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Les Conjurés De Pierre

Les Conjurés De Pierre

Titel: Les Conjurés De Pierre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philipp Vandenberg
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ces joyeux lurons faisaient malgré tout figure d’enfants de chœur comparés à ce pape débauché.
    Officiellement, le pape Jean vivait avec la sœur du cardinal de Naples. Il avait néanmoins une seconde épouse, la femme de son beau-frère. Ce qui n’empêchait pas le représentant de Dieu de partager sa couche avec des novices et des jeunes clercs qui s’enrichissaient considérablement en l’espace d’une nuit. Jean était en effet généreux en amour, il dépensait sans compter les deniers de l’ é glise et nommait selon son bon plaisir les uns ou les autres abbés ou évêques, titres qui leur assuraient d’honorables revenus.
    Au matin, après une bonne nuit de sommeil, Afra fut éveillée par des cris. Elle se précipita à la fenêtre. Elle s’attendait à voir une émeute, mais ce n’était rien d’autre que le brouhaha ordinaire de la ville. Dès la pointe du jour, la populace se pressait, criait et jurait dans toutes les langues. Par endroits, les rues étaient tellement encombrées qu’elles devenaient un vrai paradis pour les filous, les escrocs et les voleurs.
    En descendant l’escalier, elle rencontra Pietro de Tortosa et bavarda avec lui. Ils échangèrent leurs impressions sur la ville s’accordant à la trouver peu rassurante :
    — Je ne saurais trop vous conseiller de mettre vos biens de valeur en lieu sûr, lui dit-il. Les voleurs courent les rues, ils ne prennent même pas la peine de se cacher. Les grandes manifestations attirent les malandrins comme la lumière les mouches. Si vous le souhaitez, vous pouvez vous joindre à moi et à mon secrétaire, nous allons déposer notre argent et nos papiers chez un changeur.
    La proposition était aimable mais Afra se méfiait. Tant de sollicitude de la part de l’ambassadeur ne lui disait rien qui vaille :
    — Messire Pietro, je ne possède rien de précieux méritant d’être placé dans un coffre-fort, répondit-elle en riant.
    Pietro leva les bras :
    — Je ne disais cela que pour votre bien, donna Gysela, n’y voyez aucun mal !
    Il prononça son nom d’emprunt sur ton qui inquiéta Afra.
    — Ne vous souciez pas de moi. Merci encore pour ce conseil, dit-elle poliment.
    Elle se sentait mal à l’aise. L’ambassadeur si prévenant pouvait-il savoir qu’elle portait sur elle depuis quatre semaines un précieux document ?
    Lorsque Pietro de Tortosa et son secrétaire quittèrent peu après la maison, Afra leur emboîta le pas immédiatement. Ils parvinrent laborieusement jusqu’à la place de l’église pourtant à deux pas. Les ruelles étroites de la ville étaient remplies d’une foule bigarrée : moines portant d’étranges habits, marchands d’oies, femmes déguenillées, marchands de pierre à feu, vendeurs de bimbeloteries, cochers, marins, béguines en robe brune, vagabonds, riches tisserands, aveugles feignant seulement de l’être, paysans, médecins portant le bonnet carré et la robe noire, tenancières de bordel entourées de leurs filles, évêques en chasuble aux visages inspirés, coiffés de leurs mitres, rétameurs, bouffons, charlatans, curés bedonnants en aube, joueurs de tambour et de fifre, poètes, vendeurs de reliques, manchots, estropiés mandant la charité dans leurs caisses à roulettes, voleurs cachés dans de grands manteaux, nègres d’Éthiopie, Russes aux visages carrés, créatures angéliques belles et attirantes comme le péché, pénitents, sergents, palefreniers malodorants, Maures dansant en sarong, écrivains publics, ambassadeur du Grand Turc accompagné de ses épouses en sarouals – que Dieu ait pitié de leurs âmes –, écuyers, élégantes filles de joies, jeunes et séduisantes jeunes filles à marier, matrones sur le retour, hérauts, montreurs d’ours, gens déguisés, hommes sur des échasses, sans compter tous les spectateurs qui assistaient à ce spectacle.
    Afra crut un moment que l’ambassadeur cherchait à l’attirer dans un traquenard. Elle fut rassurée quand elle le vit disparaître dans l’échoppe du changeur Betminger, dont elle lut le nom sur l’enseigne au-dessus de la porte d’entrée. Un peu plus tard, il en ressortait et se perdait dans la foule.
    Que devait faire Afra ? Elle décida de mettre en dépôt le parchemin et la majeure partie de sa fortune qu’elle avait toujours sur elle dans une bourse.
    Pendant le concile, il y avait au moins une trentaine de changeurs venus s’installer à Constance où leurs affaires ne pouvaient

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