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Les champs de bataille

Les champs de bataille

Titel: Les champs de bataille Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Dan Franck
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décisive. Il le déstabilise.
    S’assied, ouvre le dossier, tourne les feuillets, en lit un, redresse le visage et dit :
    « Cela ne s’est pas passé exactement ainsi.
    — Prouvez-le.
    — Le train s’est arrêté en gare de Chalon à une heure du matin. Vous étiez dedans. La porte de votre compartiment s’est ouverte. Multon et Moog sont entrés. Multon vous a ordonné de vous lever et de vous habiller. Puis il vous a passé les menottes. Il a également arrêté le voyageur qui partageait votre compartiment. Vous avez été emmenés dans le bureau du commissaire de la gare, puis remis à la police allemande qui vous a conduits à la prison de Chalon. L’homme qui voyageait avec vous était un fonctionnaire de Vichy. Il a été relâché. Pas vous.
    — Rien de nouveau sous le soleil, réplique Hardy, feignant l’insouciance. Tout cela n’est qu’invention. Je répète : Multon et Moog ne sont pas entrés dans mon compartiment, je n’ai pas été arrêté, j’ai sauté du train, je suis descendu à Nîmes. »
    Le greffier note. Quand le cliquetis de la machine à écrire s’arrête, le juge reprend :
    « Après vous avoir remis aux autorités allemandes, Multon et Moog sont remontés dans le train qui les attendait. Le lendemain, ils se trouvaient à Paris pour préparer leur mission : l’arrestation du général Delestraint. »
    Le juge retourne les chemises marquées Rapport F et Rapport K.
    « J’ai été jugé et acquitté sur ce point, conteste Hardy. Le tribunal n’a retenu aucune charge contre moi. »
    Il exprime une lassitude ostentatoire.
    « De plus, vous n’êtes évidemment pas sans savoir que j’ai été interrogé sur tout cela en août 1943 par le commissaire Porte. Il est venu me voir à la demande de quelques résistants qui pas plus que vous ne me croyaient innocent.
    — En effet, dit le juge. Ils vous suspectaient d’avoir livré Jean Moulin.
    — Pas Jean Moulin ! s’emporte Hardy. La réunion de Caluire.
    — La réunion de Caluire », admet le juge.
    Il grimace intérieurement, furieux contre lui-même d’avoir laissé échapper une telle approximation.
    « Je suis resté deux heures avec ce commissaire,reprend Hardy. J’ai répondu à toutes ses questions. Il paraissait convaincu de ma bonne foi.
    — Son rapport infirme votre commentaire, dit le juge. Il note qu’un bataillon de jeunes gens l’a conduit dans la ferme où vous vous cachiez et que ces gens étaient comme votre protection rapprochée.
    — Ils l’étaient. La Gestapo me recherchait. Ces garçons avaient pour mission de me protéger.
    — Vous étiez leur héros ? »
    Hardy regarde le juge en souriant insolemment.
    « Pour eux, mais pas seulement. »
    Le juge ouvre le premier dossier : Rapport F.
    « Je vais vous lire les extraits du rapport Flora vous concernant. »
    Hardy hausse les épaules.
    « Je vous rappelle que ce rapport a été découvert en septembre 1944 dans les locaux de la Gestapo de Marseille. Il a été rédigé en juillet 1943 par Ernst Dunker, chef de la Gestapo locale. Il était adressé à ses chefs parisiens.
    — Ce rapport ne compte pas, objecte Hardy. Vous ne devriez même pas en faire état. M e  Garçon a démontré…
    — Je me fous de ce que votre avocat a démontré ! s’emporte le juge. C’était avant. Nous avons des éléments nouveaux.
    — Alors livrez-les, et cessez de tourner autour du pot !
    — Je suis maître de mon instruction. Vous n’avez aucun droit pour la contester.
    — J’ai fait appel à mon avocat.
    — J’attends qu’il prenne connaissance du dossier. On verra alors comment il réagit !
    — Lisez votre document », gronde Hardy avec un geste réduisant le dossier posé sur la table à une chiure de mouche.
    Le juge revient au rapport Flora et commence à le lire :
    «  Multon, arrêté ici le 28 avril 1943 et utilisé depuis le 30 avril 1943 en qualité d’agent double, a été, après un engagement fructueux dans l’intérêt de la cause allemande, placé le 24 mai 1943 comme agent double, à la disposition de l’Einsatzkommando de Lyon. Surveillant la boîte aux lettres de la section Sabotage des trains, Multon a eu connaissance d’une rencontre prévue de Didot, le 9 juin 1943 à Paris. Dans le train de Paris, Didot fut arrêté et remis à l’EK de Lyon.  »
    Le juge abandonne le dossier. René Hardy, alias Didot, l’observe.
    « Poursuivez », dit-il d’une voix atone.
    Le

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