Les chasseurs de mammouths
put en supporter davantage. Il sauta du lit,
resta un instant immobile, hésitant, avant de s’élancer vers l’entrée de la
nouvelle écurie. Whinney sur son passage, dressa les oreilles et se tourna vers
lui au moment où il sortait.
Le vent le projeta contre le mur. Le brusque assaut du froid lui
coupa le souffle, le ramena brutalement à la réalité de ce qui l’entourait. De
l’autre côté de la rivière gelée, des nuages passaient devant la lune. Jondalar
s’éloigna de quelques pas de son abri. Les poignards du vent transperçaient sa
tunique et, lui semblait-il, sa peau, ses muscles, jusqu’à la moelle de ses os.
Il rentra, frissonnant, traversa l’écurie d’un pas lourd, se
retrouva dans le Foyer du Mammouth. Raidi, il tendit l’oreille, n’entendit rien
de prime abord. Mais il perçut bientôt des bruits de respirations, des
gémissements, des grognements. Il regarda la plate-forme de couchage, se
retourna vers l’annexe des chevaux, sans savoir de quel côté se diriger. Il ne
pouvait pas rester à l’intérieur, mais dehors, il ne survivrait pas.
Finalement, il n’y put tenir plus longtemps. Il lui fallait sortir de là. Il
empoigna ses fourrures de voyage et repassa dans l’écurie.
Whinney s’ébroua, secoua la tête. Rapide, couché, se souleva légèrement
pour le saluer d’un petit hennissement. Jondalar s’approcha des deux bêtes,
étala ses fourrures sur le sol, près de Rapide, s’y blottit. Il faisait froid,
mais bien moins froid que dehors. Il n’y avait pas de vent, un peu de chaleur
arrivait de l’habitation, et les chevaux en dégageaient aussi. Leur souffle
couvrait le bruit d’autres respirations oppressées. Même ainsi, Jondalar
demeura éveillé une grande partie de la nuit. Son esprit lui remémorait
certains sons, lui représentait certaines scènes, réelles ou imaginaires, sans
répit, sans fin.
Ayla se réveilla au moment où les premières lueurs du jour
filtraient par les fentes autour du trou à fumée. Elle tendit le bras, à la
recherche de Jondalar, fut déconcertée quand sa main toucha Ranec. Avec le
souvenir de ce qui s’était passé la nuit précédente vint la conviction qu’elle
allait souffrir d’un violent mal de tête, par la faute de la bouza de Talut.
Elle se glissa hors du lit, reprit ses vêtements si soigneusement rangés par
Ranec et se hâta de rejoindre sa propre couche. Jondalar ne s’y trouvait pas.
Elle parcourut les autres du regard. Deegie et Tornec en occupaient une. Ils
dormaient. Ayla se demanda s’ils avaient partagé les Plaisirs. Mais elle se
rappela que Wymez avait été invité au Foyer de l’Aurochs, et que Tronie ne se
sentait pas très bien. Peut-être Deegie et Tornec avaient-ils simplement jugé
plus pratique de coucher au Foyer du Mammouth. C’était sans importance. La
jeune femme se demandait surtout où était Jondalar.
Elle ne l’avait pas revu, se souvint-elle, après une heure déjà
avancée de la nuit. Il était allé se coucher, lui avait dit quelqu’un, mais où
était-il à présent ? De nouveau, elle remarqua la présence de Deegie et
Tornec. Jondalar, lui aussi, devait dormir dans un autre foyer, se dit-elle.
Elle fut tentée de vérifier, mais personne d’autre, apparemment, n’était encore
réveillé, et elle ne voulait pas déranger les dormeurs. Mal à l’aise, elle se
glissa dans son lit vide, remonta les fourrures sur elle et, au bout d’un
moment, se rendormit.
Lorsqu’elle émergea de nouveau du sommeil, on avait enlevé la
couverture du trou à fumée, et un soleil éclatant pénétrait à flots. Sur le
point de se lever, elle sentit une vive douleur frapper à grands coups dans son
crâne. Elle se laissa retomber sur le lit, ferma les yeux. Ou bien je suis très
malade, ou bien c’est le résultat de la bouza de Talut, pensa-t-elle. Pourquoi
les gens prennent-ils plaisir à la boire, si elle les rend si malades ?
Son esprit la ramena à la fête de la veille. Elle n’en gardait pas un souvenir
très net, mais elle se rappelait avoir joué des rythmes sur le tambour, avoir
dansé, chanté sans d’ailleurs bien savoir comment. Elle avait beaucoup ri, même
d’elle-même, quand elle avait découvert qu’elle n’avait à peu près pas de voix,
et sans se soucier le moins du monde d’être le point de mire de tous. Cela ne
lui ressemblait pas. Normalement, elle préférait se tenir un peu à l’écart, en
observatrice, et s’exercer, se perfectionner dans la
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