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Les amours du Chico

Les amours du Chico

Titel: Les amours du Chico Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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rien.
    – Moi ! dit Fausta surprise. En quoi mon témoignage
peut-il vous être utile ?
    – Vous allez le savoir, madame. Des traîtres, des fous se
sont trouvés, qui ont fait ce rêve insensé de se révolter contre
leur roi, de soulever le pays, de déchaîner la guerre civile et de
pousser sur le trône ce jeune homme précisément sur le sort duquel
vous avez la faiblesse de vous apitoyer, sire.
    – Par le sang du Christ ! cardinal, pesez bien vos
paroles ! Vous jouez votre tête, monsieur ! dit le roi
presque à voix haute.
    – Je le sais, dit froidement d’Espinosa.
    – Et vous dites ? Répétez ! grinça Philippe.
    – Je dis, gronda d’Espinosa, qu’un complot a été fomenté
contre la couronne, contre la vie peut-être du roi. Je dis que ce
complot doit éclater ici même, dans un instant. Je dis que ceci
mérite un châtiment exemplaire, terrible, dont il soit parlé
longtemps. Je dis que toutes mes dispositions sont prises pour la
répression. Et j’en appelle au témoignage de la princesse Fausta
ici présente.
    Si maîtresse d’elle-même qu’elle fût, Fausta ne put s’empêcher
de jeter autour d’elle ce regard du noyé qui cherche à quelle
branche il pourra se raccrocher.
    « D’Espinosa sait tout… songea-t-elle. Comment ? Par
qui ? Peu importe. Il se sera trouvé parmi les conjurés
quelque traître qui, pour un titre, pour un peu d’or, n’a pas
hésité à nous trahir tous. Je vais être arrêtée. Je suis perdue,
irrémédiablement. Insensée ! Je me suis jetée, tête baissée,
dans le piège que me tendait ce prêtre, car je n’en puis douter, sa
condescendance, la facilité avec laquelle il a acquiescé à mes
conditions, tout cela n’était qu’un piège pour m’inspirer confiance
et m’amener à me livrer moi-même. Que n’ai-je amené mes trois
braves Français !… Du moins ne mourrais-je pas sans
combat ! »
    Ces réflexions passèrent dans son esprit avec l’instantanéité
d’un éclair, et cependant son visage demeurait toujours calme et
souriant avec cette expression à demi étonnée qu’elle avait cru
devoir prendre. Mais Fausta n’était pas qu’une terrible jouteuse,
c’était aussi un beau joueur qui savait garder le même calme, le
même sang-froid devant la partie gagnée comme devant la partie
perdue. Et comme le roi soupçonneux se tournait vers elle, il
disait :
    – Vous avez entendu, madame ? Parlez ! Par le
ciel, parlez ! Expliquez-vous !
    Elle redressa son front orgueilleux, et regardant d’Espinosa
droit dans les yeux :
    – Tout ce que dit M. le cardinal est l’expression de
la pure vérité.
    D’une voix dure, le roi demanda :
    – Comment se fait-il que sachant cela, madame, vous n’ayez
pas cru devoir nous aviser ?
    Fausta allait pousser la bravade au point qui pouvait lui être
fatal. Déjà cette femme extraordinaire, dont le courage intrépide
s’était manifesté en mainte circonstance critique, tourmentait la
poignée de la mignonne dague qu’elle avait au côté ; déjà son
œil d’aigle avait mesuré la distance qui séparait le balcon du sol
et combiné qu’un bond adroitement calculé pouvait la soustraire au
danger d’une arrestation immédiate ; déjà elle ouvrait la
bouche pour la suprême bravade et ployait les jarrets pour le saut
médité, lorsque le grand inquisiteur, d’une voix apaisée,
déclara :
    – J’en ai appelé au témoignage de la princesse, assuré que
j’étais de l’entendre confirmer mes paroles. Mais je n’ai pas dit
que je la suspectais, ni qu’elle fût mêlée en quoi que se soit à
une entreprise folle, vouée à un échec certain (et il insista sur
ces mots). Si la princesse n’a pas parlé, c’est qu’elle ne pouvait
le faire sans forfaire à l’honneur. Au surplus elle n’ignorait
apparemment pas que je savais tout et elle a dû penser, à juste
raison, que je saurais faire mon devoir.
    La parole qui devait consommer sa perte ne jaillit pas des
lèvres de Fausta, ses jambes prêtes à bondir se détendirent
lentement, sa main cessa de tourmenter le manche de la dague, et
tandis qu’elle approuvait d’un signe de tête les paroles du grand
inquisiteur, elle pensait :
    « Pourquoi d’Espinosa me sauve-t-il ? A-t-il
simplement voulu me donner un avertissement ? Peut-être.
Est-ce confiance démesurée en sa force ou dédain pour ma
personne ? Il faut savoir. Je saurai. »
    Apaisé par la déclaration du grand inquisiteur, qu’il ne

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