Les chasseurs de mammouths
lorsqu’ils
partiraient pour leurs propres migrations d’été.
Le Camp du Lion se préparait pour la Réunion d’Été, et l’agitation
était à son comble. Une fois au moins par jour, quelqu’un expliquait à Ayla qu’elle
prendrait plaisir à faire la connaissance de tel ou tel parent ou ami, et que
tous ces gens seraient heureux de la rencontrer. Le seul qui semblait manquer d’enthousiasme
à la perspective de ce rassemblement des Camps était Rydag. Jamais Ayla n’avait
vu l’enfant aussi déprimé, et elle s’inquiétait pour sa santé.
Durant plusieurs jours, elle l’observa avec attention. Par un
après-midi exceptionnellement chaud, où il regardait plusieurs personnes
étendre sur des cadres des peaux de rennes, elle s’assit à côté de lui.
— J’ai préparé pour toi un nouveau remède, Rydag, dit-elle.
Tu l’emporteras à la Réunion d’Été. Il est plus frais, et il aura peut-être
plus de force. Il faudra me dire si tu constates des différences, en mieux ou
en plus mal.
Elle s’exprimait à la fois par des signes et par des mots, comme
elle le faisait généralement avec lui.
— Comment te sens-tu, en ce moment ? Y a-t-il eu des
changements, ces derniers temps ?
Rydag aimait parler avec Ayla. Il était profondément
reconnaissant de pouvoir désormais communiquer avec son Camp, mais, pour les
Mamutoï, la compréhension et l’usage du langage par signes étaient
essentiellement simples et directs. Il comprenait depuis des années leur
langage parlé, mais, lorsqu’ils s’adressaient à lui, ils avaient tendance à le
simplifier pour l’accorder aux signes qu’ils utilisaient. Les signes qu’employait
Ayla serraient de plus près les nuances et l’esprit du langage verbal, ils
rehaussaient ses paroles.
— Non, je me sens comme d’habitude, lui exprima-t-il.
— Tu n’es pas fatigué ?
— Non... Oui. Toujours fatigué un peu. Pas trop, ajouta-t-il
en souriant.
Ayla hocha la tête. Elle l’examinait de près, à la recherche de
symptômes visibles. Elle tentait de s’assurer qu’il ne s’était produit aucun
changement dans son état, du moins pas d’aggravation. Elle ne distinguait aucun
signe de détérioration physique, mais l’enfant semblait abattu.
— Rydag, quelque chose te tourmente ? Tu es
malheureux ?
Il haussa les épaules, le regard détourné. Mais il reporta
bientôt les yeux sur la jeune femme.
— Veux pas partir, fit-il par signes.
— Où ne veux-tu pas partir ? Je ne comprends pas.
— Veux pas aller à la Réunion.
Il s’était de nouveau détourné d’elle.
Ayla fronça les sourcils mais n’insista pas. Apparemment, Rydag
n’avait pas envie de s’attarder sur le sujet. Il ne tarda pas à rentrer dans l’habitation
où elle le suivit, et, du foyer de la cuisine, elle le regarda s’allonger sur
son lit. Elle était inquiète. Il était rare qu’il se couchât de son plein gré
dans la journée. Elle vit Nezzie entrer et s’arrêter pour rattacher le rabat.
Ayla se hâta d’aller l’aider.
— Nezzie, sais-tu ce qui ne va pas, chez Rydag ? Il a
l’air... si malheureux, dit-elle.
— Oui, je sais. Il est ainsi chaque année, à cette époque.
C’est la Réunion d’Été qui lui déplaît.
— C’est ce qu’il m’a dit. Mais pourquoi ? Nezzie prit
le temps de dévisager Ayla.
— Tu ne le sais vraiment pas, hein ?
La jeune femme fit non de la tête. Nezzie haussa les épaules.
— Ne t’en inquiète pas, Ayla. Tu ne peux rien y faire.
La jeune femme s’engagea dans le passage central et jeta un coup
d’œil vers l’enfant. Il avait les paupières closes mais il ne dormait pas, elle
le savait. Elle secoua la tête. Elle aurait aimé pouvoir lui venir en aide. Son
abattement, se disait-elle, venait sans doute du fait qu’il était différent des
autres. Pourtant, il s’était déjà rendu à d’autres Réunions.
Très vite, elle traversa le Foyer du Renard, désert, et pénétra
dans le Foyer du Mammouth. Brusquement, Loup arriva en bondissant, se retrouva
sur ses talons et se mit, par jeu, à sauter autour d’elle. D’un signe, elle lui
ordonna de se tenir tranquille. Il obéit mais il avait l’air si malheureux qu’elle
se radoucit, lui lança le morceau de peau longuement mâchonné qui avait été l’un
de ses chaussons d’intérieur favoris. Elle avait fini par le lui abandonner
lorsqu’elle avait découvert qu’apparemment c’était le seul moyen pour
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