Les Amazones de la République
scène. Deviner le regard de celle qui voyait un futur président de la République, aux conquêtes dûment cataloguées et numérotées par les médias, briguer la main de sa fille chérie ! Toutes les demandes en mariage ont quelque chose de comique : mais émanant du prochain locataire de lâÃlysée, cette danse nuptiale avait une saveur toute particulière, convenons-en.
Que savait-elle de cet homme, sinon quâil avait déjà connu mille vies, roulé sa bosse comme peu et fait se pâmer nombre dâinnocentes, dont il avait plombé les rêves, après quâelles eurent aveuglement adhéré â c omme une huître , écrit Valéry ? Quây avait-il dans les soubassements de ce cannibale ,de ce Caudillo â ainsi était-il dépeint par « Anne » elle-même, qui saluait son énergie et ses propensions à étouffer lâautre ? Que se nichait-il derrière ce « mec » à la séduction exaspérante, qui débonde, dévore, engueule, piétine et maltraite les uns. Mais qui enivre, embrasse, protège, étreint, cajole, et tutoie sans retenue les autres ? Sâemployant à balayer les interrogations dâune mère, bien que sous le charme, Nicolas Sarkozy bonimentait avec application et sincérité : du bel ouvrage pour des oreilles non exercées.
Du grand « Sarko » ! Comment ne pas succomber au bagout dâun être capable, en quelques traits, de faire rendre gorge à sa caricature ? « Vous veillerez sur elle », semblaient supplier les mirettes de celle qui avait vu sa fille tout sacrifier pour cet homme : son couple, dâabord, quâelle avait envoyé paître. Et son métier, ensuite, quâelle avait mis sous cloche : ayant délaissé le service politique, Anne Fulda avait accepté des tâches plus ménagères dans les colonnes du Figaro . à pas comptés, Nicolas Sarkozy sâétait immiscé dans sa nouvelle vie. Il avait fait la connaissance des deux jeunes fils de la journaliste. Et dressé quelques barrières avec ceux qui se gaussaient de la solidité de cette liaison. Non pas que ces derniers doutaient de la sincérité de leur ami. Mais ils savaient que le fantôme de Cécilia rôdait alentour. Que la seule réapparition de celle-ci risquait de compromettre à jamais sa belle histoire. Hémiplégique du cÅur, Nicolas Sarkozy était étouffé par son double. Un seul claquement de doigt, un seul sifflement de son épouse, et il irait japper à ses pieds. Quâelle décide de débarquer et de mettre fin à sa quarantaine, et il replongerait : un seul mot dâelle et il irait se raccrocher à sa cimaise. Piqué de Cécilia, Nicolas nâétait pas guéri.
Et celle-ci, au loin, de sa garrigue new-yorkaise, gardait un Åil maniaque sur le toril de son époux⦠Disposant à Paris dâun réseau dâinformateurs, dâun carré de cerbères attentifs, elle savait TOUT de lâintimité de celui quâelle tenait bride courte, même à distance. Ãcartelée entre un époux implorant son retour et un amant lâenjoignant à tourner la page, Cécilia Sarkozy hésitait : New York ou Paris ? Nicolas ou Richard ? Première dame ou nouvelle vie ? Alternant le chaud et le froid avec un mari en capilotade, elle naviguait dâune rive à lâautre, sans savoir où jeter lâancre. Lors de ses nombreux retours au bercail, elle imposait à « Nicolas » de changer de numéro de portable, afin dâempêcher ses copines, ou conquêtes, dâavoir accès à sa boîte vocale, ou de lui envoyer des SMS. En rage dâépouse dupée, elle reprenait alors le contrôle de sa vie, avant de redisparaître, aussitôt. Lâacteur Christian Clavier fut ainsi le témoin, décontenancé, des atermoiements de la première â qui revient, puis repart, et revient â, et des hauts et des bas du second, son ami, auquel il prêta sa propriété de Corse, devenue un refuge.
Dâune saine naïveté, Anne Fulda nâétait pas simplement heureuse : elle était « le » bonheur. Nâécoutant que son cÅur, elle feignait dâignorer les mises en garde de celles qui
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