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Les autels de la peur

Les autels de la peur

Titel: Les autels de la peur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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était montée au visage de Claude. Ce fut le cœur cognant contre les côtes qu’il lut, après un préambule proclamant la détermination de « faire cesser l’anarchie à l’intérieur de la France, d’arrêter les attaques portées au trône et à l’autel », les avertissements suivants : « Moi soussigné, général commandant en chef les deux armées, déclare : 1 o  Que les deux cours alliées ne se proposent d’autre but que le bonheur de la France, sans prétendre s’enrichir par des conquêtes. 2 o  Qu’elles veulent uniquement délivrer le Roi, la Reine et la Famille royale de leur captivité, et procurer à Sa Majesté très-chrétienne la sûreté nécessaire pour qu’Elle puisse sans danger ni obstacle travailler au bonheur de ses sujets. » Puis venaient de catégoriques injonctions : « Les gardes nationales sont sommées de veiller provisoirement à la tranquillité des villes et des campagnes, à la sûreté de tous les Français jusqu’à l’arrivée des troupes de Leurs Majestés impériale et royale, sous peine d’en être personnellement responsables. Ceux des gardes nationaux qui auront combattu les troupes des deux cours alliées seront punis comme rebelles à leur Roi et comme pertubateurs du repos public… Les membres des départements, districts et municipalités seront également responsables, sur leur tête et sur leurs biens, de tous les délits, incendies, assassinats, pillages, voies de fait qu’ils laisseraient commettre ou qu’ils ne se seraient pas notoirement efforcés d’empêcher. Ils seront tenus de continuer leurs fonctions jusqu’à ce que Sa Majesté très-chrétienne, remise en pleine liberté, y ait pourvu ultérieurement… Les habitants des bourgs, villes et villages, qui oseraient se défendre contre les troupes de Leurs Majestés impériale et royale seront punis sur-le-champ suivant la rigueur du droit de la guerre, et leurs maisons démolies ou brûlées. Tous ceux qui, au contraire, s’empresseront de se soumettre à leur Roi en ouvrant leurs portes aux troupes de Leurs Majestés seront à l’instant sous sauvegarde…» Enfin ceci : « La ville de Paris et tous ses habitants sans distinction sont tenus de se soumettre sur-le-champ et sans délai au Roi, de lui assurer, ainsi qu’à toutes les personnes royales, l’inviolabilité et le respect auxquels le droit de la nature et des gens oblige les sujets envers leurs souverains. Leurs Majestés impériale et royale rendent personnellement responsables, sur leur tête, pour être jugés militairement sans espoir de pardon, tous les membres de l’Assemblée nationale, du département, du district, de la municipalité et de la garde nationale de Paris, les juges de paix et tous autres qu’il appartiendra. Elles déclarent en outre, sur leur foi et parole d’empereur et roi, que si le château des Tuileries est forcé ou insulté, s’il est fait la moindre violence ou le moindre outrage à Leurs Majestés le Roi, la Reine et la famille royale, s’il n’est pas pourvu immédiatement à leur conservation et leur liberté, il en sera tiré une vengeance exemplaire et à jamais mémorable en livrant la ville de Paris à une exécution militaire et à une subversion totale…»
    Claude ne poursuivit pas, l’indignation ne le lui permit point. « C’est une effronterie ! C’est un insolent outrage ! » dit-il tout haut. Nul ne répondit. Les gens lisaient en silence puis se tiraient de là, le regard en dessous, se défiant les uns des autres, certains effrayés, la plupart dissimulant sans doute une joie secrète : on n’était guère patriote, autour des Tuileries. Claude se savait mal vu à la section, presque toute monarchiste, probablement même royaliste, et il ne s’y rendait que pour les démarches ou déclarations exigées par la loi. Tout bouillant, il alla chez Danton. Le quartier des Cordeliers ne cachait pas ses opinions, lui. Sous l’effet de la colère, on oubliait la canicule. Devant le placard affiché là aussi, on ne voyait que des visages furieux, suants. Des piques s’agitaient, les rues bourdonnaient d’interpellations, de clameurs.
    Danton n’était pas chez lui mais au café Procope, avec le gros Robert, Marat, plus jaune que jamais et semblant plutôt effrayé, Desmoulins pâle de rage. Legendre, plus emporté encore, beuglait en tapant sur la table. Danton, son visage toujours rougeaud congestionné par la chaleur, buvait de la limonade dans un

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