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Les amants de Brignais

Les amants de Brignais

Titel: Les amants de Brignais Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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enfants… C’est un anormal !… Différent de Perducas d’Albret, dit Bertuchin ; de Bérard d’Albret son parent et de leur ami, Pierre de Montaut, des sires de Mussidan… Voilà d’excellents frères auxquels on peut se fier ! Deux sont de Bergerac, et de noble naissance – plus haut que toi ! – l’autre était leur voisin… C’est pourquoi ils sont toujours ensemble à la bataille, à la ripaille et même à la fornication !
    – Je connais ces Albret de nom. Je savais qu’ils étaient pour l’Anglais. Je ne pensais pas, en les voyant sur ces hauteurs…
    – Qu’ils étaient tombés si bas ?
    – Tu peux rire !
    – Ils ont combattu dans la bataille de Derby et ils étaient contre toi à Poitiers… Et ailleurs !… Tiens, ce gros lard ranci de Bérard… À ce qu’il prétend, il a commandé les forces anglo-gasconnes chargées de faire lever le siège de Saint-Jean-d’Angély… Il a même, à ce qu’il ajoute, au combat de Saintes, aidé à la capture d’Arnoul d’Audrehem (272) . Il se croit sorti de la cuisse de Jupiter…
    – De Lucifer !
    – Soit… Lui et son parent ont un peu plus que nous foi en Dieu… De sorte qu’ils sont plus indulgents aux vices et défauts de nos hommes, grâce à la charité que donne une religion bien comprise, qui admet que les repentirs sont des fardeaux pénibles, les résolutions formulées mains jointes des stratagèmes fallacieux… Ils n’acceptent ni les objurgations ni les reproches… Ainsi, ils ont occis… proprement… frère Gérard de Saint-Gratien qui un jour les sermonnait pour avoir deux par deux – comprends-tu ? – satisfait une de nos otages… Ah ! La la, Tristan… Te voilà pourvu d’une femme… Tu ne seras pas si aisé, désormais, pour monter celles qu’on monte sur le Mont-Rond, qui ressemble, as-tu vu, à un téton énorme !
    Oriabel entendait-elle ? Il ne le semblait pas. Elle regardait les danseuses. Elle bâilla. Tristan fut tenté de lui parler, mais Bagerant emplit son hanap. Il était en argent niellé. Un grand seigneur jadis avait bu dedans. – Les uns prêchent l’amour… Mais l’amour est un piège.
    – Vous pourrissez la terre, les corps, les âmes ! Cesse tes parlures !
    – La pourriture est partout, jusqu’au trône ! La débauche est partout ! Nous prospérons dessus comme de belles fleurs sur le fumier…
    – Belles fleurs ?… Ces femmes qui dansent morisques et gambades 78 sont encore belles… Dans deux ou trois ans, vous les aurez flétries… Et leur vue vous sera peut-être si odieuse que vous les occirez !
    – Non… Elles ne nous serviront plus pour l’amour…
    – L’amour ! soupira Tristan, excédé.
    – Mais elles nous seront utiles pour nous porter l’eau, le matin ; pour fourbir nos armures et repriser nos chausses !
    Tristan vida son hanap d’un trait, sans pour cela quitter la main de son épouse puis, les yeux dans ceux clignotants, de Bagerant :
    – On dirait que tu veux me pousser à bout. Tu perds ton temps.
    – Je ne fais que t’éclairer, ténébreux chevalier !
    Tiercelet ne disait mot : il semblait que la vue des danseuses l’emplissait d’un indicible malaise. Parce qu’il avait aperçu l’escarcelle tachée de sang ? Pour lui, également, tous ces visages n’en formaient qu’un seul ; tous ces corps n’en faisaient qu’un seul, inexorablement féminin et fané de l’intérieur. Les filles, maintenant, tournaient et sautaient, groupées devant la mariée ; leurs faces, leurs sourires, leurs bras ondoyants se tendaient vers elle pour un hommage moqueur du vice à la vertu. Allaient-elles se dévêtir complètement ? Elles s’étreignaient deux à deux, joignaient leurs bouches, leurs seins ; pirouettaient, se pen chaient afin de se frotter les fesses, se cabraient pour en faire autant de leurs ventres, puis se donnaient la main et carolaient en riant, roucoulant, gémissant d’une façon qui produisait son effet sur les hommes : deux d’entre eux se levèrent pour que leurs compagnons vissent leur haut-de-chausses gonflé. Des rires s’élevèrent :
    – Montre-le, Hazenorgue ! Il paraît que tu l’as pas plus gros qu’une asperge.
    – Tu ne dirais pas ça, Espiote, si tu l’avais au cul !
    – Montre, Bertuchin !… Montre-le à la mariée… Vois, elle baisse la tête ! Qu’est-ce que ce sera quand elle l’aura vu !
    Sur un geste impérieux de Garcie du Châtel et de Jean Aymery, les deux

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