racontait les aventures des héros de Dumas, de Jack London, et des histoires vraies. Et un soir, avant l’évasion projetée, faisant semblant de mimer un récit littéraire, il dressa le tableau de leur future tentative d’évasion en précisant ce que chacun devait faire.
    – Tout était prêt lorsque arriva un événement imprévu. On n’a jamais su si ce fut à la suite d’une trahison ou simplement une coïncidence tragique. Dans la nuit du 25 janvier, trois jours avant la date fixée, des S. S. firent irruption dans la baraque. Vingt-cinq numéros matricules furent appelés. Vingt-cinq prisonniers sortirent de la sinistre baraque. Parmi eux se trouvaient les dirigeants de l’action : Vlasov, Isupov, Tchoubtchenkov

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