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Les cochons d'argent

Les cochons d'argent

Titel: Les cochons d'argent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lindsey Davis
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souvenait donc pas. Je n’avais aucune envie de m’embarquer dans une leçon d’histoire.
    Elle me demanda de but en blanc :
    — Pourquoi votre ami vous a-t-il traité de sournois ?
    — Je suis un farouche républicain, ce qui me rend dangereux aux yeux de Petronius Longus.
    — Et pourquoi êtes-vous républicain ?
    — J’estime que tout homme libre doit avoir son mot à dire sur le gouvernement de la cité où il réside. Il est anormal que le Sénat confie tous les pouvoirs, à vie, à un seul homme. Même s’il n’est pas fou, corrompu ou immoral, il a toutes les chances de le devenir. Et je déteste voir Rome transformée en un asile dirigé par une poignée d’aristocrates, eux-mêmes manipulés par des esclaves affranchis beaucoup trop cyniques… alors que la majorité de la population n’arrive pas à gagner de quoi vivre décemment.
    Je n’aurais su dire ce qu’elle pensait de tout cela. Sa question suivante fut pragmatique à souhait.
    — Un enquêteur privé gagne bien sa vie ?
    — En ne négligeant aucun moyen légal, on arrive à grappiller de quoi tenir. Les jours fastes, une table garnie d’un rien suffit à nous mettre la rage au ventre. Alors, on s’en prend à toute l’injustice du monde.
    À ma décharge, je dois avouer que j’étais bien ivre. J’avais suivi Petro verre pour verre.
    — Comme ça, vous trouvez le monde injuste ?
    — Petite, je n’en doute pas un instant.
    Sosia me contemplait, pensive, comme triste à l’idée que la vie m’ait traité durement. Je la regardais droit dans les yeux. Moi aussi, j’avais le vague à l’âme.
     
    Me sentant fatigué, je retournai dans le salon. Après quelques instants, elle me rejoignit.
    — J’ai encore besoin d’aller aux toilettes.
    J’éprouvais l’angoisse de celui qui, ramenant chez lui un mignon petit chiot, réalise seulement au sixième étage qu’il a un léger souci. Inutile de paniquer. Mon appartement était certes spartiate, mais j’avais une vie des plus hygiéniques.
    — Eh bien, fis-je avec malice, il y a plusieurs solutions… Vous pourriez descendre et tenter de convaincre Lenia de vous ouvrir la blanchisserie, ou courir au bas de la rue jusqu’aux toilettes publiques ; mais n’oubliez pas d’emporter la piécette pour payer à l’entrée – ce serait dommage d’avoir à remonter les six étages !
    — J’imagine, lança-t-elle d’un ton hautain, que vous et vos copains urinez du balcon ?
    Je pris mon air le plus offusqué, même si je ne l’étais qu’à moitié.
    — Vous ne savez pas que c’est interdit par la loi ?
    — Je ne vous croyais pas si respectueux des lois sur les nuisances publiques ! railla-t-elle.
    Elle commençait à se faire une petite idée du genre de la maison et de son patron. Je lui fis signe du doigt. Elle me suivit vers la chambre où je lui montrai l’installation rudimentaire dont je faisais usage.
    — Merci, dit-elle.
    — De rien.
    Je ne me privai pas d’affirmer mon indépendance en allant uriner du balcon.
     
    Quand elle revint, elle me trouva plongé en pleine réflexion. Contrairement à d’habitude, pour cette histoire d’enlèvement, j’avais du mal à me faire une idée générale. Je ne savais pas si l’essentiel m’échappait encore où si je possédais déjà tous les éléments. Le sénateur à qui on l’avait enlevée jouait-il un rôle politique ? On avait peut-être cherché à influencer son vote ? Cette hypothèse ne me contentait guère. Sosia était beaucoup trop belle. Il devait y avoir autre chose.
    — Vous allez me ramener chez moi ?
    — Il est trop tard. Ivre comme je suis, ce serait trop dangereux.
    Lui tournant le dos, je me dirigeai vers ma chambre et m’effondrai sur mon lit. Elle demeura sur le pas de la porte.
    — Où vais-je dormir ?
    L’alcool m’avait vraiment monté à la tête. Allongé de tout mon long, je tenais mes carnets serrés tout contre moi. Je me sentais juste capable de quelques gestes maladroits ou de sortir quelques idioties.
    — Contre moi, belle déesse ! m’exclamai-je, avant d’ouvrir grand mes deux bras, l’un après l’autre.
    Elle prit peur.
    — Parfait ! finit-elle par rétorquer.
    La petite ne manquait pas d’aplomb. Je lui adressai un faible sourire, puis repliai les bras. Je n’étais pas très tranquille moi non plus. J’avais pourtant raison. Le risque aurait été trop grand de faire un pas dehors avec un être si convoité. Surtout à

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