Les chasseurs de mammouths
des rognons brûlés. De la main droite, il prit un outil à retoucher,
taillé dans l’os. Il posa la pointe de l’outil contre l’arête du silex, exerça
une forte pression d’arrière en avant et de haut en bas. Un petit éclat, plat
et allongé, se détacha. Il le montra aux deux autres. Jondalar le lui prit,
avant de tenter lui-même l’expérience. Visiblement, le résultat le surprit
agréablement.
— Il faut que je montre ça à Dalanar ! C’est
incroyable ! Il a déjà amélioré un certain nombre de procédés... Comme
toi, Wymez, il possède un don naturel pour travailler la pierre. Mais, ce
silex, on pourrait presque en faire des copeaux. Est-ce le feu qui le rend
ainsi ? Wymez hocha la tête.
— Je n’irai pas jusqu’à dire qu’on peut en faire des
copeaux. C’est toujours de la pierre, ce n’est pas aussi malléable que de l’os,
mais, quand on sait travailler la pierre, la passer au feu facilite la besogne.
— Je me demande ce qui se passerait sous une percussion
indirecte... As-tu déjà essayé de te servir d’un morceau d’os ou de corne
épointé pour diriger la force d’un coup de percuteur ? On pourrait obtenir
des lames plus longues et plus minces, avec cette méthode.
Jondalar, se disait Ayla, possédait lui aussi un don naturel
pour travailler la pierre. Mais, plus encore, elle percevait sous son
enthousiasme, sous ce désir spontané de partager avec Dalanar cette
merveilleuse découverte, une douloureuse envie de retourner chez lui.
Ayla, dans sa vallée, lorsqu’elle hésitait à partir à la
recherche de ces Autres qu’elle ne connaissait pas, croyait que Jondalar
voulait voyager pour rencontrer d’autres gens. Elle n’avait jamais bien
compris, avant ce jour, à quel point son désir de retrouver son pays était
violent. C’était une brutale révélation. Elle avait maintenant l’intime
conviction qu’il ne serait jamais vraiment heureux ailleurs.
Tout en regrettant cruellement l’absence de son fils et des
êtres qu’elle aimait, Ayla n’avait jamais éprouvé une nostalgie semblable à
celle de Jondalar : ce désir de retourner en des lieux familiers, où les
gens lui étaient connus, où les coutumes étaient rassurantes. En quittant le
Clan, elle savait qu’elle ne pourrait jamais y revenir. Aux yeux de ces gens,
elle était morte. S’ils la revoyaient, ils se croiraient en présence d’un
esprit malin. A présent, elle savait qu’elle ne retournerait pas vivre parmi
eux, même si elle le pouvait. Elle était au Camp du Lion depuis bien peu de
temps mais, déjà, elle s’y sentait plus à l’aise qu’elle ne l’avait jamais été,
durant les longues années passées au sein du Clan. Iza ne s’était pas trompée.
Elle n’appartenait pas au Clan. Elle était née chez les Autres.
Perdue dans sa méditation, Ayla avait manqué une partie de la
discussion. En entendant Jondalar prononcer son nom, elle fut rappelée à la
réalité.
— ... la technique d’Ayla doit être proche de la leur, je
crois. C’est avec eux qu’elle l’a apprise. J’ai vu certains de leurs outils
mais je ne les avais jamais vu débiter jusqu’au jour où Ayla m’a montré comment
ils s’y prenaient. Ils ne manquent pas d’habileté, mais il y a loin entre le
fait de préparer une pierre et celui d’exercer une pression intermédiaire. C’est
ce qui fait la différence entre un outil grossièrement taillé et une belle lame
légère.
Wymez hocha la tête en souriant.
— Si seulement nous pouvions maintenant trouver le moyen de
faire une lame bien droite. On peut s’y prendre de n’importe quelle manière, le
tranchant d’un couteau n’est jamais aussi affilé, une fois qu’on l’a retouché.
Danug intervint dans la discussion.
— J’y ai réfléchi, dit-il. Si l’on creusait une rainure
dans un os ou dans une corne et si l’on y collait ensuite des petites
lames ? Assez petites pour être presque droites ?
Jondalar médita un instant cette proposition.
— Comment ferais-tu ?
— Ne pourrait-on commencer avec un petit noyau ?
suggéra Danug, d’un ton un peu hésitant.
— Ce serait peut-être possible, Danug, dit Wymez, mais un
petit nucleus pourrait être difficile à travailler. J’ai pensé à utiliser une
lame plus grande et à la fragmenter en petits morceaux...
Ils étaient encore en train de parler de silex, comprit Ayla.
Jamais ils ne paraissaient s’en lasser. Le matériau et ce qu’on pouvait en
tirer
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