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Les chevaliers du royaume

Les chevaliers du royaume

Titel: Les chevaliers du royaume Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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avait immédiatement convoqué les principaux notables de Jérusalem, dont Héraclius et Châtillon. En voyant le Saint Bois dans les bras d’Ernoul, Héraclius avait pâli de jalousie : l’objet qu’il avait tant convoité, qu’il avait tant cherché, entre les mains d’un autre ! Et, qui plus est, d’un homme qui n’avait jamais rêvé mieux que d’être un écuyer, sa vie durant !
    Le patriarche avait si bien fait que Balian avait accepté de lui remettre la Vraie Croix afin qu’il la restituât à son foyer d’origine : le Saint-Sépulcre.
    — C’est sa maison ! La seule, la vraie ! avait glapi Héraclius d’une voix suraiguë.
    Ainsi, tous les Hiérosolymitains pourraient la contempler et savoir que Dieu ne les avait pas complètement abandonnés.
    — Je me charge de l’y convoyer, avait proposé Châtillon. Mes hommes sont tout désignés pour ça, vous pouvez nous faire confiance !
    N’osant protester, Héraclius avait laissé Châtillon s’emparer du Saint Bois, puis, las, sentant que de toute façon Dieu s’était détourné de lui, il s’en était retourné à ses préoccupations premières : organiser sa fuite, maintenant qu’on savait que Saladin les laisserait selon toute vraisemblance quitter en vie la ville. Ce n’était plus qu’une question d’heures, et d’argent.
    « Au moins, pensait Héraclius, je serai loin quand ce fou de Châtillon ira réveiller les Enfers ! »
    Ce en quoi il se trompait. « Le fou » allait mettre son plan à exécution sur-le-champ.
    Un sourire narquois naquit sur les lèvres de Châtillon, qui s’enfonçait dans les entrailles de la Moriah à l’aide d’un monte-charge actionné par une roue immense, où tournaient quatre de ses hommes. Il était accompagné de Gérard de Ridefort, de Bernard de Lydda, de Wash el-Rafid, de deux arbalétriers et de six Templiers blancs, dont Kunar Sell. Ils étaient donc douze à faire le voyage jusqu’au plus profond des souterrains de la colline, d’où ils remonteraient, en compagnie d’al-Afdal, vers le dôme du Rocher. Là, sur la pierre où Dieu avait arrêté le bras d’Abraham avant qu’il ne lui sacrifiât son fils, il égorgerait ce que le Glaive de l’Islam avait de plus précieux. Et, si Dieu n’appréciait pas, il ferait pire, un peu plus bas, dans d’autres souterrains.
    Châtillon les avait parcourus plusieurs fois, en compagnie d’Héraclius, de ses fils et de Gérard de Ridefort. Bernard de Lydda profita de cette occasion pour expliquer :
    — Les églises, les mosquées construites à la surface de l’esplanade ne sont que les résurgences de temples plus anciens encore, où l’on priait des dieux aujourd’hui oubliés. Il est étonnant de voir à quel point nos édifices religieux communiquent entre eux par des passages secrets, dont on sait qu’ils les ont précédés – et non suivis, contrairement à ce qu’on croit. Par exemple, un boyau permet d’aller des sous-sols du dôme du Rocher à ceux du Temple du roi Salomon, où sont les Templiers. Un autre relie, dit-on, le Saint-Sépulcre à la mosquée d’Omar… Enfin, quoi de plus amusant que de penser que, dans le Saint-Sépulcre, un rocher porte l’empreinte du Fils de Dieu, alors que, sous le dôme du Rocher, un autre a en creux l’empreinte du pied de l’envoyé d’Allah ! D’une certaine façon, Notre Seigneur Jésus-Christ et le Prophète sont les deux piliers sur lesquels s’appuie Dieu…
    Wash el-Rafid sourit et dit en caressant les leviers de son arbalète, toujours chargée :
    — Il a peut-être deux jambes, mais il n’y a qu’un seul Dieu. Nous le voyons avec nos pauvres yeux d’humains. Alors, forcément, nous en avons une vision multipliée. Mais Dieu est le seul, l’unique…
    — Tu parles comme un Mahométan, l’interrompit Châtillon.
    El-Rafid ne répondit rien, se contentant de fixer Châtillon, qui le défiait lui aussi du regard. Aucun de ces deux hommes n’avait jamais baissé les yeux devant personne. Et ce n’était pas aujourd’hui qu’ils commenceraient.
    Les pierres à feu avaient rempli leur office et permis d’allumer trois torches, qui jetaient sur les parois du puits de courtes lumières, trop froides pour le réchauffer. Leur descente dans les profondeurs de la Moriah s’effectua dans un silence relatif, bercé par les râles des hommes et les bruits des cordes et des poulies, qui travaillaient à les faire, lentement, progresser dans un tombeau de plus

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