Les 4 vies de Steve Jobs
appelé Jazz . Il s’agit d’un programme « tout-en-un » qui rassemble un traitement de texte, un tableur et une base de données. Sa sortie est prévue pour mars 1985.
Jazz est attendu impatiemment par Apple car ce programme devrait séduire les grandes entreprises et relancer les ventes du Mac. Le logiciel 1-2-3 de Lotus est alors le numéro 1 des ventes sur PC, et c’est un favori des cadres de tous poils. Jazz reçoit donc le soutien officiel d’Apple : JohnSculleyen vante ouvertement les mérites et Steve Jobsprédit que Jazz va se retrouver sur 50 % des Macintosh.
Un autre éditeur a pourtant lancé un développement pour le Macintosh de façon plus discrète : Microsoft. Lorsqu’un émissaire de Bill Gatesvient présenter ce logiciel, baptisé Excel à Steve Jobs, il reçoit un accueil pour le moins froid :
« Vous êtes dingues les gars ! Jazz sera le logiciel du Macintosh. Vous le retrouverez sur chaque bureau là où il y aura un Mac ! »
Bill Gatesn’est pas de cet avis. Il est alors convaincu que les logiciels « tout-en-un » tels que Jazz sont voués à l’échec.
Vers la fin de l’année 1984, une réunion des forces de vente d’Apple est organisée à Hawaii et pour la première fois, une tension peut se lire dans les relations entre Steve Jobset JohnSculley. Les deux hommes jadis si proches se sont chacun placés à une extrémité de la pièce. Durant toute la séance, le climat est à l’orage. Lorsque l’un des deux fait une blague, l’autre s’abstient de rire.
Alors qu’Apple est en difficulté et a fortement besoin de soutiens externes, Steve Jobsest capable d’adopter un comportement totalement imprévisible, se montrant aisément irascible. Peu avant les fêtes de Noël, il se rend à un rendez-vous chez Epson, près de Tokyo. Hélas, sur la route, le véhicule qui doit les conduire est bloqué à cause d’une avalanche. Jobs arrive avec six heures de retard et manifeste sa fureur devant ses hôtes d’Epson. Il commence par vociférer une liste de sushis qu’il faut aller lui chercher illico. Puis, une fois que le président d’Epson a dévoilé ses nouveautés, il s’exclame : « Tout ça, c’est nul ! Vous n’avez donc rien qui tienne la route ? » Il s’en va alors, laissant ses hôtes en état de choc 50 .
La période de Noël 1984 se révèle particulièrement rude. Au lieu des 85 000 ventes prévues pour les fêtes, le Macintosh plafonne aux alentours de 20 000 unités. Une fois de plus, c’est le bon vieil Apple II qui sauve l’entreprise du désastre : il représente 70 % des ventes de la période des fêtes.
Devant l’échec du Macintosh, Apple se retrouve sur des sables mouvants, et la perspective de pertes monumentales se dessine à l’horizon.
Pour sauver ce qui peut l’être, Steve Jobsn’entrevoit qu’une solution : se débarrasser coûte que coûte de JohnSculley…
Chapitre 9
La chute de Steve
D ans la solitude de son bureau présidentiel, Sculleytente de prendre du recul par rapport à la situation d’Apple…
Emporté par ses lubies, Steve Jobsl’a mené en bateau, lui faisant miroiter une victoire tranquille, un inévitable raz-de-marée, une conquête digne d’Alexandre le Grand. Trop peu au fait de ce marché, Sculleys’est laissé impressionner par les gesticulations de Steve, ses emphases, ses affirmations n’admettant aucune réplique. Sculley l’a vu s’agiter, dégainer ses suggestions à tout propos, insister pour prendre en main le design du Macintosh et sa promotion, défendre ses convictions bec et ongles. Jobs était partout. Ne connaissant pas grand-chose au domaine de l’informatique, JohnSculley s’est contenté de le regarder faire, parfois déconcerté, souvent admiratif. Il s’est jeté dans l’euphorie qui a précédé et suivi le lancement du Macintosh.
« Steve était arrogant, outrancier, intense, exigeant et perfectionniste…
Il était aussi très immature, fragile, sensible et vulnérable.
Il était dynamique, visionnaire, charismatique mais aussi entêté, refusant tout compromis, totalement impossible à gérer 51 . »
Il a fallu plus d’un an pour que Sculleyprenne ses marques. À présent, la lune de miel est révolue. Sculley prend peu à peu son indépendance et ses distances vis-à-vis de Jobs. La perception qu’il entretient de Jobs n’est plus empreinte de la grâce initiale…
Steve Jobs et John Sculley au moment du lancement du
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