Les 4 vies de Steve Jobs

de voir les plantes géantes de cannabis qui poussent à Manali, Jobsgarde ses distances, ayant tiré un trait sur les paradis artificiels. Tous deux dégustent avec délice une baignade dans les sources chaudes de Manali au pied de splendides montagnes.
    L’idéalisme de Steve Jobsest intact. Il rencontre un jour un jeune garçon qui lui dit avoir perdu son billet d’avion de retour. Jobs lui donne son propre billet alors qu’il n’a pas les moyens d’en acheter un autre ! Il déclare à ce voyageur qu’il lui fait confiance pour envoyer un autre billet depuis les États-Unis. L’intéressé tiendra parole.
    Les préoccupations spirituelles de Jobscontrastent parfois avec des comportements plus terrestres. Il ne peut s’empêcher de marchander sauvagement les prix dès lors qu’il se retrouve dans un marché. De façon plus étonnante, il va jusqu’à déshabiller le haut d’une femme hindoue en affirmant qu’il veut faire couler son lait 18 .
    Jobset Kottkevisitent plusieurs ashrams, espérant notamment rencontrer un homme de légende du nom de Harrekan Baba. Censé avoir plus de cent ans, ce sage se serait réincarné plusieurs fois. Un jour, après une marche épuisante, ils parviennent à destination et découvrent, à proximité d’une rivière, un homme de 30 ans qui se présente comme HarrekanBaba. Étrangement, l’intéressé apparaît comme un homme très efféminé dont l’intérêt principal semble être de porter des vêtements féminins et colorés qu’il change plusieurs fois par jour.
    « Nous l’avons trouvé comique mais avant tout ridicule ! », s’amuse Kottke.
     
    Pour les deux visiteurs venus de Californie dans le but de trouver un sens à leur vie, le désenchantement est tout de même fort. L’Inde abrite une réalité rude et pénible, bien éloignée de l’univers idéalisé et contemplatif que leurs lectures ont laissé entrevoir. La richesse architecturale et culturelle cohabite bien souvent avec une misère qui les choque profondément. Elle ne correspond aucunement au mythe entrevu dans leurs lectures. À défaut de trouver l’illumination, Jobset Kottkefrôlent la mort lors d’une violente tempête.
    Lorsque Kottkese fait voler son sac de couchage vers la fin juillet, l’aventure se termine prématurément. Il y avait dissimulé tous ses traveller’s cheques et se retrouve sans le sou. Ils doivent retourner à New Delhi afin que Kottke puisse demander le remboursement de ses chèques de voyage. Hélas, la déception se poursuit : le bureau local de traveller’s cheques refuse de restituer à Kottke les dollars qui lui sont dus. Passablement perturbé par la chose, Kottke reçoit alors un soutien inespéré de la part de son ami d’infortune. Trois mois se sont écoulés et le visa de Steve Jobsest sur le point d’expirer. Kottke, pour sa part, dispose d’un billet d’avion de quatre mois et d’un visa étendu. Jobs lui donne tout l’argent qu’il lui reste, soit un peu plus de 150 dollars, afin que Kottke puisse rester en Inde jusqu’à la fin août.
    « Cela représentait un bon pécule pour cette époque, relate Kottke. C’était vraiment généreux de sa part ! »
     
    Jobsrevient en Californie en août 1974, alors que ses cheveux ont commencé à repousser. Ce long voyage en Inde a profondément modifié sa vision de la vie.
    « Nous n’avons pas trouvé d’endroit où nous pourrions passer un mois en vue d’être illuminés. C’est à cette occasion que j’ai commencé à penser que Thomas Edison avait peut-être fait davantage pour améliorer le monde que Karl Marx et Neem Karoli Babaréunis. »
    Toujours à la recherche de réponses, Jobsse met en quête de retrouver ses parents biologiques. Il séjourne brièvement dans une communauté hippie sans y trouver davantage de contentement.
    « Une fois, je m’étais endormi sous une table de la cuisine. Au milieu de la nuit, j’ai entendu plusieurs personnes venir. Ils dérobaient la nourriture des uns et des autres 19  », a raconté Jobs.
     
    Le temps des expériences est révolu. C’est dans l’univers de la technologie qu’il entend s’épanouir, au sein d’un monde qui, à défaut d’être idéal, se révèle prévisible : le business.
    Steve Jobsreprend contact avec le fondateur d’Atari, Nolan Bushnell, et ce dernier n’est que trop heureux de lui confier à nouveau son travail dans l’usine de Los Gatos. Comme précédemment, il est entendu qu’il viendra la