Les chasseurs de mammouths
c’était
sans doute qu’il ne voulait pas d’elle à ses côtés.
Ayla le suivit des yeux jusqu’à ce qu’il eût disparu. Loup
jappait avec énergie, quémandait son attention. Elle noua sa fronde autour de
sa tête, vérifia le nombre des galets dans leur petit sac, ramassa le louveteau
et le posa sur le garrot de Whinney. Elle sauta alors sur le dos de la jument
et, à son tour, s’engagea sur la pente, dans une direction différente de celle
qu’avait prise Jondalar. Elle avait projeté de chasser avec Loup, et le moment
était venu. Le petit loup avait commencé de suivre et de tenter d’attraper des
petits rongeurs et d’autres animaux et Ayla avait découvert qu’il était habile
à lever le gibier pour sa fronde. Au début, c’était par accident, mais Loup
apprenait vite : déjà, elle s’était mise à le dresser à faire partir les
bêtes à son commandement.
Ayla ne s’était pas trompée sur un point. Si Jondalar s’était
éloigné en toute hâte, ce n’était pas parce qu’il ne voulait pas se trouver
près d’elle à ce moment, mais bien plutôt parce qu’il éprouvait le désir d’être
avec elle à tout instant. Il avait besoin de fuir ses propres réactions à la
proximité de la jeune femme. Elle avait maintenant donné sa Promesse à Ranec,
et lui-même avait perdu tout droit qu’il aurait pu avoir sur elle. Ces derniers
temps, il enfourchait Rapide toutes les fois qu’il voulait échapper à une
situation difficile ou à la lutte contre des émotions contradictoires, ou, plus
simplement, quand il avait envie de réfléchir. Il commençait à comprendre
pourquoi, si souvent, Ayla avait eu recours à la fuite sur Whinney lorsqu’elle
était tourmentée. Parcourir les vastes plaines herbeuses sur l’étalon, sentir
le vent lui fouetter le visage avaient sur lui un effet à la fois calmant et
vivifiant.
Une fois sur la steppe, il mit Rapide au galop, se coucha sur l’encolure
vigoureuse qui se tendait en avant. Amener le jeune étalon à accepter un
cavalier avait été étonnamment rapide, mais, de bien des manières, Ayla et
Jondalar l’y avaient peu à peu accoutumé. Il était plus malaisé de découvrir
comment se faire comprendre du cheval pour qu’il acceptât la direction choisie
par son cavalier.
La maîtrise d’Ayla sur Whinney, Jondalar le comprenait, s’était
élaborée d’une façon toute naturelle, de sorte que les signaux de la jeune
femme étaient encore en grande partie inconscients. Jondalar, lui, avait une
démarche plus préméditée, et, en dressant l’animal, il apprenait lui-même
beaucoup. Il apprenait comment se tenir sur l’étalon, comment profiter de la
vigueur de ses muscles au lieu de se laisser rebondir sur son dos. Il
découvrait que la sensibilité du cheval à une simple pression des cuisses, à de
légères modifications dans la position de son corps le rendait plus facile à
guider.
A mesure qu’il gagnait en assurance et se sentait plus à l’aise,
il montait plus souvent, et c’était précisément ce dont l’un et l’autre avaient
besoin. En même temps, plus il connaissait Rapide, plus son affection pour lui
grandissait. Cette affection, il l’avait éprouvée dès le début, mais c’était
encore le cheval d’Ayla. Il se répétait sans cesse qu’il dressait Rapide pour
elle, tout en détestant l’idée de laisser derrière lui le jeune étalon.
Il avait formé le projet de partir tout de suite après la Fête
du Printemps. Pourtant, il était toujours là et il ne savait pas pourquoi. Il s’inventait
des raisons : la saison n’était pas encore assez avancée, le temps restait
imprévisible, et il avait promis à Ayla d’entraîner Rapide. Mais c’étaient là
de simples prétextes, il ne l’ignorait pas. Talut croyait qu’il prolongeait son
séjour pour les accompagner à la Réunion d’Été. Jondalar ne cherchait pas à le
détromper, tout en se disant qu’il serait en route avant le départ des Mamutoï.
Chaque soir, lorsqu’il allait se coucher, et surtout si Ayla se rendait au
Foyer du Renard, il se promettait de partir le lendemain mais, chaque jour, il
retardait sa décision. Il avait beau lutter contre lui-même : toutes les
fois qu’il songeait sérieusement à faire ses paquets, il revoyait Ayla, inerte
et glacée, sur le sol du Foyer du Mammouth et il ne pouvait pas partir.
Le lendemain de la Fête, Mamut lui avait parlé : il lui
avait expliqué que la racine possédait un pouvoir
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