Les chasseurs de mammouths
abrupte faite de rochers déchiquetés et bouillonnait
ensuite en rapides et en petites cascades. La seule issue était un défilé
rocheux, qui servait de canal d’écoulement aux crues de printemps et par lequel
on pouvait remonter vers les steppes.
— Aaaa laaa maiaiaison.
Les syllabes indéfiniment prolongées retentirent aux oreilles d’Ayla
en vibrations intenses. Elle se retrouva rapidement entraînée au-dessus des
plaines.
— Ayla ! Tout va bien ? disait Jondalar.
La jeune femme sentit un spasme violent ébranler tout son corps.
Elle souleva les paupières, vit deux yeux d’un bleu éclatant fixés sur elle d’un
air inquiet.
— Euh... oui, je crois.
— Que s’est-il passé ? Latie nous a dit que tu étais
tombée en arrière sur le lit, que tu t’étais raidie avant d’être prise de
convulsions. Après ça, tu t’es endormie, et personne ne parvenait à te réveiller.
— Sais pas...
— Tu es venue avec moi, voilà tout, Ayla. A la voix de
Mamut, le couple se retourna.
— Moi ? Aller avec toi ? Mais où ? demanda
Ayla.
Le vieil homme scruta son visage. Elle a peur, pensait-il. Rien
d’étonnant, elle ne s’attendait pas à cette épreuve. C’est déjà bien assez
effrayant la première fois quand on y est préparé. Je n’avais pas soupçonné que
son pouvoir naturel serait aussi grand. Elle n’avait pas même pris le somuti.
Elle a un don trop puissant. Elle doit être formée pour sa propre protection,
mais puis-je tout lui enseigner dès maintenant ? Je ne veux pas qu’elle
considère son Talent comme un fardeau qu’elle devra porter sa vie entière. Je
veux qu’elle sache qu’il s’agit d’un don, même s’il entraîne une lourde
responsabilité... Mais la Mère n’a pas coutume d’accorder Ses Dons à ceux qui
sont incapables de les accepter. La Mère doit nourrir un dessein particulier
pour cette jeune femme.
— Où crois-tu que nous soyons allés, Ayla ? questionna
le vieux chaman.
— Pas sûre. Dehors... Étais dans blizzard et vois bisons...
avec corne brisée... près rivière.
— Tu as bien vu. J’ai été surpris en sentant ta présence
auprès de moi. Mais j’aurais dû envisager cette éventualité car je sentais en
toi grand pouvoir. Tu as un don, Ayla, mais tu as besoin d’être initiée,
guidée.
Ayla se redressa :
— Un don ? demanda-t-elle.
Elle fut secouée d’un frisson glacé, éprouva un instant de peur.
Elle ne voulait pas posséder des dons particuliers. Elle désirait seulement un
compagnon, des enfants, comme Deegie ou toute autre femme.
— Quelle sorte de don, Mamut ?
Jondalar la vit pâlir. Elle a l’air si épouvantée, si
vulnérable, pensa-t-il. Il l’entoura de son bras. Il voulait uniquement la
serrer contre lui, la protéger de tout mal, l’aimer. Ayla se laissa aller
contre la chaleur de son corps, sentit son appréhension s’atténuer. Mamut prit
note de ce subtil échange, l’ajouta à ses précédentes réflexions sur cette
mystérieuse jeune femme qui avait fait parmi eux une soudaine apparition.
Pourquoi chez eux ? se demandait-il.
Ce n’était pas le hasard, il en était convaincu, qui avait
conduit Ayla au Camp du Lion. Rencontres fortuites, coïncidences ne tenaient
pas une grande place dans sa conception du monde. Mamut était persuadé que tout
avait un but, une orientation voulue, une raison d’être, qu’il fût ou non à
même de la saisir. La Mère, il en était sûr, avait eu un motif pour diriger
Ayla vers eux. Il s’était livré à son propos à quelques déductions avisées.
Maintenant, il en savait davantage sur sa vie passée et il se demandait si elle
ne leur avait pas été envoyée en partie à cause de lui. Plus que quiconque, il
le savait, il était en mesure de la comprendre.
— Je ne sais pas très bien de quelle nature est ce don,
Ayla. Un don de la Mère peut prendre de multiples formes. Tu possèdes,
semble-t-il, le don de Guérison. Sans doute ton entente avec les animaux
est-elle un don, elle aussi.
Ayla lui sourit. Si la magie de guérison apprise auprès d’Iza
était un don, elle l’acceptait volontiers. Si Whinney, Rapide et Bébé lui
venaient de la Mère, elle Lui en était reconnaissante. Elle croyait déjà que l’Esprit
du Grand Lion des Cavernes les lui avait envoyés. Peut-être la Mère y
était-elle pour quelque chose, elle aussi.
— Après ce que j’ai appris aujourd’hui, reprit Mamut, je
suis prêt à penser que tu
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