Les chasseurs de mammouths
os
qui leur servaient d’instruments. Ils en modifiaient subtilement la tonalité
pour accompagner les voix qui commençaient à psalmodier.
— Vous serez unis lors de la Réunion d’Été, afin que tous
les Mamutoï soient témoins de votre Union, déclara Tulie. Faites par trois fois
le tour du feu, afin de garantir la Promesse.
Côte à côte, Ranec et Ayla marchèrent par trois fois autour du
feu, au son de la musique et de la psalmodie de l’assistance. Ils étaient
Promis. Ranec était plongé dans l’extase. Il avait l’impression que ses pieds
touchaient à peine le sol. Son bonheur était à ce point dévorant qu’il lui
était impossible de croire qu’Ayla ne le partageait pas. Il avait bien remarqué
chez elle une certaine réticence mais il l’avait attribuée à la timidité, à la
fatigue, à la nervosité. Il l’aimait tant qu’il était pour lui inconcevable d’envisager
qu’elle ne l’aimât pas avec la même ardeur.
Mais Ayla, elle, avait le cœur lourd, tout en s’efforçant de ne
pas le montrer. Jondalar se laissa glisser contre le mur. Comme si ses os
eux-mêmes lui refusaient tout service, il était incapable de se soutenir, il se
faisait l’effet d’une vieille bourse vide, jetée au rebut. Plus que de tout
autre chose, il éprouvait l’envie de partir en courant, d’échapper au spectacle
de la femme ravissante qu’il aimait aux côtés de l’homme à la peau sombre dont
le visage rayonnait de joie.
Lorsqu’ils eurent achevé le troisième cercle, il se fit une pause
dans le déroulement des cérémonies, afin de présenter des vœux et de faire des
cadeaux à tous ceux qui y avaient participé. Parmi les présents offerts à
Bectie figurait l’espace cédé au Foyer de la Grue par le Foyer de l’Aurochs,
ainsi qu’un collier d’ambre et de coquillages et un petit couteau dans une
gaine ornementée qui représentaient les premières des richesses qu’elle
accumulerait au cours de sa vie. Latie reçut des cadeaux personnels très
importants pour une femme et, de Nezzie, une magnifique tunique d’été,
richement décorée, qu’elle porterait durant les festivités de la Réunion d’Été.
Elle recevrait bien d’autres présents de parents et d’amis dans d’autres Camps.
Ayla et Ranec se virent offrir des objets ménagers : une
grande cuiller taillée dans une corne, un grattoir à deux manches qu’on
utilisait pour assouplir la face interne des fourrures, des coupes, des bols,
des écuelles. Ayla avait l’impression de recevoir une multitude d’objets. Il ne
s’agissait pourtant que de dons symboliques. Le couple recevrait bien davantage
à la Réunion d’Été, mais alors, les Promis et le Camp du Lion devraient, eux
aussi, offrir des présents. Ceux-ci, qu’ils fussent importants ou non, n’allaient
jamais sans obligations, et la comptabilité de qui devait quoi à qui représentait
un jeu complexe mais toujours fascinant.
— Oh, Ayla, je suis si heureuse que nous devions être unies
en même temps ! s’écria Deegie. Ce sera tellement amusant de tout arranger
avec toi. Mais tu reviendras ici, et moi, je partirai. Tu me manqueras, l’an
prochain. Il aurait été tellement amusant de savoir laquelle recevra la
première la bénédiction de la Mère. Ayla, tu dois être si heureuse.
— Oui, sans doute, dit Ayla.
Elle souriait, mais le cœur n’y était pas.
Deegie s’interrogeait sur ce manque d’enthousiasme. Ayla ne
paraissait pas aussi follement heureuse qu’elle-même l’avait été après sa
Promesse. Ayla, elle aussi, se posait des questions. Elle aurait dû être
heureuse, elle aurait aimé l’être mais elle n’avait conscience que de ses
espérances perdues.
Pendant les échanges de vœux, de félicitations et de
commentaires, Mamut et elle s’éclipsèrent pour mettre la dernière main à leurs
préparatifs dans le Foyer de l’Aurochs. Lorsqu’ils furent prêts, ils revinrent
par le passage central, mais Mamut s’immobilisa dans l’ombre, entre le Foyer du
Renne et le Foyer du Mammouth. Les assistants, par petits groupes, s’absorbaient
dans leurs conversations. Le chaman attendit un moment où personne ne regardait
dans leur direction. Il fit alors signe à Ayla, et tous deux se glissèrent
vivement dans le périmètre réservé aux cérémonies et se réfugièrent dans l’ombre
jusqu’au dernier moment.
Personne, au début, ne remarqua la présence de Mamut. Debout
devant le feu, près de l’écran,
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