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Les Aveux: Nouvelle Traduction Des Confessions

Titel: Les Aveux: Nouvelle Traduction Des Confessions Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric Boyer
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lieu.
    Donc, toi, Seigneur, qui n’es jamais un autre ni autrement, le même
dans le même, le même dans le même, saint, saint, saint, Seigneur Dieu
tout-puissant, au commencement (qui est de toi), dans ta sagesse, née
de ta substance, tu as fait quelque chose mais à partir de rien. Oui, tu
as fait le ciel et la terre mais non à partir de toi. Il y aurait sinon quelque
chose d’égal à ton unique engendré et donc aussi à toi. Et ce serait absolument injuste qu’il y ait quelque chose d’égal à toi qui ne soit pas de
toi. Et il n’y avait rien d’autre à part toi d’où tu aies pu les faire, Dieu,
trinité une et unité trine.
    C’est donc à partir de rien que tu as fait le ciel et la terre. Une grande
chose et une petite chose. Parce que tu es tout-puissant et bon, tu es
capable de faire toutes choses bonnes – le grand ciel et la petite terre.
Toi tu étais, le reste c’était le rien d’où tu as fait le ciel et la terre, deux
choses distinctes, l’une proche de toi, l’autre proche du rien. Tu étais
au-dessus de l’une, et au-dessous de l’autre c’était le rien.
    8.
    Mais ce ciel de ciel t’appartient, Seigneur. Et la terre que tu as donnée aux fils de l’humain à voir et à toucher ne ressemblait pas à celle
que nous voyons et touchons aujourd’hui. Elle était invisible et inorganisée. Un abîme sur lequel il n’y avait pas de lumière. Noir au-dessus de
l’abîme. Pire encore que dans un abîme. Oui, les abysses marins que
nous voyons aujourd’hui ont jusque dans leurs profondeurs leur
lumière propre, perceptible d’une certaine façon aux poissons et à la vie
qui rampe dans leurs fonds. Mais tout, en ce temps-là, était proche de
rien puisque tout était encore absolument informe. Tout en étant pourtant capable de recevoir une forme.
    Oui, toi Seigneur, d’une matière informe tu as fait le monde. Tu as
fait de rien presque rien. Avec ce rien, tu as fait de grandes choses que
nous, les fils de l’humain, nous admirons. Admirable le corps du ciel.
Voûte entre l’eau et l’eau, dès le deuxième jour après la création de la
lumière, quand tu as dit : voûte.
    Et c’était fait.
    Cette voûte tu l’as appelée ciel. Ciel de cette terre et de cette mer que
tu as faites le troisième jour en donnant une forme visible à la matière
informe que tu as faite avant l’existence d’un jour. Mais tu avais déjà fait
un ciel avant l’existence d’un jour, ce ciel de ciel. Parce qu’au commencement, tu as fait le ciel et la terre.
    La terre que tu as faite était elle-même matière informe. Invisible et
inorganisée. Noir au-dessus de l’abîme. Et de cette terre invisible et
inorganisée, de cette absence de forme, de ce presque rien, tu ferais
toutes ces choses qui constituent sans le constituer ce monde inconstantet dans lequel apparaît l’inconstance même qui rend possible la perception et la mesure du temps, puisque l’inconstance des choses fait le
temps pendant que se succèdent les diverses apparences faites de la
matière de cette terre invisible.
    9.
    Pour cette raison, l’esprit, guide de ton serviteur, quand il a rappelé
que tu as fait au commencement le ciel et la terre, n’a rien dit du temps
et n’a pas parlé des jours.
    Oui, tu as fait au commencement le ciel de ciel, une créature intellectuelle mais qui sans partager du tout ton éternité, à toi trinité, participe
néanmoins à ton éternité. En refrénant sa propre inconstance sous la
douceur heureuse de ta contemplation, et en collant à toi sans faille
depuis qu’il a été fait, il échappe au cours et à la succession des temps.
    Et cette absence de forme, terre invisible et inorganisée, n’a pas non
plus connu le décompte des jours. Où il n’y a aucune apparence, aucun
ordre, rien ne vient, rien ne passe. Où il n’y a rien de tout ça, il n’y a ni
jours qui passent ni durée temporelle.
    10.
    Vérité. Lumière de mon cœur. Ne laisse pas ma part obscure me parler. Je me suis dispersé là-bas. Je suis obscur. Mais là, même là, je t’ai
aimé à la folie. Je me suis perdu et je me suis souvenu de toi. J’ai
entendu ta voix derrière moi. Reviens. J’ai mal entendu à cause du
vacarme d’une impossible paix.
    Maintenant, regarde, je reviens vers ta source. En feu. Le souffle
coupé. Personne pour m’en empêcher. Je vais la boire. Je vais en vivre.
    Je ne suis pas ma vie. Je vis mal de moi. J’ai été ma mort.
    En toi je revis. Parle-moi. Explique-moi.

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